Ash Barty, numéro 1 mondiale de sa destinée

Pendant que le tennis mondial se prépare doucement à fêter les fins de carrière d’icônes comme Roger Federer ou les sœurs Williams, qui ont tous les trois franchi le cap de la quarantaine, voire même l’arrêt d’une Clijsters dont le « Kimback » désespéré, à bientôt 39 ans, n’a plus beaucoup de sens, il a été cueilli à froid par l’annonce ce mercredi matin (en Europe) de la retraite d’Ash Barty, la nº1 mondiale, à seulement 25 ans (elle en aura 26, dans exactement un mois). [scald=28965350:sdl_editor_representation] Dans une vidéo-confidence qu’elle partage d’abord avec Casey Dellacqua, sa toute grande amie, et ancienne partenaire de double, la dernière lauréate de l’Open d’Australie (son 3e titre du Grand Chelem après Roland-Garros 2019 et Wimbledon 2021) a livré les raisons de cette annonce-choc. « Je vais me retirer du tennis. C’est la première fois que je le dis tout haut, et c’est difficile à dire. Mais je suis très heureuse et je suis tellement prête. Je sais juste en ce moment du fond de mon cœur, pour moi en tant que personne, que c’est la bonne chose à faire. Le succès pour moi c’est savoir que j’ai tout donné, tout ce que je pouvais. Je suis à la fois totalement épuisée et comblée. Je suis heureuse, et je sais combien de travail il faut pour donner le meilleur de soi-même. C’est juste que je n’ai plus ça en moi. Je n’ai plus l’énergie physique, la volonté émotionnelle et tout ce qu’il faut pour se dépasser au plus haut niveau. » « La manière parfaite de partir » Ce n’est pas la première fois que la championne australienne nous invite à une « surprise Barty ». Après l’US Open 2014 et alors qu’elle n’avait que 18 ans (!), elle s’était retirée du tennis pendant presque deux ans pour aller tenter sa chance dans un autre sport, très australien : le cricket. Et c’est avec succès qu’elle avait rejoint, batte à la main, les « Brisbane Heat » sur le circuit professionnel. Déjà, Ash Barty avait senti le besoin de s’écarter d’un monde du tennis très prenant pour une jeune ado (elle avait remporté Wimbledon 2011 chez les juniores, à 15 ans). Surtout pour une jeune Australienne attachée à ses racines et à sa famille comme elle. Il faut une seconde se mettre à la place de tous ces joueurs et joueuses des Antipodes qui doivent se consacrer à un circuit qui, à partir du mois de février, se dispute à mille lieues de leurs attaches, sans vraiment de retours possibles. Ash Barty vivait très mal ces longs moments d’exil que n’importe quelle technologie virtuelle ne pourra jamais parer. Et quelque part, en remportant les deux derniers Grands Chelems qui titillaient son instinct de championne (Wimbledon 2021, son rêve, et l’Open d’Australie 2022, mettant fin à 44 ans de diète pour le tennis féminin australien), elle s’est offert une porte de sortie idéale. « Pouvoir gagner Wimbledon était mon rêve, mon seul vrai rêve dans le tennis », reprend-elle. « Cela a vraiment changé ma perspective. J’ai eu cette intuition (NDLR : quitter le tennis) après Wimbledon et j’en ai beaucoup parlé à mon équipe… Il y avait juste une petite partie de moi qui n’était pas tout à fait satisfaite. Et puis est venu le défi de l’Open d’Australie et je pense que, pour moi, c’est la manière la plus parfaite de partir… » Très sensible Et l’image d’Evonne Goolagong Cawley, vraie source d’inspiration et de vie de la championne australienne, lui remettant le trophée, en janvier dernier, restera comme le symbole d’un vrai passage de témoin et la photographie d’une dernière énorme émotion sportive. Sous des airs parfois de fonceuse, accentués par un phrasé rapide et local, Ash Barty est une jeune fille d’Ipswich (près de Brisbane dans le Queensland) très sensible. Cette décision a eu le temps de grandir en elle depuis Wimbledon, comme elle le dit. Elle hésitait encore après l’Open d’Australie. Début mars, elle s’est connectée à ce qu’elle a de plus cher, cette terre australienne qui la relie à ses ancêtres. Elle s’est rendue au centre du pays pour y visiter le site sacré de Uluru (Ayers Rock) où la roche rouge tellement imposante semble avoir arrêté le temps. Elle y a posé la main et écouté son cœur, sa destinée. Elle d’abord annoncé ses forfaits pour les tournois d’Indian Wells et de Miami (elle était tenante du titre). Elle aurait dû rejouer à la mi-avril pour son pays, c’était cohérent, contre la Slovaquie en Billie Jean King Cup. L’annulation de cette rencontre (l’Australie remplaçant la Russie, en conflit avec l’Ukraine) était le dernier signe qu’il lui fallait pour tourner la page. Fiancée depuis novembre De manière définitive ? Le passé lié aux différentes retraites sportives ou plutôt aux come-backs les plus étonnants, ne nous permettra pas de l’affirmer. Mais pour l’instant, c’est sa décision. Une décision saluée par l’entièreté de la communauté sportive, et même par le monde politique australien qui voit partir une « vraie ambassadrice du pays ». Une future Madame Kissick ? Cela fait effectivement partie de son plan de vie à venir, elle qui s’est fiancée, le 23 novembre dernier, à Garry Kissick (30 ans), un golfeur professionnel de sa région du Queensland. La vie de famille plutôt que la vie tennistique, le choix semble tellement clair. Avec 15 titres au palmarès (et tout de même 119 semaines sur le trône mondial), Ash Barty n’a jamais visé la quantité, mais plutôt la qualité (trois sacres en Grand Chelem et le Masters en 2019). La qualité, c’était la marque de fabrique d’un tennis intelligent, varié, avec son étourdissant éventail de slices, de services précis et un coup droit sans faille. Petite (1,66 m), mais costaude par le talent, elle n’était pas sans rappeler, dans sa couverture du terrain, une certaine Justine Henin qui, malade et clouée au lit, a préféré réagir via les réseaux sociaux : « Chère Ash, je suis bouleversée d’apprendre que tu quittes le tennis. Tu fais partie des toutes grandes championnes. J’ai été très impressionnée de te voir triompher à domicile, une vraie performance qui a démontré ta force physique et mentale. J’ai toujours adoré te regarder jouer. Ton attitude et ton implication dans notre sport ont toujours été impeccables et une source d’inspiration pour tous. Merci pour tout et bonne chance avec tous tes nouveaux projets. » Justine Henin est partie à la retraite, aussi en numéro 1 mondiale, en mai 2008, alors qu’elle n’avait aussi que 25 ans, et bientôt 26…

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