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Maisons de repos: messieurs et mesdames les gouvernants, votre responsabilité est engagée!

Lettre ouverte aux politiques pour leur rappeler leur devoir d’intervention et d’action pour améliorer le fonctionnement des maisons de retraite.

Carte blanche - Temps de lecture: 6 min

La parution du livre Les Fossoyeurs a propulsé au-devant de la scène médiatique et politique le scandale de la maltraitance et de l’exploitation qui affectent le réseau commercial (mais pas seulement) des maisons de repos / maisons de repos et de soins.

Depuis, ô miracle, pas un jour sans que les « bonnes âmes » du monde politique et des médias ne crient haro sur le baudet Orpea.

C’est un peu facile !

Car cela fait des années que ces souffrances sont dénoncées, notamment par notre Gang des Vieux en Colère. Hélas, c’était crier dans le désert. Il n’est pire sourd que celui qui ne veut entendre, et cette surdité fut criminelle !

Maintenant que le scandale éclate enfin au grand jour, Mesdames et Messieurs les députés et ministres, vous courez les plateaux TV pour charger le bouc émissaire.

Mais qui a livré les Vieilles et les Vieux à la rapacité des financiers ? Qui a offert les maisons de repos au privé ? Qui a imposé aux établissements associatifs ou publics une gestion en flux tendu ? Qui s’est abstenu de soutenir activement les solutions alternatives aux maisons de repos ? Qui a définancé le secteur social ? Qui a dévalorisé les métiers de la gériatrie ? Qui a négligé de former des contingents de personnels compétents et empathiques ? Qui s’est délesté à bon compte de ses obligations d’enquête et de contrôle ? Qui a enterré les dossiers de plainte ? Qui a refusé d’instaurer des normes quantitatives et qualitatives garantissant le respect de la dignité des humains âgés ?

Vous, alors même que l’argent public contribue largement au financement des requins qui se repaissent de la misère des seniors.

Les maux dénoncés chez Orpea ne sont pas limités au secteur commercial, et la gangrène s’étend au secteur public et au secteur associatif. Pourquoi ? Parce que, pour vous, nos gouvernants, gestion lucrative, économies à tout prix, business plans sont devenus les maîtres mots ! À lire aussi Quatre maisons de repos du groupe Orpea déjà sous suivi depuis 2018

Plusieurs exigences

1. Déprivatiser l’hébergement des aînés et le confier aux collectivités locales, tout en refinançant le secteur des soins de santé et le soutien aux aînés. Ce financement doit servir à améliorer les conditions de vie des Vieilles et des Vieux, pas à enrichir les actionnaires !

2. L’amélioration des conditions de travail et de formation des personnels.

Nous dénonçons le manque de personnel, et particulièrement de personnel qualifié, les bas salaires, les horaires coupés, la répétition des contrats à durée déterminée, le recours aux stagiaires, l’insuffisance de la formation. Avec comme conséquences des métiers peu attractifs et les difficultés de recrutement.

Les mauvaises conditions de travail sécrètent la maltraitance !

La formation est essentielle. Il faut éduquer, former, encadrer, sur ce qu’est la maltraitance et sur ce que requièrent le bien-être et le respect de la dignité des personnes en situation de dépendance.

Il faut que les personnels de tous niveaux, les pensionnaires et leurs proches soient associés à la gestion des établissements.

Vous, les politiques, qui financez les maisons de repos et qui êtes en charge des échelles de traitement, de la réglementation des conditions de travail, de la formation professionnelle, vous en êtes responsables !

3. Assurer un contrôle sérieux et inopiné des maisons de repos !

Assumez vos responsabilités !

Comment est-il possible qu’il ait fallu attendre dix ans pour que soit enfin fermée à Tournai une maison de repos où la maltraitance, la torture, étaient de notoriété publique, de l’aveu même des autorités communales ? Comment est-il possible qu’à Grammont, on ait envoyé pompiers et policiers pour évacuer d’urgence une maison de repos qui depuis des mois ne jouissait plus de l’habilitation ? À lire aussi «Le covid a privé les maisons de repos du contrôle social exercé par les familles»

Mesdames et Messieurs les Bourgmestres, vous disposez du droit de visite inopinée dans les maisons de repos de votre commune. Combien de fois l’avez-vous exercé ?

Mesdames et Messieurs les Députés, certains de vos collègues français réclament un droit de visite dans les maisons de repos, comme dans les prisons. Cela dit tout ! Et vous, qu’allez-vous faire ?

Nous exigeons que les maisons de repos soient contrôlées sérieusement, que ces contrôles soient répétés et inopinés, et qu’ils soient effectués de nuit comme de jour.

Qu’est-ce que l’administration contrôle, en fait ? Les normes bureaucratiques ? La distance entre le lit et la fenêtre ? Le nombre de salles de bains ? Ou la réalité du vécu des résidents ? Le temps et l’attention réellement accordés à chacun ? Le temps réellement mis à répondre aux appels ? L’écoute réelle et la patience réelle dans les réponses ? Les contrôles doivent porter avant tout sur le qualitatif.

Mesdames et Messieurs les ministres, nous exigeons la transparence ! Que vous affichiez sur le site de vos ministères respectifs quels contrôles ont été opérés, selon quels critères et quelles modalités, quelles ont été les constatations, et quelle suite leur a été donnée. Avec le nom des institutions, les dates, les heures.

4. La constitution d’une commission d’enquête.

Une commission d’enquête sur les maisons de repos et les maisons de repos et de soins, et la création d’une fonction de Délégué général aux droits des seniors, comme il existe celle de Délégué général aux droits de l’enfant, avec des prérogatives semblables, la garantie d’une parfaite indépendance et les moyens de fonctionner.

5. Liberté d’aller et venir.

Que les résidents des maisons de repos gardent la liberté d’aller et venir, ainsi que celle de recevoir à tout moment les personnes de leur choix, et que leur entourage garde le droit de rendre visite à leur proche, afin que ne soient pas brisés les liens affectifs indispensables au bonheur de chacun.

Mesdames et Messieurs nos gouvernants, le scandale Orpea vient s’ajouter à tous les scandales concernant la façon dont sont traités les personnes âgées et les seniors dépendants, dont c’est pourtant votre responsabilité d’assurer le bien-être et la dignité ! À lire aussi Maisons de repos Orpea: «Durant les 34 mois de son séjour, maman n’a jamais pris une douche»

Inadmissible votre surdité depuis des années sur le sous-financement, l’exploitation, les maltraitances dans les maisons de repos !

Inadmissible l’abandon massif dans lequel vous avez laissé le personnel et les résidents des maisons de repos durant toute la première phase de la pandémie !

Inadmissible votre offensive contre les pensions et l’âge de la retraite !

Inadmissibles les brimades et les atteintes à la liberté et à la dignité des personnes bénéficiant de la Grapa (garantie de revenu aux personnes âgées) !

Les Vieilles et les Vieux ne se laissent plus faire !

Le Gang des Vieux en Colère est là pour les y aider !

 

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3 Commentaires

  • Posté par Desormeaux Michèle, samedi 19 février 2022, 11:17

    S'il est utile de s’appesantir sur le comment on n est arrivé là, il me semble urgent de voir comment aujourd'hui, on peut changer les choses et rejoindre le "Gang des Vieux en colère" que nous serons nombreux à rejoindre car le temps passe vite et que nous serons tous vieux un jour. Prenons soin de nos ainés comme nous souhaiterions qu'on prenne soin de nous le temps voulu. Fille d'une adorable dame de 84 ans, désorientée, j'ai connu et connais encore le parcours du combattant pour assurer une vie digne et heureuse, en pleine bienveillance, à ma mère. Je pense que la voix des familles des résidents en maisons de repos n'est jamais écoutée, ni par les instances publiques, ni, le plus souvent, par les directions de repos et que cela doit changer. Une enquête auprès des proches investis devrait être systématique lors des enquêtes. Car la souffrance journalière dépasse la frontière des maisons de repos, de leurs résidents et du personnel soignant et touche aussi bien des familles qui se débattent pour protéger leur être cher, avec un sentiment d'impuissance et d'injustice. Oui à une obligation de vraie transparence, et pourquoi pas, une association des familles dans la gestion de ces lieux. D'autant plus quand les résidents ne sont plus capables de se plaindre, ou tout simplement, n'osent pas. L'omerta est très souvent de mise. Il faut se taire ou cacher ... Les familles sont perçues comme des empêcheurs de tourner en rond. Il faut changer cette mentalité, et œuvrer dans un esprit de collaboration. Enfin, à tous ceux qui ne comprennent pas qu'on puisse en arriver à la solution de la maison de repos, de "placer son parent", qu'ils ne jugent pas trop vite avant d'être confrontés directement aux problèmes qui mènent à ce choix déchirant.

  • Posté par collin liliane, vendredi 18 février 2022, 12:04

    Une autre exigence bien plus pressante à adresser à nos gouvernants: permettre une euthanasie volontaire à ceux qui ne désirent à aucun prix se rendre dans ce genre d'établissement.

  • Posté par J.-M. Tameyre, vendredi 18 février 2022, 10:42

    Autrefois, on vivait à 3 ou 4 générations sous le même toit. Les vieux participaient, d'une façon ou d'une autre aux activités de la maison, qui était assez grande pour tout le monde. Qui a renoncé à cette vie en communauté ? Qui a rasé ou scindé ces maisons en appartements ? Qui encaisse les loyers indécents de ces studios pour voyager en croisière ou s'acheter des 4×4 que vous ne savez pas conduire ? Vous, les vieux. Quant aux fameux "actionnaires" des maisons de retraite, ce sont souvent des fonds de retraite qui assureront les pensions de vos enfants. Et vous-mêmes si vous avez un portefeuille mobilier. Le plus infect dans cette carte blanche c'est qu'après avoir fait éclater les familles, mis les femmes au travail et être parti en retraite à 55 ou 60 ans, vous voulez imposer la double peine à vos enfants et petits-enfants. C'est vous qui hier avez construit le monde d'aujourd'hui !

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