Tour de France: Jasper Philipsen n’est plus le corniaud du Tour

L’éloge de la patience est une vertu considérable, surtout dans l’apprentissage. A cet égard, Jasper Philipsen, à peine 24 ans pourrait donner des leçons de courage et d’obstination à ses jeunes collègues. Persévérer, toujours y croire n’est pas qu’une devise dans l’esprit de ce coureur obligé de se coltiner les deux « monstres » du cyclo-cross, l’un dans sa propre équipe, Mathieu van der Poel, l’autre dans son pays et par surcroît sa ville, Anvers, Wout van Aert. Etre l’outsider de luxe, à un moment donné, cela gave. Cela fait même perdre la tête, comme à Calais, où le jeune sprinter d’Alpecin laissa éclater sa joie en réglant le sprint du peloton au moment où, sur sa gauche, il vit Christophe Laporte lui indiquer que Wout van Aert faisait la fête quelques mètres plus loin et pour cause ! Philipsen n’en perdit pas son sourire mais dans un Tour de France, ce genre d’attitude fait évidemment mal au ventre. Alpecin, où van der Poel fit l’élastique en queue de peloton voyait chaque jour filer ses espoir de victoire. L’abandon du Néerlandais dans l’étape majeure de ce Tour vers le col du Granon mina les espoirs de la formation belge, à la peine, mais nullement résignée. « Psychologiquement, c’était compliqué à assumer, expliqua Philipsen très ému à tous les micros qui lui furent tendus. Il fallait franchir les Alpes sans dommage et s’accrocher. Je savais qu’il n’y avait plus beaucoup de chances pour moi. Carcassonne, j’y pensais cependant. Je connaissais très bien cette arrivée, la même que l’année passée, et cela m’a énormément servi. » En effet, en 2021, même endroit, le Belge s’était classé troisième derrière le duo Cavendish-Morkov. Le Danois avait même dû freiner pour laisser gagner son leader dont le succès d’étape ne fut pas anodin puisque c’est ce jour-là que le Britannique égalait le record de victoires d’Eddy Merckx (34). Ici, Philipsen a brillamment pris l’intérieur du dernier virage, et même s’il dut ralentir pour ne pas tomber, il était le mieux placé au moment de la relance qu’il put assumer sur le grand plateau et déborder ainsi van Aert et Pedersen, soit deux anciens vainqueurs d’étape et non des moindres. Deux vainqueurs qui sont davantage que de purs sprinters comme Jakobsen et Ewan, une nouvelle fois lâchés dimanche. Philipsen est clairement un coureur plus complet qui manquait simplement de réussite. Cavendish fut ainsi sa bête noire en 2021 (troisième à Fougères, deuxième à Châteauroux, troisième à Valence et à Carcassonne lors des quatre étapes remportées par le coureur de Quick Step.) Et pour mieux mesurer la frustration du bonhomme, il dut s’incliner derrière son…équipier Merlier à Pontivy puis se satisfaire d’une autre deuxième place trois semaines plus tard sur les Champs Elysées ! Le Tour des Belges est déjà amplement réussi Triple vainqueur d’étape au Tour d’Espagne, l’Anversois méritait cent fois plutôt qu’une d’obtenir lui aussi la lumière d’un podium sur la Grande Boucle. La non-sélection de Tim Merlier, tout frais champion de Belgique lui mit certes de la pression mais lui offrir toute liberté à condition d’être patient. « L’équipe a travaillé très dur ces derniers jours pour en arriver là, précisa-t-il. Je suis sorti lessivé des Alpes comme tout le monde mais peut-être avais-je un peu de fraîcheur en plus ? » La fraîcheur qui lui a permis de dominer enfin Wout van Aert, peut-être perturbé par son attaque en tout début d’étape (avec Honoré puis Politt) avant que la direction de son équipe lui demande de se relever, et les chutes à répétition dans son entourage (Benoot, Kruijswijk, Vingegaard, lire par ailleurs). Un doublé belge dans une étape a priori de transition, cela ne mange pas de pain et cela fait surtout le quatrième succès pour nos compatriotes dans ce Tour où ils s’engageaient sans leader pour le général. Philipsen et van Aert peuvent encore croire en leurs chances à Cahors vendredi, à Paris dimanche, alors que « WVA » lorgne déjà sur le contre-la-montre de Rocamadour… Il ne reste plus désormais qu’aux équipes Lotto et Intermarché de compléter cette fête par l’intermédiaire de leurs coureurs. Ce sera compliqué pour Ewan (Lotto), courageux en diable mais distancé trop rapidement lorsque la route s’élève. Pour Intermarché, en revanche, le top 10 à Paris et pourquoi pas le maillot à pois sont deux objectifs accessibles pour son Sud-Africain Louis Meintjes, auteur d’une échappée royale samedi vers Mende et désormais septième du général…

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