Immigration: l’Allemagne veut offrir un passeport au bout de trois ans

Devenir allemand en trois ans ? Ce sera bientôt possible en Allemagne, selon Nancy Faeser, la ministre fédérale de l’Intérieur. La nouvelle loi de citoyenneté (Staatsangehörigkeitsrecht) permettra aux étrangers en situation régulière sur le territoire allemand d’obtenir automatiquement la nationalité allemande au bout de cinq ans, contre huit aujourd’hui. Ce délai sera réduit à trois ans pour toutes les personnes ayant fait preuve de bonne volonté pour leur intégration : bon niveau d’allemand, bonnes notes, engagement bénévole dans le travail associatif, etc. Le droit du sol sera également assoupli. Les enfants habitants plus de cinq ans avec leurs parents sur le territoire bénéficieront automatiquement de la nationalité allemande. Enfin, le gouvernement a engagé la régularisation de près de 100.000 déboutés du droit d’asile qui remplissent les critères de l’intégration (maîtrise de la langue, casier judiciaire vierge, revenus réguliers, identité vérifiée, etc.). [scald=29666858:sdl_editor_representation] Non seulement, les Allemands veulent faciliter les naturalisations mais ils veulent aussi encourager les personnes issues de l’immigration à devenir allemand. Le gouvernement prévoit notamment de supprimer la barrière de la langue pour la génération des « Gastarbeiter » (travailleurs immigrés, littéralement « invités ») des années 60 et 70, une génération qui n’a pas eu accès des cours d’allemand. A partir de 67 ans, plus aucune attestation ne sera réclamée. Besoin de main-d’œuvre En Allemagne, plus de neuf millions de personnes travaillent aujourd’hui sans posséder la nationalité allemande, a insisté le chancelier. « Nous avons besoin de nouvelles règles pour toutes ces femmes et ces hommes qui sont formidables et qui ont contribué à rendre notre économie si forte », a déclaré Olaf Scholz lundi lors d’un débat à Berlin sur la modernisation de la citoyenneté. « Ils doivent obtenir le droit de voter mais aussi d’être élu. Ils doivent faire partie de notre pays, avec des droits et des devoirs, indépendamment de leurs origines, de leur couleur de peau et de leur religion », a-t-il ajouté. Les experts du marché du travail avaient réclamé une telle réforme. L’Institut de recherche économique (DIW) à Berlin estime qu’elle permettra d’attirer des personnels qualifiés dans un contexte de recrutement planétaire de plus en plus concurrentiel. La perspective d’obtenir rapidement la nationalité sera un élément supplémentaire pour rendre l’Allemagne plus attractive. « Sans cela, la pénurie de main-d’œuvre risque de s’aggraver », prévient Marcel Fratzscher, le directeur du DIW. En Allemagne, la main-d’œuvre fait cruellement défaut dans les services publics, les aéroports, les hôpitaux, les maisons de retraites, les trains ou les restaurants. Andrea Nahles, directrice de l’agence pour l’emploi, estime les besoins à 400.000 immigrés par an… pour stabiliser le marché du travail. « Les obstacles sont encore trop importants dans la délivrance des visas et les démarches administratives », regrette-t-elle. Pour cette raison, le gouvernement va assouplir de nouveau la loi d’immigration (Fachkräfteeinwanderungsgesetz), entrée en vigueur en 2020, pour accélérer le recrutement dans les pays tiers. Après avoir supprimé la « préférence nationale » à l’embauche et facilité la délivrance de visas, le gouvernement Scholz va poursuivre la débureaucratisation en renonçant à l’allemand obligatoire et aux diplômes. Les candidats pourront apprendre la langue sur place et prouver leur qualification en Allemagne. « Notre loi sera la plus libérale d’Europe », a promis Robert Habeck, le ministre écologiste de l’Economie et du Climat, qui présente son texte ce mercredi en conseil des ministres. « Nationalité bradée » Reste encore à convaincre les libéraux (FDP) du gouvernement qui dénoncent une « précipitation » dans les réformes. Le FDP craint qu’elles ne favorisent une immigration « sociale ». « Tous les bras sont les bienvenus sur le marché du travail mais pas dans le système de protection sociale », a critiqué Marco Buschmann, le ministre libéral de la Justice. L’opposition conservatrice dénonce un « bradage de la nationalité allemande ». « La délivrance d’un passeport se fait à la fin du processus d’intégration, pas au début », a critiqué Mario Czaja, le secrétaire général de l’Union chrétienne-démocrate (CDU). « Les conservateurs doivent changer de siècle », a rétorqué Nancy Faeser. « Il faut achever le dépoussiérage de nos lois », a ajouté Reem Alabali-Radovan, la secrétaire d’Etat à l’Intégration, avant d’ajouter : « Elles datent de l’empire ».

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