Les films cultes qui ont marqué Cannes: «Out of Africa» de Sydney Pollack

Fermez les yeux et imaginez : une chaleur écrasante, des cheveux emmêlés de sueur puis un homme au charme fou en saharienne qui vous fait un shampoing au bord d’une rivière avant de faire couler l’eau fraîche sur votre crâne, tête renversée soutenue par une main douce. Ou imaginez avoir près de vous la femme qui vous semblait inaccessible et là, elle s’offre, tête renversée, nuque moite et vous pouvez lui caresser les cheveux mouillés tout en murmurant un poème… Robert Redford et Meryl Streep, un couple pour lequel on craque sans hésitation parce qu’ils sont tout en délicatesse, pleins de charme, d’humour ; parce qu’il la considère son égale, sa valeur suprême étant la liberté, la sienne et celle des autres, et revendique une relation où » [scald=28314864:sdl_editor_representation] l’amour serait roi et ça se passerait de preuves » ; parce qu’il lui fait survoler les merveilles de la nature et de la faune africaines ; parce qu’elle a débarqué dans la chaleur et la poussière avec sa porcelaine de Limoges ; parce qu’elle raconte de longues histoires comme personne à la lueur de la nuit ; parce qu’ils mangent des mets délicats sur une nappe banche dressée au cœur de la savane ; parce que, lorsqu’il la prend dans ses bras, elle lui dit : « Vous me dites quoi que ce soit maintenant, je vous croirai. » Voilà pourquoi Out of Africa fait partie des films les plus romantiques de l’histoire du cinéma. Une ferme en Afrique Mais ce n’est pas son seul atout. Film culte des années 80, consacré notamment par l’Oscar du meilleur film, du meilleur réalisateur, de la meilleure musique, Out of Africa, c’est aussi d’incroyables et somptueux paysages, la musique de Mozart parmi les singes en liberté, l’élégance d’un Maasaï qui se tient à l’écart, la mélodie hyper romantique et bouleversante de John Barry. C’est aussi et avant tout le récit de Karen Blixen, racontant une romance mais aussi un combat dans l’Afrique coloniale, sa lutte contre les préjugés raciaux, la position de la femme en un temps où elle n’a pas droit au chapitre. La voix de Meryl Streep, dont on retrouvera la même puissance incandescente quand elle est face à Clint Eastwood dans Sur la route de Madison, ouvre le film en répétant les mots qui ouvrent le roman de l’autrice danoise, La femme africaine, écrit en 1931 à son retour du Kenya : « J’avais une ferme en Afrique au pied des collines du Ngong… » Plus tard, elle dira : « Here I am, where I ought to be (me voici là où je devrais être). » Le rôle de Karen avait été écrit pour Greta Garbo. Puis Audrey Hepburn fut pressentie. Sydney Pollack trouvait Meryl Streep pas assez sexy. L’actrice est donc arrivée au casting avec un beau décolleté… Chef-d’œuvre. Et la magie opère toujours. Meryl Streep, comme les autres acteurs du film, donne une vibration particulière à l’écriture prégnante de Karen Blixen qui résume magnifiquement en un propos le sentiment amoureux quand elle évoque Denys, l’homme qu’elle aime : « Au cours de ces journées, au fil de ces heures, nous ne parlions de rien d’ordinaire, ni de mes ennuis à la ferme, ni de mes factures à payer, ni de ma maigre récolte, ni des problèmes qu’il avait lui dans son travail, ni de ce qu’il sentait arriver en Afrique, ni de quoi que ce soit qui fut étriqué, concret. Nous vivions comme détachés et au large du réel. » À Denys, l’amoureux, elle fait dire : « Que ce qui n’a pas de poids ne pèse pas. » Ce film, ce fut cinq mois de tournage. 70 % au Kenya avec près de 10.000 acteurs, pour la plupart des figurants issus des tribus maasaï et kikuyu, certains étant les descendants directs d’Africains ayant travaillé sur la plantation de café de Karen Blixen. L’homme qui joue le chef Kinyanjui est le petit-fils du vrai chef Kinyanjui. On savoure encore une réplique qui dit tout de la noblesse de cette romance : au mari de celle qu’il aime et qui lui fait remarquer qu’il aurait pu demander l’autorisation avant de devenir son amant, l’élégant Redford réplique : « Je l’ai fait et elle a dit oui. » Gentleman.

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