«Oussekine», leur fils, leur bataille

La nuit du 5 au 6 décembre 1986, le jeune Malik Oussekine est tué dans le hall d’un immeuble parisien par des policiers motorisés qui l’ont pris en chasse, le prenant pour un casseur. Le lendemain, sa mort est annoncée sur toutes les radios. Le contexte est explosif : les manifestations estudiantines contre le projet de loi Devaquet – un projet de réforme universitaire – mettent le feu à la capitale française, que la police essaie d’étouffer en réprimant durement les contestataires. La droite, qui vient d’arriver au pouvoir, redoute un nouveau mai 68. Robert Pandraud, ministre délégué à la Sécurité, a redéployé les voltigeurs, ces flics à motos chargés de remettre de l’ordre dans les rues, équipés de matraques. C’est deux d’entre eux qui, croisant la route de Malik Oussekine, le tabassent à mort. Le jeune Franco-Algérien, cadet d’une fratrie de cinq enfants, rentrait d’un concert de jazz et n’avait pas pris part aux manifestations… Dans les jours qui suivent la tragédie, la police et sa hiérarchie nient toute responsabilité dans l’affaire. L’enquête de l’IGS permettra pourtant de démontrer la culpabilité des policiers pour, trois ans plus tard, aboutir à un procès pendant lequel ils écoperont de peines légères. Créée par Antoine Chevrollier (réalisateur de plusieurs épisodes du Bureau des légendes, notamment), la minisérie en quatre épisodes replonge dans cette page d’histoire de la France. Sans faire le portrait d’Oussekine, mais en épousant le point de vue de la famille de la victime. Le garçon est décrit, dans les premières minutes, comme un étudiant passionné, qui souriait à la vie et à qui la vie devait sourire. Loin de l’image que la policie tentera d’échafauder de lui, cherchant à le dépeindre comme un terroriste proche d’un groupe chrétien du Liban. C’est le premier contre-feu allumé, avant qu’elle ne prétexte des soucis de santé d’Oussekine – une insuffisance rénale – comme cause réelle de sa mort. Ce qui fera dire, peu de temps après à Pandraud, à qui un Olivier Gourmet bourru prête ses traits, « si j’avais un fils sous dialyse, je l’empêcherais d’aller faire le con à Paris la nuit ». Avec un casting costaud (Kad Merah en avocat de la partie civile Georges Klejman, Hiam Abbass, la mère de Malik), la série reconstitue le combat mené par la famille pour faire éclater la vérité, et l’instrumentalisation de la mort de Malik : par les étudiants qui en font l’icône de leur lutte, mais aussi par Mitterrand, qui rendit pompeusement visite à la mère du garçon et à ses frères et sœurs. Pour raconter au plus juste ces événements, les scénaristes ont eu accès à au dossier d’instruction de l’affaire et se sont appuyés sur quantité d’archives des journaux de l’époque, en plus de nombreuses rencontres avec la famille Oussekine, qui, 36 ans après, cherche encore à laver son honneur. Et, au passage, à réparer cet « oubli » qui veut que l’affaire ne figure dans aucun livre d’Histoire ni dans aucune fiction… Oussekine ***, sur Disney +, 4 épisodes.

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