Philippines: le retour en force des Marcos

Il ne l’est pas encore mais pourrait bien l’être dans quelques jours ou semaines, quand le Congrès avalisera le résultat officiellement… En attendant, Ferdinand Marcos Jr, fils et homonyme du défunt dictateur et de sa femme Imelda, semble avoir remporté l’élection présidentielle aux Philippines. [scald=29092142:sdl_editor_representation] Selon des résultats préliminaires diffusés mardi et portant sur plus de 90 % des bureaux de vote, il aurait obtenu plus de 56 % des suffrages ; soit plus du double que sa principale rivale, la vice-présidente sortante Leni Robredo. Mais d’après plusieurs ONG, des milliers de citoyens n’ont pas pu voter en raison du dysfonctionnement de certaines machines enregistrant les votes. Dans certaines circonscriptions, les électeurs sont restés toute la nuit à l’extérieur des bureaux de vote, souvent en vain, en attendant que les machines soient réparées ou remplacées. La Commission électorale a ignoré les appels à prolonger l’élection et a souligné que le nombre de machines défectueuses était faible. La victoire du fils Marcos laisse un goût amer à des millions de Philippins qui espéraient tourner la page de six années de présidence Duterte, marquées par des violences et l’autoritarisme. « Bongbong » Après plusieurs décennies consacrées à redorer l’image de sa famille, Ferdinand « Bongbong » Marcos Jr, parachève le retour en grâce du clan. Sur les réseaux sociaux, il s’est employé à dépeindre les deux décennies de dictature de son père (1965-1986) comme une période de « paix » et de « prospérité » et n’a jamais renié les pratiques paternelles. [scald=29089719:sdl_editor_representation] Si son élection est confirmée, elle permettra aux Marcos d’emménager à nouveau dans le palais présidentiel 36 ans après le soulèvement populaire qui avait conduit au renversement de la dictature de son père et à l’exil de la famille aux Etats-Unis. En 2016, « Bongbong » avait perdu de peu la vice-présidence face à Leni Robredo. A 64 ans, il va succéder à l’autoritaire président sortant Rodrigo Duterte. La fille aînée de ce dernier, Sara Duterte, le soutient et semble bien placée pour devenir sa vice-présidente. Désinformation à grande échelle Enfant, Marcos Junior voulait devenir astronaute. Il a finalement suivi le même destin que son père et s’est lancé en politique. Il était en pension dans une école catholique en Angleterre lorsque son père décrète la loi martiale en 1972. On estime que 70.000 opposants politiques ont été tués, violés, mutilés ou détenus arbitrairement sous la dictature. [scald=29089721:sdl_editor_representation] Ferdinand Marcos Jr défend aujourd’hui le régime de son père dont il loue le « génie politique », occultant la corruption et la mauvaise gestion qui ont ensuite appauvri la nation. Après la mort du dictateur déchu à Hawaï (Etats-Unis) en 1989, les Marcos sont rentrés au pays, exploitant les allégeances locales pour se faire élire à une série de postes élevés. Marcos Jr a notamment été vice-gouverneur à deux reprises de la province d’Ilocos Norte, le fief familial. Il a également été élu au parlement et au Sénat. Durant la campagne électorale, il a tiré profit des réseaux sociaux pour mener une vaste campagne de désinformation à destination des jeunes, qui n’ont connu ni l’oppression, ni la corruption à grande échelle qui ont marqué les vingt années de règne de son père. Où sont passés les fonds pillés ? Le retour sur la scène politique des Marcos a bénéficié des accusations de corruption qui ont visé les gouvernements ayant suivi les années de dictature, et de la colère causée par l’inégale répartition des richesses. Evitant de répéter ses erreurs de la campagne de 2016, qui l’avait vu assailli de questions sur le passé de sa famille, Marcos Jr a boudé les débats et n’a accordé que de rares interviews, dans lesquelles il est apparu assez mal à l’aise. [scald=29089720:sdl_editor_representation] Ses opposants ont tenté de le faire disqualifier de la course à la présidence, invoquant une condamnation antérieure pour défaut de déclaration de revenus, l’accusant d’avoir menti sur ses diplômes et d’avoir près de 4 milliards de dollars de droits de succession impayés. Autre inquiétude de taille : que va devenir l’enquête sur les fonds volés par le clan Marcos ? La Commission présidentielle sur la bonne gouvernance créée après la destitution de son père et l’exil de sa famille en 1986 pour enquêter et retrouver les fonds pillés, se retrouve de facto sous sa tutelle. A ce jour, cette Commission est toujours engagée dans 87 procès aux Philippines, deux aux États-Unis et en Suisse concernant des actifs d’une valeur de plus de 2 milliards de dollars. De nombreuses autres œuvres parmi les plus de 300 tableaux de maîtres achetés par les Marcos sont toujours manquantes.

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