Ickx Grand Marshal à Sebring

Le championnat du monde d’Endurance (WEC) va s’offrir un début de saison hors-normes, cette semaine en Floride, à l’occasion du SuperSebring qui accueillera vendredi la manche inaugurale du WEC intitulée « 1000 Miles de Sebring », et le lendemain, la deuxième manche du championnat IMSA, toujours assortie de sa dénomination légendaire : les « 12 Heures de Sebring », au départ desquelles on retrouvera cette année Stoffel Vandoorne sur un Acura du Meyer Shank Racing, ainsi que Maxime Martin (Aston Martin) et Jan Heylen (Porsche) en GT. Cinq pilotes belges ont triomphé dans cette épreuve mythique qui fêtera son 70e anniversaire : Olivier Gendebien (en 1959-60-61), Lucien Bianchi (1962), Eric van de Poele (1995-96), Didier Theys (1998) et Jacky Ickx (1969-72). Pour l’occasion, celui-ci sera intronisé « Grand Marshal » de l’épreuve, et fera son entrée au « Hall of Fame » (le Temple de la renommée), un demi-siècle après avoir triomphé pour la deuxième fois en Floride, avec Mario Andretti au volant d’une Ferrari 312PB, 3 ans après avoir fait de même au volant d’une Ford GT40 qu’il partageait avec Jackie Oliver… quelques semaines avant le premier de ses six succès aux 24 Heures du Mans sur la même voiture, et avec le même équipier. « One of the greatest » « Je trouve miraculeux d’avoir gardé le même statut aux Etats-Unis qu’au Mans », philosophe Jacky Ickx (77 ans). « Outre-Atlantique, on me présente comme ‘one of the greatest’, et cette formule me convient bien, car j’avoue que ça manque sans doute un peu d’humilité, mais en Belgique, on me présente généralement comme ‘le meilleur Belge’, ce qui est quand même un peu restrictif et laisse entendre que j’aurais passé ma vie en Belgique, ce qui n’a pas vraiment été le cas… » Le palmarès du Bruxellois, notamment ponctué de deux titres de vice-champion du monde de F1, de 8 victoires en Grand Prix, ou encore de 47 victoires et de deux couronnes mondiales en Endurance, ainsi que d’une victoire au Dakar et d’un sacre en Can-Am témoigne cependant d’un éclectisme hors du commun. Qui sera mis en évidence cette semaine en Floride… « Bien sûr, la seule inquiétude qu’on peut avoir quand on commence à être honoré et décoré de la sorte, c’est que ça sent la fin », dit avec malice le toujours fringant Jacky Ickx. « Mais je ne vais pas me plaindre du tout, car comme je l’ai déjà dit, le plus extraordinaire pour moi est d’être toujours vivant après avoir traversé une époque où le sport automobile a fait tant de victimes. » Une époque, aussi, où tout était permis, ou presque, y compris rouler pour deux constructeurs aussi puissants que Ferrari (en F1) et Ford (en Endurance) la même année (1968), ou, mieux encore, de se permettre de fausser compagnie à la Scuderia après une saison à peine ! « C’était l’époque où il y avait des mécènes et que je ne calculais pas trop pour un championnat – je ne l’ai d’ailleurs jamais fait ! –, tout ce qui comptait, c’était de gagner des courses », insiste notre homme qui, à l’aube de sa carrière, n’hésitait pas, déjà, à poser des gestes forts… « C’est comme ça, et pour ça, que j’ai quitté Ferrari en 1969 (avant d’y retourner en 1970). D’abord, j’avais senti que sa F1 n’était pas une réussite cette année-là, et puis surtout, l’équipe n’avait pas de programme d’Endurance ! Or, à l’époque, les 1000 KM ou les 24 Heures étaient plus suivis que les Grands Prix ! Et je ne voulais pas quitter cette discipline… » Ode à Mario Andretti Un chassé-croisé Ford-Ferrari en marge duquel il triompha avec les deux marques à Sebring (notamment) à 3 ans d’intervalle. Et à écouter le champion, on comprend que le deuxième succès glané avec le prestigieux Andretti a gardé une plus grande place dans le cœur du Bruxellois que celui conquis 3 ans plus tôt avec le laborieux Oliver… « Jackie, c’est à la faveur de certaines circonstances que l’on a fait quelques courses ensemble. Mais mathématiquement parlant, il n’a pas fait grand-chose ! », tranche-t-il au sujet du Britannique au palmarès peu étoffé (deux podiums en GP) avec lequel il était nettement moins en phase qu’avec le prestigieux Américain, en compagnie duquel il allait encore remporter les 6 Heures de Daytona la même année. « Midjets, Nascar, dirt-track, dragsters, IndyCar, F1, Le Mans : il suffit de parcourir le palmarès de Mario pour réaliser combien nous avions la même philosophie de course et le même éclectisme. Andretti : sans doute un de ceux auxquels je ressemble le plus. »

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