Union européenne: friture sur la ligne Bruxelles-Budapest

Le bras de fer se poursuit entre l’Union européenne et l’un de ses membres, la Hongrie. L’enjeu ? 13,3 milliards. Dont Budapest a cruellement besoin avec une inflation à plus de 21 % et une monnaie faiblarde. Cette manne ne devrait toutefois être libérée que si les autorités hongroises améliorent considérablement la lutte contre la corruption, l’indépendance de la Justice, la transparence et la concurrence des marchés publics… Telle est en effet la proposition formulée, ce mercredi, par la Commission européenne. Concrètement, l’exécutif communautaire suggère d’actionner deux leviers pour faire pression sur Viktor Orban. D’abord, la suspension de 65 % des fonds de cohésion promis à son pays, soit 7,5 milliards. La toute première application du mécanisme dit de conditionnalité (des versements financiers au respect de l’Etat de droit). Pour échapper à cette menace brandie en septembre, la Hongrie devait mettre en œuvre, pour le 19 novembre, dix-sept mesures visant à protéger le budget européen de la corruption, de la fraude, des conflits d’intérêts. Aujourd’hui, la Commission estime que des pas ont été effectués dans la bonne direction, mais qu’ils ne sont pas suffisants. « Ce n’est pas insurmontable, c’est réalisable, mais ce n’est pas encore fait, résume Johannes Hahn, commissaire en charge du Budget. Pour certains points, on a des propositions, des promesses, mais qui n’ont pas été réalisées dans le délai imparti. » [scald=29668106:sdl_editor_representation] La Commission a par ailleurs approuvé ce mercredi le plan de relance hongrois, soit 5,8 milliards de subsides, pour accélérer les transitions verte et numérique. Pour en bénéficier, Budapest devra atteindre une série d’objectifs, comme c’est le cas pour tous les autres Etats membres. A cette nuance près que la Hongrie se voit imposer de « super-conditions », à remplir absolument avant de solliciter un premier paiement. « Aucun versement de fonds n’aura lieu tant que ces conditions essentielles ne seront pas correctement remplies », a averti le vice-président de la Commission Valdis Dombrovskis. Elles sont au nombre de vingt-sept, parmi lesquelles les dix-sept listées dans le mécanisme de conditionnalité, mais aussi un ensemble de mesures concernant l’appareil judiciaire. « La Hongrie a pris des engagements ambitieux, avec des projets de réformes concrètes, qui n’avaient jamais été acceptées par le passé, insiste Didier Reynders, commissaire à la Justice. Elles sont le fruit de discussions intenses, aussi bien au niveau technique que politique, entre la Commission et les autorités hongroises. Elles doivent renforcer l’accès à une Justice indépendante, mieux protégée des interférences politiques. » De quoi répondre aux inquiétudes exprimées à plusieurs reprises par l’exécutif, « malgré quoi la situation a continué à se détériorer sur le terrain ». « Ce qui est sûr, c’est que l’incitant budgétaire est un instrument efficace : depuis qu’on l’a, on a vu des propositions de réformes arriver sur la table », insiste Didier Reynders. « Aujourd’hui, il y a une position très forte, cohérente, du Parlement, de la Commission, de la Cour de justice de l’UE ». [scald=29668108:sdl_editor_representation] Balle au Conseil A charge, pour le Conseil, d’avaliser cette pression budgétaire. La suspension des fonds de cohésion n’est à ce stade qu’une proposition, qui doit être approuvée, rejetée ou amendée par les ministres des Finances. A majorité qualifiée – 55 % des Etats membres, représentant 65 % de la population européenne. Ils ont prévu de se retrouver, le 6 décembre à Bruxelles. Si l’Allemagne s’est réjouie, par la voix de sa ministre des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, que la Commission « se soit acquittée de sa tâche », soulignant que « l’État de droit est l’épine dorsale de notre démocratie européenne et du marché intérieur », et que le Benelux devrait approuver le gel des fonds, certains pays pourraient se montrer plus réticents. Faute d’accord pour la Saint-Nicolas, il faudra convoquer une nouvelle réunion, puisque le Conseil doit se prononcer au plus tard le 19 décembre. Le point sera examiné en même temps que le plan de relance, qui doit également être approuvé par les Vingt-Sept. L’agenda prévoit encore deux autres dossiers… bloqués par Viktor Orban, en guise de chantage (même si l’intéressé dément fermement) : le prêt de l’Union européenne à l’Ukraine (18 milliards d’euros pour l’an prochain) ainsi que le projet d’impôt minimum sur les bénéfices de multinationales. [scald=29668107:sdl_editor_representation] Dans une première réaction, mercredi, la Hongrie s’est montrée plutôt constructive. « Nous allons mettre en place les mesures supplémentaires exigées et nous ne doutons pas que nous parviendrons à convaincre la Commission qu’il n’est pas nécessaire de suspendre les fonds », a déclaré le négociateur hongrois Tibor Navracsics devant la presse à Budapest. « Les mesures déjà adoptées ont posé les fondations permettant d’accéder à la totalité des fonds. » Concrètement, si le Conseil approuve les deux dossiers hongrois, la Commission devra veiller au respect des engagements. « On sera très vigilants sur les progrès enregistrés, assure Didier Reynders. Notre accord avec la Hongrie est clair, précis, détaillé. » Même si les deux dossiers ne sont pas liés, si Budapest coche toutes les cases lui permettant de solliciter un premier paiement du plan de relance, elle pourra aussi obtenir la libération des fonds de cohésion. De leur côté, les principaux groupes parlementaires ont salué la décision de la Commission. « Une décision historique », ont salué Petri Sarvamaa (PPE, conservateurs) et Daniel Freund (Verts). « La Commission a entendu le message fort du Parlement », a souligné Iratxe Garcia, présidente des socialistes. « Mais nous continuerons à maintenir la pression pour nous assurer que le gouvernement d’Orban ne recevra aucun fonds de l’UE, y compris le plan de relance, avant une restauration vérifiable de l’État de droit dans le pays », a insisté Renew. Dans l’hémicycle, certains, notamment chez les centristes, avaient évoqué la possibilité d’une motion de censure de la Commission en cas de libération des fonds de cohésion. Une éventualité qui, selon plusieurs sources, aurait incité l’exécutif à finalement se montrer plus ferme qu’il ne l’entendait initialement… Dans ce contexte, la présidente de la Commission dérogera à la tradition désormais bien établie, de se rendre dans le pays concerné pour officialiser l’approbation du plan de relance…

Votre compte

Union européenne: friture sur la ligne Bruxelles-Budapest

Découvrez la suite, 1€ pour 1 mois (sans engagement)

Avec cette offre, profitez de :

Le fil info

1 Commentaire

Aussi en Union Européenne

De violentes tempêtes de neige sèment le chaos en Europe centrale

Qatargate: Niccolo Figa-Talamanca est libéré par le juge Claise

Crise énergétique: l’UE s’accorde sur le plafonnement du prix des produits pétroliers russes

Charles Michel promet de «soutenir» l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne

Sirènes anti-aériennes à Kiev avant le début du sommet Ukraine-Union européenne

Allez au-delà de l'actualité

À la Une

Ballon «espion»: les Etats-Unis ont abattu l’engin chinois (vidéos)

Analyse Au Cercle, le Standard a craqué dans les derniers instants

Hadja Lahbib en visite au Congo: «Il est urgent que la RDC se ressaisisse»

Guerre en Ukraine: l’armée ukrainienne déjoue un assaut russe contre Bakhmout

Une étude (et la N-VA) remet la défédéralisation de la justice à l’agenda

Egbert Lachaert (Open VLD) sur la prolongation du nucléaire: «Il faut une nouvelle loi avec de nouveaux délais»

30 années au service d’une passion : le métier d’infirmière

Des soins intensifs polyvalents et à la pointe des technologies

L’indemnité vélo pour tous les travailleurs belges dès le mois de mai

Les sections du site

Les services

Groupe Rossel