Goldorakmania sur la planète Tour et Taxis

Arrivé du fond des temps, de l’infini, Goldorak le robot de l’espace, jaillit sur les écrans d’Antenne 2, en 1978. Dorothée inscrira sa légende dans l’histoire du dessin animé. Son pilote, Actarus, Prince d’Euphor, s’est réfugié sur Terre après avoir vu sa planète anéantie par l’empire de Vega. Et quand le Grand Stratéguerre de Vega s’est mis en tête d’asservir la Terre, Actarus a repris les commandes de Goldorak pour repousser les robots tueurs de Vega avec l’aide d’Alcor, ingénieur à la Nasa. Vénusia et Phénicia, deux jeunes femmes héroïques, lui prêteront main-forte et la série va flirter avec les 100 % d’audience en France, sur la case horaire de dix-huit heures, celle de Récré A2. [scald=29654388:sdl_editor_representation] L’émission de Dorothée donnera naissance à ce qu’on appellera la « génération Goldorak ». Les chansons des génériques, en particulier celles interprétées par Noam Kaniel, vont se vendre à plus 4 millions d’exemplaires et seront certifiées plusieurs fois disque d’or. Dans son livre A cinq ans seul avec Goldorak , la psychologue française Liliane Lurçat tentera, en vain, de discréditer la série en raison de l’addiction à la violence qu’elle provoquerait chez les enfants. L’animatrice de Récré A2 se verra affublée du sobriquet de « Goldorothée » et Paris-Match parlera de La Folie Goldorak à la Une. Depuis, le robot rêvé par l’artiste japonais Go Nagai a fait l’objet d’un colloque à la Sorbonne. Devenu culte, l’auteur a été fait Chevalier de l’Ordre des Arts et Lettres. Les originaux de ses story-boards, les cellos de ses dessins animés et les objets dérivés de Goldorak sont devenus des objets d’art populaires que les collectionneurs se disputent aux enchères chez Drouot. Certaines de ces pièces rares figurent dans l’exposition Goldorak XperienZ , qui a traversé tout l’univers jusqu’à Tour et Taxis, après avoir enflammé Lille et Paris. Amoureux de la planète Euphor et collectionneur de tout ce qui touche à l’univers de Goldorak depuis l’âge de dix ans, le Français Alexandre da Conceicao Rose nous fait partager les secrets de la légende d’Actarus dans les profondeurs de Tour et Taxis, transformées en Camp de la Lune noire… D’où proviennent tous ces trésors rassemblés à Tour et Taxis ? Jeremy Cerrone, patron de Prime Prod et producteur de l’exposition, a obtenu des studios Toei Animation et Dynamic Planning les droits de monter cet événement. Tout ici est validé par les ayants droit de Goldorak, jusque et y compris l’affiche faite par l’artiste plasticien français Alexis Tallone. Concernant les œuvres présentées à Tour et Taxis, elles proviennent des malles de cinq à six collectionneurs, au rang desquels figure votre DJ Daddy K avec ses prodigieux Goldorak en or. Certains ont prêté des celluloïds originaux ou des dessins préparatoires… Un autre Belge, Benjamin, qui kiffe les packagings, expose des pièces incroyables comme des boîtes de bâtonnets glacés à l’effigie de Goldorak ! En 2022, les clichés sur la violence et la pauvreté artistique de Goldorak ne sont plus qu’un mauvais souvenir ? Les jeunes d’aujourd’hui sont bercés par la culture manga. A l’époque de Dorothée, c’était neuf et les adultes ne voyaient pas les messages sur l’écologie ou la parité hommes-femmes sous-jacents dans la série. Car il faut rappeler qu’à côté des deux héros, Actarus et Alcor, il y avait deux héroïnes, Vénusia et Phénicia, aussi prêtes que les hommes à mourir pour sauver la terre. Goldorak, ce n’était pas seulement une affaire de robots qui se filaient des baffes ! Dorothée s’est battue pour nous donner accès à la culture de l’anime japonaise. Dans le monde politique, Ségolène Royal avait lancé une vendetta contre Goldorak, accusant la série de rendre les enfants violents et débiles. Moi je l’ai découvert à dix ans. Là, je suis devant vous et j’ai l’air normal, non ? Goldorak a été essentiel dans notre émancipation. Encore aujourd’hui, pendant les visites, quand je balance trois phrases, tout le monde se met à chanter les chansons des génériques par cœur. Je rêve d’avoir, un jour, Dorothée comme invitée d’honneur de notre exposition… Le merchandising autour de Goldorak a été un élément important de son succès populaire ? Tout a commencé avec le « Goldorak Shogun » de Mattel, un jouet qui a marqué toute une génération. Cette représentation du robot a été le cadeau le plus demandé au père noël à la fin de l’année 1979. Dans sa version bleue, il valait 50 francs français. Début décembre, il était épuisé : les marchands de jouets n’avaient jamais vu ça. Pour ne pas l’abîmer, je jouais avec ceux de mes frères. Aujourd’hui, c’est un objet de collection. Il existe en sept ou huit variantes : japonaise, française, italienne, allemande… Nous en avons plusieurs dans l’exposition, dont le rarissime Shogun nippon à tête articulée. A ce propos, il faut souligner un paradoxe : au Japon, Goldorak n’a jamais vraiment bien marché. Parce que Go Nagai avait créé précédemment Mazinger Z, un autre robot, dont Alcor était le pilote. Alcor était une icône au Japon et dans Goldorak, il avait le second rôle, à côté d’Actarus. Du coup, les jeunes avaient un peu boudé la série ! Les pays où Goldorak a rencontré le plus de succès sont la France, l’Italie, l’Espagne et la Belgique. Quelles sont les pièces à voir absolument dans l’exposition ? Le parcours s’ouvre sur les dessins préparatoires de Go Nagai. Nous en avons réalisé des fac-similés, sinon il y en avait pour un million d’euros en assurances ! Cela permet de se plonger dans le making-of de la série, la construction des vaisseaux, le cockpit mythique de Goldorak, la création des personnages et de leurs costumes… Il y a les vinyles originaux de tous les génériques, avec des pressages japonais rares dont les pochettes contiennent des posters fabuleux. Parmi les pièces les plus étonnantes, il y a des photos extraites du film Goldorak au cinéma , qu’on mettait dans les vitrines à l’entrée des salles bruxelloises. On projette les meilleurs moments du concert Goldorak au Grand Rex de Paris, qui rassemblait les interprètes des chansons des génériques, Bernard Minet, Noam, Enriqué, Michel Barouille, Jean-Pierre Savelli… Il y a aussi cette planche de la BD Shonen Avengers de ZeMiaL, qui résout enfin la question philosophique du double demi-tour que fait le siège d’Actarus dans le robot Goldorak… Ou encore des celluloïds originaux des dessins animés. Ils en ont jeté beaucoup. Ça n’avait pas de valeur pour les studios, à l’époque, mais ce sont des pièces extraordinaires. Il faut mettre le nez dedans pour apercevoir parfois des microdétails comme ces tout petits soldats des armées de Vega d’une finesse absolue. Vous avez un objet fétiche ? J’en ai deux ! Les casques bleu et jaune. Quand Go Nagai a fait Mazinger Z, il a été viré après. Les patrons de la Toei Animation pensaient qu’il suffirait de mettre un autre robot avec un pilote dedans pour tout cartonner. Ils avaient oublié qu’il fallait aussi du talent. Avec des dessinateurs maisons, ils ont fait L’Attaque des soucoupes volantes avec un personnage à casque bleu. Mais ça ne marchait pas. Ils ont rappelé Gon Nagai. Il a récupéré quelques éléments du pilote de L’Attaque des soucoupes volantes , dont ce casque bleu qu’il a relooké en jaune… La pièce la plus rare exposée à Bruxelles ? Ce doit être le Goldorak Shogun parlant. Il cause réellement mais uniquement en japonais ! Ou le bus Goldorak, un produit japonais, avec Actarus et Alcor au volant, et les méchants de la série, à l’arrière dans le bus. On peut imaginer que la série était terminée et qu’ils rentraient ensemble à la cantine pour fêter ça… Et j’ajouterai le cockpit du Goldorak grandeur nature, une pièce unique réalisée à la demande du patron Jeremy Cerrone. Ou encore le cockpit du Goldorak grandeur nature, une pièce unique réalisée à la demande du patron Jeremy Cerrone. On peut se photographier aux commandes, si le guide l’autorise et à condition d’être respectueux… L’exposition se termine sur les hommages d’artistes contemporains, qui sont-ils ? Il y a Cmoi, qui peint des portraits réalistes des personnages dans des cadres anciens, comme s’ils avaient vraiment existé. François Pigeonnier fait exploser les personnages dans le plexiglas. ZeMiaL, un Français installé en Belgique, signe des œuvres inouïes, où il réinterprète Goldorak dans le style Art nouveau de l’affichiste tchèque Alfons Mucha ! Et d’autres dont je laisse la surprise aux visiteurs. Goldorak XperienZ , 1975-2023 Rétrospective, jusqu’au 15 janvier (m ercredi au dimanche, 10 à 18h), ouvert les 26, 27 décembre et 2, 3 janvier, fermeture exceptionnelle les 25 décembre et 1er janvier, Tour et Taxis, avenue du Port 86C, Sous-Sol des Sheds, 1000 Bruxelles

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