Xavier Delgrange: «La liberté académique ne peut être utilisée à tort et à travers»

Xavier Delgrange est premier auditeur chef de section au Conseil d’Etat et chargé de cours à l’Université Saint-Louis. Si la liberté académique est une nécessité pour faire avancer les connaissances, il estime qu’elle ne donne pas tous les droits. [scald=28125516:sdl_editor_representation] Il n’est pas rare que des décisions, ou plutôt l’absence de décision politique, en matière d’enseignement supérieur se justifient par la notion de liberté académique. D’où vient cette notion ? La liberté académique est une liberté qui résulte de la nécessité de mener des recherches et d’enseigner en étant libre de toute pression extérieure. Pour Paul Ricoeur, célèbre philosophe français, la liberté académique n’a pas d’autre origine que le droit de l’humanité à poursuivre la recherche de la vérité sans contrainte. Je cite : « La liberté académique n’est donc pas un privilège de caste ni de l’institution en tant que telle, ni des enseignants en tant que corporation, ni des étudiants en tant qu’organisation syndicale, corporative, politique ou idéologique. » La cour constitutionnelle a également statué sur la question. « La liberté académique traduit le principe selon lequel les enseignants et les chercheurs doivent jouir, dans l’intérêt même du développement du savoir et du pluralisme des opinions, d’une très grande liberté pour mener des recherches et exprimer leurs opinions dans l’exercice de leurs fonctions. » Mais cette liberté s’accompagne aussi de responsabilités, notamment à l’égard du savoir. Elle ne donne pas tous les droits. Peut-il y avoir recours pour ne pas contraindre les enseignants à proposer une alternative – autre que la seconde session – aux étudiants en quarantaine ? Je ne vois pas bien le rapport. La liberté académique ne peut être utilisée à tort et à travers. On ne peut l’invoquer pour refuser de faire quelque chose dans l’intérêt des étudiants. Par exemple, la liberté académique ne préserve pas l’enseignant de prendre la décision de fournir ou non un support de cours. En revanche, il jouit d’une liberté relative quant à son contenu. Là est toute la difficulté de l’interprétation que l’on donne à cette liberté. Autre exemple, à Saint-Louis, où j’enseigne, il y a une assez forte restriction à ce que l’évaluation se fasse sous la forme d’un travail. Il s’agit d’une décision facultaire. Mais je reste libre de poser les questions que je souhaite, de réaliser un examen oral ou un écrit. S’agissant du refus de donner une seconde chance, c’est davantage le souci de raisons organisationnelles et d’assurer l’égalité entre les étudiants.

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