Le procès de Bruxelles après celui de Paris: une référence et des différences

La cour d’assises qui siégera à Haren ne naviguera pas totalement en zone inconnue. Le procès « V13 » (celui des attentats du 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis), dont les audiences auront duré dix mois, servira de référence en Belgique. Même si tout ne sera pas identique… [scald=29673079:sdl_editor_representation] 1 Une cour d’assises spécialement composée En France, ce n’est pas un jury populaire, mais une cour d’assises spécialement composée de magistrats professionnels qui a jugé les 20 accusés du procès V13, dont quatorze étaient présents. Depuis une loi de 1986, il n’est plus question en France que des citoyens jugent les affaires de terrorisme. Cette année-là, des jurés siégeant à la cour d’assises de Paris lors du procès des membres de la cellule d’ultra-gauche Action directe avaient été menacés. Si bien que certains d’entre eux avaient refusé de siéger. Le législateur a voulu éviter ces pressions en recourant à des magistrats rompus à ce type d’audiences. Cinq magistrats (le président Jean-Louis Périès et quatre assesseurs) ont siégé. [scald=29673080:sdl_editor_representation] 2 Un lieu chargé d’histoire Le procès V13 s’est tenu au Palais de justice historique de Paris, sur l’île de la Cité. Une salle spéciale dédiée aux grands procès y a été aménagée dans la salle des pas perdus : 750 m2 dédiés, 550 places disponibles. Ce gigantesque préfabriqué de bois clair, connecté à différentes salles de retransmission (pour la presse, pour le public), a été aménagé en treize mois et a coûté 7,5 millions d’euros au ministère français de la Justice. Toutes les parties se sont félicitées de ces audiences tenues au cœur de Paris. Et pas seulement pour des facilités de déplacement. Les attentats s’étant produits au cœur de la capitale, il fallait qu’ils soient jugés dans ce même décor. Les cafés et restos alentours ont permis aux différentes parties du procès de s’y retrouver après les audiences éprouvantes. Ce même lieu accueille d’ailleurs depuis le 5 septembre le procès de l’attentat de Nice. [scald=29673046:sdl_editor_representation] 3 Des politiques à la barre L’ancien président François Hollande ainsi que l’ancien ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve sont venus témoigner à la barre du V13, cités par l’association de victimes Lie for Paris. Alors que Salah Abdeslam, seul survivant des commandos du 13 novembre, avait prétendu que les attaques avaient été planifiées en représailles aux frappes françaises en Irak et en Syrie, l’ex-chef de l’Etat s’est employé à démonter cette fable. « L’Etat islamique nous a frappés, non pas pour nos modes d’action à l’étranger, mais pour nos modes de vie ici même. » François Hollande avait aussi égratigné la Belgique. « La coopération européenne s’était considérablement renforcée depuis janvier 2015. Sur le plan policier, elle était réelle. Du point de vue du renseignement, c’était plus compliqué », avait-il pointé. [scald=29673047:sdl_editor_representation] 4 Des cordons de couleur, une web-radio Les dispositifs spéciaux à destination des parties civiles ont été éprouvés, et approuvés, en France. Il était proposé aux victimes de porter un ruban rouge ou vert autour du cou, pour manifester leur refus ou non d’être interrogées par la presse. Plusieurs victimes ont porté tour à tour l’un ou l’autre, en fonction des audiences plus ou moins éprouvantes. [scald=29673066:sdl_editor_representation] Un dispositif de web-radio a aussi été mis en place pour la première fois. Avec un léger différé, pour éviter tout incident, les victimes pouvaient écouter l’audience à distance. Ce dispositif, plébiscité, a été étendu pour le procès de l’attentat de Nice. Cette attaque sur la Promenade des Anglais ayant fait de nombreuses victimes étrangères, la web-radio du procès est accessible depuis plusieurs pays. [scald=29673048:sdl_editor_representation] 5 Un enregistrement du procès pour l’histoire Le procès V13 a été filmé dans son intégralité, alors qu’en Belgique, il ne sera pas capté pour en conserver à jamais les images. C’est la quinzième fois en France qu’une audience était enregistrée à des fins historiques. C’est l’ancien ministre de la Justice, Robert Badinter, qui avait ouvert la voie à ce type de dispositif en 1985, en précisant que la captation devait être la plus neutre possible. Avant le procès des attentats du 13-Novembre, les procès de Klaus Barbie, de Paul Touvier, de Maurice Papon et ceux concernant le génocide tutsi avaient notamment déjà été captés. Aucun des accusés n’ayant fait appel, les chercheurs peuvent dès à présent consulter les enregistrements aux Archives nationales. Des autorisations exceptionnelles peuvent également être demandées pour des expositions ou des documentaires. En revanche, la reproduction ou la diffusion de l’intégralité des audiences ne sera possible que dans 50 ans. [scald=29673049:sdl_editor_representation] 6 La perpétuité incompressible A Paris, Salah Abdeslam a été condamné à la perpétuité incompressible, une peine qui n’existe pas en tant que telle en Belgique (même si des condamnés peuvent y demeurer à vie en prison compte tenu de leur dangerosité). Avant lui, seuls quatre autres accusés (dont Michel Fourniret) avaient été condamnés à cette peine, la plus lourde prévue par le code pénal et instituée en 1994, treize ans après l’abolition de la peine de mort. A chaque fois, il s’agissait de crimes commis sur des enfants, incluant des viols ou des tortures. La perpétuité incompressible signifie qu’en principe, aucun aménagement de peine n’est possible. Au terme de 30 ans de prison, le condamné peut toutefois demander au tribunal d’application des peines de revenir sur cette impossibilité. Une décision qui ne pourrait être prise, en tout état de cause, qu’avec l’aval de cinq magistrats de la Cour de cassation, après consultation des victimes.

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