Quatre trompettes pour propulser le Dinant Jazz au sommet

Ce Trumpet Summit était une excellente idée : les quatre trompettistes invités ont allumé le feu dans les jardins de l’abbaye de Leffe, ce samedi, et le public, le plus nombreux jamais vu au Dinant Jazz, a brûlé d’enthousiasme. Réunir sur un seul plateau les cadors européens de la trompette et du bugle que sont les Italiens Flavio Boltro et Paolo Fresu, le Français Stéphane Belmondo et le Belge Jean-Paul Estiévenart tenait de la gageure et de l’audace. Ces sommets accouchent parfois de souris, ce ne fut heureusement pas le cas ici : le concert a même dépassé nos espérances. Il fut véritablement enthousiasmant. [scald=29315343:sdl_editor_representation] Non seulement parce que ces musiciens sont magnifiques, mais aussi parce qu’ils ont joué ensemble, avec le respect dû l’un à l’autre, sans attirer la couverture de notes bleues à soi. Les solos étaient superbement partagés et chacun a fait assaut d’inventivité, de subtilité, de volubilité, de sonorité, de talent. Et « notre » Jean-Paul Estiévenart a tenu son rang, alors qu’il était très impressionné au départ de jouer avec ces as de la trompette, qui sont ses mentors : « C’est émouvant de partager la scène avec ces maîtres », a-t-il d’ailleurs avoué au micro. Tous les morceaux avaient été arrangés par Lionel Belmondo, saxophoniste et frère de Stéphane. Il y avait de ses propres compositions, dont un Mr. Grossman, dédié à Steve Grossman, le saxophoniste américain mort en 2020, le Prétexte de Stéphane Belmondo, le Rythm-a-ning de Thelonious Monk. Sur le tapis impressionnant généré par le trio rythmique Igor Gehenot au piano, Sal La Rocca à la contrebasse et Noam Israeli à la batterie, les quatre trompettistes ont donné le meilleur d’eux-mêmes, le pianiste les rejoignant souvent dans la beauté de ses solos. Un concert exceptionnel. Exceptionnel par la musique. Et aussi par l’amusement qui s’inscrivait sur les sourires des musiciens et sur ceux du public. « La musique n’est bonne que si les musiciens s’amusent eux-mêmes », concluait Sal La Rocca après le concert. Avec raison. [scald=29315344:sdl_editor_representation] Marcus Miller en clone Précisément, c’est, hélas, ce qui s’est passé avec le deuxième passage de Marcus Miller sur la scène de Dinant. Après sa prestation de vendredi soir, qu’on avait qualifiée d’efficace, il a remis ça samedi soir. Et ce fut la déception. Ce musicien multiprimé, ce roi de la basse, ce type qui a joué avec tout ce que la galaxie jazz compte de planètes géantes, voilà qu’il remet le couvert. Ce deuxième concert fut la copie conforme du premier. Même morceau pour débuter, mêmes morceaux pour poursuivre, comme cette version personnelle de Night in Tunisia, même ballade jouée à la clarinette basse, même gros son de basse, de batterie, de claviers, de cuivres. Très pro. Mais fort peu d’émotions. Marcus Miller en clone de lui-même… [scald=29315216:sdl_editor_representation] Ce qui a changé ? D’abord, il n’a pas joué Come together et il adjoint So What au Tutu déjà joué la veille. Et puis il a invité Reggie Washington, le bassiste américain installé à Bruxelles, à le rejoindre sur scène. Et, c’est vrai, Reggie a apporté du piquant, une certaine originalité, de l’inventivité, de l’artisanat suis-je tenté de dire, à la musique assez formatée de Marcus. [scald=29315215:sdl_editor_representation] Dans l’après-midi, Hamilton de Holanda était en trio, avec claviers et batterie. On s’attendait à des chansons doucement swinguantes, comme les bossas-novas de Jobim. Et si Hamilton a bien interprété du Jobim, en plus de ses propres compos, il l’a fait version rock très électrique, avec une batterie lourde, des claviers tonitruants et son bandolim amplifié à l’extrême. Ça cognait. Heureusement, il y a eu l’accalmie de Luiza et la finale avec Agua de Beber, de Jobim encore. [scald=29315217:sdl_editor_representation] En début de journée, on a eu le plaisir d’écouter le Wajdi Riahi Trio, le vainqueur du concours de jeunes talents 2021. Il a offert sa sympathie et son talent à travers ses chansons, dans lesquelles il rassemble son amour du jazz et ses racines nord-africaines (s’il vit à Bruxelles, Wajdi Riahi est Tunisien). Son travail au piano est enchanteur et est intelligemment supporté par Basile Ruhola à la contrebasse et Pierre Hurty au piano. Mais la musicalité du trio est sans doute mieux mise en valeur dans l’intimité d’un club que dans la vastitude d’un grand chapiteau. C’est là que la superbe musique de Wajdi Riahi prend toute sa saveur. Le Dinant Jazz se poursuit ce dimanche. Viktor Lazlo clôture le festival. dinantjazz.com.

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