L’inflation grimpe en flèche en Belgique et ailleurs en Europe
Les patrons belges s’inquiètent des effets de l’indexation automatique des salaires. Les travailleurs de la CP 200 devraient bénéficier d’une augmentation de plus de 3,5 % le 1er janvier prochain. La Banque centrale européenne assure que le phénomène d’emballement des prix est transitoire.

L’inflation a augmenté de 4,16 % sur un an en octobre à 5,64 % en novembre, soit le niveau le plus élevé depuis juillet 2008 (5,90 %), a indiqué lundi dans un communiqué l’office des statistiques Statbel. La forte augmentation de l’inflation est due, comme ces derniers mois, à la forte hausse des prix de l’énergie. L’inflation de l’énergie s’élève actuellement à 46,4 % et contribue à hauteur de 3,92 points de pourcentage à l’inflation totale. L’inflation sous-jacente, qui ne tient pas compte de l’évolution des prix des produits énergétiques et des produits alimentaires non transformés, s’établissait à 2,14 % en novembre, contre 1,95 % en octobre.
En novembre, les principales hausses de prix ont concerné le gaz naturel, l’électricité, les carburants, les boissons alcoolisées, le gasoil de chauffage, les voyages à l’étranger et city-trips ainsi que les boissons non alcoolisées. Les fruits, les articles d’hygiène corporelle, les billets d’avion, les produits laitiers et les produits d’entretien ont, par contre, exercé un effet baissier sur l’indice.
La Fédération des entreprises de Belgique (FEB) a déjà demandé aux partenaires sociaux et au gouvernement de réfléchir d’urgence aux mesures possibles pour faire face à la hausse de l’inflation. Ce chiffre est « inquiétant », selon la FEB, qui a indiqué que les entreprises belges devront augmenter les salaires de 4,5 à 5 % en quelques mois, L’organisation demande « aux partenaires sociaux et au gouvernement de réfléchir d’urgence aux mesures possibles pour briser cette spirale infernale salaires prix et d’examiner quels mécanismes de correction intermédiaires peuvent être utilisés, comme le prévoit la loi de 1996 ».
Pas touche à l’index
Le syndicat socialiste ABVV (FGTB) prévient de son côté qu’en « aucun cas », il ne peut être touché à l’index. La porte-parole du syndicat socialiste Gina Heyrman a souligné que l’indexation assure seulement le maintien du pouvoir d’achat des travailleurs et travailleuses alors que les salaires horaires ont augmenté plus rapidement dans les pays voisins ces dernières années qu’en Belgique. Les syndicats descendront d’ailleurs dans les rues pour manifester le 6 décembre contre la loi sur la norme salariale. Ils réclament un ajustement en faveur des salariés alors que la norme salariale maximale a été fixée pour 2021-2022 à 0,4 %.
Selon les dernières estimations du secrétariat social SD Worx, l’indexation, au 1er janvier 2022, des salaires des employés de la CP 200, la commission paritaire la plus importante du pays, pourrait atteindre 3,56 %. Une telle indexation serait du jamais-vu depuis une bonne dizaine d’années. Pour la CP 200, la commission paritaire auxiliaire pour employés (ex-CP 218), qui concerne plus de 450.000 employés et plus de 50.000 employeurs de secteurs très divers en Belgique, l’indexation des salaires se fait une fois par an, au 1er janvier, sur base de l’inflation de l’année précédente. Le niveau de l’indexation qui sera appliqué au 1er janvier 2022 ne sera connu définitivement qu’une fois établis les chiffres d’inflation pour le mois de décembre, mais on a déjà une bonne idée de son ampleur, et, selon la dernière simulation de SD Worx, l’augmentation des salaires dans la CP 200 atteindrait donc 3,56 %. Il faut remonter à 2012 pour retrouver une indexation supérieure à 3 % (+ 3,17 %) et 2009 pour retrouver une augmentation encore plus forte (+ 4,51 %). En 2021 et 2020, l’indexation des salaires dans la CP 200 avait été inférieure au pour cent.
Lagarde imperturbable
La Belgique n’est évidemment pas la seule à connaître une envolée des prix. En Espagne, elle a atteint 5,6 % sur un an en novembre, soit son niveau le plus élevé depuis septembre 1992. Idem en Allemagne où la hausse des prix a culminé 5,2 %, là aussi son plus haut niveau depuis 1992.
Dans ces conditions peu banales la présidente de la Banque centrale européenne (BCE), la Française Christine Lagarde, continue pourtant de marteler qu’un durcissement monétaire serait la mauvaise réponse aux problèmes économiques. L’indice allemand des prix harmonisé, qui sert de référence au niveau européen, a lui affiché une hausse de 6 % sur un an, atomisant l’objectif de la BCE d’une inflation à 2 % dans la zone euro.
La BCE, comme d’autres banques centrales, fait ainsi face à un dilemme : comment contenir une inflation qui accélère sans étouffer une croissance atone ? Tandis que la banque fédérale américaine devrait entamer un cycle de hausse de ses taux durant l’année 2023, et la Banque d’Angleterre faire un premier pas probablement dès décembre, selon les observateurs, la banque centrale européenne tient, elle, à ne pas resserrer trop vite ses taux, jugeant que cela serait contre-productif pour l’économie.
« Si nous resserrions la politique monétaire maintenant, il n’y aurait pas un porte-conteneurs ni un chauffeur de camion de plus », a clamé Christine Lagarde dans un portrait que lui consacre lundi le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung (SZ). Durant le week-end, la Française avait assuré que la BCE voudra « intervenir quand ce sera nécessaire » dans une interview à la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Selon ses explications, l’économie souffre d’une « inflation largement tirée par les contraintes d’approvisionnement et les prix de l’énergie », autrement dit des domaines où la BCE est impuissante pour agir, ajoute-t-elle dans la SZ. Ces effets devraient du reste s’estomper l’an prochain, avec comme conséquence un nouveau ralentissement des prix.
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