«La quête du Graal, c’est celle du sacré»

Voilà un bon livre d’été. « Non, réagit Jacques Ravenne, c’est “le” livre de l’été ! » Son compère Eric Giacometti est plus modeste : « C’est au lecteur, ça, de le décider ». Leur roman, L’empire du Graal, a cependant tout pour faire un best-seller, en hiver comme en été d’ailleurs. Comme les neuf précédents qu’ils ont écrits ensemble, sur les templiers ou les illuminati par exemple. En français, ils en ont vendu, en tout, 2,3 millions d’exemplaires. Plus la moitié dans l’ensemble des 17 langues de traduction. Giacometti et Ravenne connaissent le succès, c’est sûr. Séparément aussi : le premier reprend le personnage de Largo Winch à Van Hamme, le second scénarise une série ésotérique pour la télé. [scald=1447366:sdl_editor_representation] Des recettes pour faire un bon best-seller ? « C’est le Graal que vous me demandez !, répond Eric Giacometti. Mais on peut tenter de comprendre pourquoi ça marche. La société est en crise, le monde qui nous entoure est dur, il y a le terrorisme et le chômage, l’Europe explose, les utopies n’existent plus, plus rien ne fait rêver. C’est à ce moment-là que les gens se réfugient dans la fiction. Ils veulent s’évader du quotidien. Et puis on sait que ces thématiques-là, le Graal, les templiers, les illuminati, ça fait rêver. Le héros récurrent est aussi pour beaucoup dans le succès. Le nôtre, Antoine Marcas, est franc-maçon, il est humaniste, porteur de valeurs, les lecteurs lui sont attachés. » « Pour qu’un thriller fonctionne, ajoute Jacques Ravenne, il faut un arrière-fond. Le lecteur de thriller ésotérique demande à apprendre des choses, il veut qu’on lui décrive un milieu, une société, qu’on lui apporte une connaissance historique, un développement culturel. » Suspense D’accord. Mais il faut d’abord que le lecteur vibre. Et là, le duo Giacometti-Ravenne fait des miracles. Dès le prologue, on tremble pour Marcas. La suite est faite de courts chapitres, rapides, qui suivent chaque fois des personnages différents, qui se terminent chaque fois par un cliffhanger, un suspense, de nombreux retournements de situation jusqu’à la fin, écrits de façon simple mais efficace. « Si le lecteur bute sur des phrases trop complexes, analyse Ravenne, il est perturbé et il arrête la lecture. » Simple et efficace ne veut pas dire négligé et médiocre. D’abord, la narration à plusieurs voix provoque des effets de miroir et donc de reflets. Ensuite, s’il s’agit évidemment de divertir, il y a davantage. « Pour Le règne des Illuminati, on a voulu combattre les théories du complot, de la conspiration, qui font le buzz chez les jeunes, explique Gioacometti. Pour L’empire du Graal, on est revenu à ce qui nous faisait rêver. On a vu Indiana Jones, on a lu le Da Vinci Code. Pourquoi le Graal, une invention littéraire du XIIe siècle, écrit par Chrétien de Troyes, est devenu un symbole universel ? Un récent sondage montre que 45 % des Français croient au Graal. Il y a donc bien quelque chose derrière, ce besoin de merveilleux qui est inhérent chez nous. On a deux cerveaux, un rationnel et un irrationnel. Peut-être notre société a-t-elle trop développé notre cerveau rationnel et oublié qu’on a une part d’irrationnel, qui se traduit par la religion, l’ésotérisme, la fiction. » Pureté L’idée de base de ce roman est assez originale. Enfin, je le croyais. Le Vatican a réalisé des études : l’Eglise agonise. Et qu’est-ce qui lui redonnerait des couleurs ? Le Graal. Le pape envoie donc le père Da Silva en quête du vase sacré. Mais il est n’est pas seul sur la piste, évidemment. Il y a aussi l’écrivain Derek Stanton, un double ironique de Dan Brown ou du duo Giacometti-Ravenne, et Antoine Marcas est évidemment mêlé à cela. Alors on vole de Paris, où Stanton a acquis le sarcophage d’un vampire, à Winchester, à Glastonbury, à la forêt de Brocéliande, à l’île d’Aval, et de surprise en surprise. Mais qui est véritablement Stanton ? Et le Graal est-il le calice qui a recueilli le sang de Jésus ? « C’est en tout cas un symbole de pureté, dit Jacques Ravenne. La quête du Graal, c’est la quête du sens, de la transcendance, du sacré. » « Et nous n’inventons rien, conclut Eric Giacometti : on est parti d’une étude réelle qui concluait que l’Eglise devait trouver le Graal pour lui réinsuffler le sens du sacré. » [scald=1447367:sdl_editor_representation] Thriller L’empire du Graal ★★ERIC GIACOMETTI et JACQUES RAVENNE, JC Lattès, 586 p., 20,90 €, ebook 14,99 € Lire aussi La quête du Graal Il s’agit, ici aussi, de la recherche du Graal. Le héros est Arthur Mallory, il est chimiste. Il descend de l’écrivain du XVe siècle Thomas Mallory, qui a écrit Le morte d’Arthur. Son hobby : chercher le Graal. Mais des cadavres s’éparpillent autour de lui. D’où un périple qui le mène de Montserrat à Jérusalem. Et un livre qui se passe aujourd’hui, au temps de Jésus et à l’époque de Thomas Mallory. [scald=1447368:sdl_editor_representation] Le secret du Graal ★★ GLENN COOPER, Traduit de l’anglais par Bérénice Paupert, Pocket, 456 p., 8 € Ramener Jésus Vingt-huit ans après l’excellent Jésus Vidéo, l’écrivain allemand (vivant en France) Andreas Eschbach reprend cette histoire incroyable de vidéo montrant Jésus retrouvée lors de fouilles archéologiques à Jérusalem. Le voyage dans le temps existe donc. Comment sinon expliquer cette vidéo ? Un milliardaire américain, fou de Dieu, veut envoyer une expédition temporelle en l’an 33 pour ramener Jésus à notre époque. [scald=1447369:sdl_editor_representation] L’affaire Jésus ★★ ANDREAS ESCHBACH, Traduit de l’allemand par P. Hervieux, L’Atalante, 635 p., 27 €, ebook 9,99 € Alchimie Ce qui passionne Viviane Moore, et passionne ses lecteurs, c’est le Paris de la fin du XVIe siècle, ses mystères, ses crimes, l’alchimie, les pratiques occultes. On est en 1584. Le commissaire au Châtelet, Jean du Moncel, est chargé d’enquêter sur un vol de cadavres au gibet de Montfaucon. Ce qui lui permettra de croiser la fascinante Sybille le Noir dont il ne nous étonne pas qu’il soit amoureux. [scald=1447370:sdl_editor_representation] L’homme au masque de verre ★★VIVIANE MOORE, 10-18, Grands détectives, 312 p., 8,10 € Source de la fantasy Retrouvez Arthur et Guenièvre, les fées Viviane, la dame du Lac, et Morgane, la prêtresse d’Avalon, Merlin, Lancelot, Gauvain, Galaad, etc., dans cette saga arthurienne de grande ampleur. Les romans datent des années 80, ils sont ici rassemblés et ça fait 600 pages aux sources même de la fantasy. C’est coloré, épique et enthousiasmant, c’est aussi le moment où les temps anciens font place aux temps modernes. [scald=1447371:sdl_editor_representation] Les dames du lac ★★★ MARION ZIMMER BRADLEY, Tr. de l’anglais (E-U) par Brigitte Chabrol, Pygmalion, 608 p., 19,90 €, ebook 14,99 €

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