Scottie Pippen: «Avec Michael Jordan, nous étions de simples collègues de travail»

Six titres de champion NBA, sept fois All Star, membre de la Dream Team 1992… Scottie Pippen est une authentique légende du basket américain. Passé par Chicago (1987-1998), où il a écrit les plus belles lignes de son histoire aux côtés d’un certain Michael Jordan, puis par Houston (1999-2000) et Portland (2000-2003), avant une dernière pige chez les Bulls afin de boucler la boucle (2003-2004), le natif de la petite ville de Hamburg (Arkansas) n’a pas grandi avec une cuillère en argent dans la bouche, tant s’en faut. Un parcours semé d’embûches qui a forgé le caractère de l’ancienne star de 56 ans, qui se livre dans une autobiographie, Libéré (Hugo Sport). Un ouvrage dans lequel il raconte son histoire. L’occasion de mettre les choses au clair après la diffusion du documentaire The Last Dance sur ESPN, en 2020, qu’il considère trop centré sur Michael Jordan et pas assez sur la mythique équipe de Chicago. De ses relations avec « MJ » à l’émergence des joueurs internationaux en NBA, en passant par son enfance ou ses regrets, Scottie Pippen s’est confié au Figaro. [scald=29076155:sdl_editor_representation] [scald=29076303:sdl_editor_representation] Pourquoi avoir choisi de vous raconter dans un livre ? Je suis heureux de l’avoir fait. J’y pensais depuis longtemps et je l’aurais fait même sans la diffusion du documentaire. J’avais le sentiment d’avoir une histoire à raconter aux fans, à ceux qui ont suivi les Bulls à l’époque, et l’envie de montrer une autre facette de moi-même, la façon dont j’ai grandi. Vous racontez qu’avoir onze frères et sœurs vous a appris à faire partie d’une équipe. Clairement, le fait d’avoir grandi au sein d’une grande famille m’a appris énormément pour partager, donner. Ça permet d’avoir l’esprit formé à cette notion de générosité, vous voulez passer la balle à votre frère. On a aussi beaucoup joué au basket avec mes frères et j’ai grandi avec ces valeurs, sur et en dehors des terrains. Ça a contribué à façonner le joueur que j’ai été par la suite, ça ne fait aucun doute. J’ai vite compris qu’il faudrait que je sois plus fort, qu’il serait nécessaire d’en faire encore plus, d’être physiquement préparé et costaud mentalement. J’ai assimilé tout cela dès le lycée, et j’ai mis ces ingrédients à l’université et en NBA. Quel était votre sentiment après la diffusion de « The Last Dance » ? J’étais déçu, pour un certain nombre de raisons, de la façon dont ça a été fait. [scald=29076302:sdl_editor_representation] Contrairement à ce que l’on pourrait penser après vous avoir vu gagner six titres ensemble, on apprend dans le livre que vous n’avez jamais été si proche que cela de Michael Jordan… On était de simples collègues de travail. On faisait notre travail ensemble et, ensuite, on avait chacun notre vie. Je peux comprendre que les gens imaginent qu’on avait tissé des liens personnels forts après nos années à Chicago, mais ça n’a jamais été le cas. Etiez-vous aussi amer de voir toute la lumière mise sur Michael Jordan à l’époque où vous jouiez ensemble que lors de la diffusion de « The Last Dance » ? Je ne dirais pas que j’étais amer, mais je pense que c’est ce qui a cassé notre premier triplé, avec le départ d’Horace Grant, le fait que tout le monde essaie d’individualiser le basket-ball. Horace en avait marre aussi (Grant a quitté les Bulls en 1994, NDLR). Au final, c’était surtout ce qui a marqué la fin de toute notre équipe. Vous avez déclaré vous considérer comme un aussi grand joueur que Michael Jordan… Pas besoin d’apporter d’éclaircissement. J’ai dit ce que j’ai dit et mon parcours parle pour moi. Vous parlez de la période sans Michael Jordan à Chicago, entre sa première retraite à la fin de la saison 1992-1993 et son retour au cours de la campagne 1994-1995, comme la plus amusante… C’était agréable. C’était la première fois que je jouais en NBA sans Michael. C’était différent, une vraie coupure en ce qui concerne le contexte autour de l’équipe et entre nous. C’était moi et les autres joueurs, les regarder apprendre l’attaque en triangle… On a fait une grande saison en 1993-1994. Mais, finalement, on n’a fait qu’une campagne de playoff sans Michael. On voulait montrer qu’on pouvait le faire sans lui. [scald=29076301:sdl_editor_representation] Vous étiez notamment connu pour vos qualités de défenseur. Quel regard portez-vous sur le Français Rudy Gobert, considéré comme l’un des meilleurs défenseurs de la NBA aujourd’hui ? C’est un grand joueur et un grand joueur d’équipe. Il joue le jeu de la bonne manière. Il faut le respecter pour ses capacités à être bon à ce qu’il fait : c’est un excellent contreur, rebondeur, défenseur et coéquipier. Les critiques ? Ça fait partie du jeu, surtout pour un joueur comme lui qui n’est pas assez en vue offensivement pour s’en préserver. Il aura toujours ce genre de commentaires. Mais il a été élu meilleur défenseur de l’année trois fois. Il a donc fait la démonstration de ses qualités et il peut regarder n’importe qui dans les yeux. Quel regard portez-vous sur l’évolution des joueurs internationaux, bien plus présents et performants au sein de la NBA qu’à votre époque ? Ils prennent le contrôle ! A mon époque – l’époque de Jordan, disons –, et je ne veux pas que ce soit pris de la mauvaise façon, il n’y avait pas de joueur blanc qu’on pouvait citer parmi les candidats potentiels au titre de MVP (meilleur joueur, NDLR). Même si on a joué ensemble au sein de la Dream Team, Larry Bird avait connu ses meilleures années avant cela. Depuis la fin de ma carrière, j’ai vu tous ces joueurs internationaux débarquer. Steve Nash, Dirk Nowitzki ou encore Nikola Jokic l’ont gagné… Au-delà des joueurs blancs ou noirs, les joueurs internationaux mettent désormais le grappin sur les titres de MVP et sur d’autres récompenses individuelles. Luka Doncic est aussi dans cette catégorie maintenant. Cela montre que le jeu a tellement grandi au fil des années que les joueurs internationaux en ont pris le contrôle. Avez-vous des regrets quand vous repensez à votre carrière ? J’aurais aimé remporter un titre avec Portland. J’aurais pu faire mieux là-bas. Mais je commençais à sentir un peu plus mon âge et, surtout, les blessures…

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