Tendance: les piercings se portent désormais «à la vie, à la mort»

Le champion de Formule 1 Lewis Hamilton adore les bijoux. Il en a des tas : des montres, des colliers, des bracelets, des boucles d’oreilles, mais aussi plusieurs piercings. Ceux-ci, précisément, ont fait l’actualité ces derniers jours, le pilote annonçant sa ferme intention de se battre contre les dispositions de la Fédération internationale automobile (FIA) pour continuer à pouvoir les porter en course. Tout cela ne serait qu’une anecdote sans beaucoup d’importance si elle ne soulignait une tendance. Celle qui veut que les piercings soient devenus des objets « inséparables » des peaux ou des corps qu’ils ont percés. Et ce, dans le sens le plus fort qui soit. C’est-à-dire qu’ils ne s’enlèvent pas pour quelques heures, sous certaines circonstances, ou pour le reste d’une vie une fois qu’ils sont apparus sur la peau. « C’est vrai que celles et ceux qui en portent aujourd’hui ont davantage tendance à vieillir avec eux », affirme Chris Paulis, docteur en anthropologie (ULiège). « Il y a différentes raisons à cela. Mais pour moi, la principale, c’est le fait qu’aujourd’hui, les piercings sont beaucoup plus acceptés dans le monde professionnel. Il y a trente ans, si l’on se donne la peine de s’en souvenir, ce n’était pas le cas. Avoir un piercing était jugé vulgaire et était associé au fait d’avoir mauvais genre. » « Comme acheter des chaussures » De la boutique qu’il tient dans le Brabant wallon, Bruno Menei, président d’une ASBL qui groupe tatoueurs et perceurs, a constaté la même évolution. « A l’origine, les piercings ont longtemps représenté une pratique marginale. Ils ont évolué ensuite vers une pratique courante. Aujourd’hui, pour autant, je ne dirais pas que les piercings sont à la mode : ils sont surtout tellement entrés dans les habitudes. Se faire percer, c’est, de nos jours, comme acheter une paire de chaussures, en quelque sorte. » Vraisemblablement, le fait de vouloir vieillir avec un piercing peut être lié également à un fort attachement pour ce que cet ajout à la surface de la peau a pu représenter à l’adolescence : une « interface entre le dedans et le dehors » du corps, entre l’intérieur et l’extérieur, et par conséquent, une puissante « instance » de communication avec le « monde » et une façon de marquer son identité sur une peau que, par la même occasion, on s’approprie une première fois, comme a pu notamment l’analyser le sociologue français David Le Breton. « Poser une identité » « Le bijou ou la boucle que l’on va y mettre est une façon de poser une identité et de pouvoir la renouveler régulièrement », confirme Chris Paulis. « Je crois que dans le fait de vouloir vieillir avec un piercing, cette possibilité de variation que l’on se donne joue aussi. » D’autant plus, selon l’anthropologue, que de nouveaux produits se sont imposé : « Comme les écarteurs, qui n’existaient que de façon marginale il y a trente ans et qui, aujourd’hui, sont relativement courants. » Tout cela fait dire à Chris Paulis, dans une ultime explication, que les piercings pour celles et ceux qui en portent ne sont pas une « extension » de leurs corps. Mais carrément une partie de celui-ci. Et qui aurait envie, au fond, de se séparer d’un bout de soi pour quelques heures – le temps d’un Grand Prix de Formule 1, éventuellement – ou pour le restant de ses jours ?

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