La Coupe du monde, un «pétard mouillé» pour nos cafés

Pour de nombreux bars et cafés de notre royaume de la bière et du foot, boycotter la Coupe du monde au Qatar était un luxe impayable. Car, malgré toutes les polémiques liées au pays organisateur de l’événement planétaire, retransmettre les matchs avait de quoi drainer les foules de fans du ballon rond appréciant regarder ensemble – tout en consommant des chopes – le tournoi dans les lieux populaires et conviviaux que sont les établissements horeca. Avec quel bilan, alors que la phase de groupes s’est achevée… et, surtout, que les Diables rouges ont été éliminés ? « La Belgique ne se qualifie pas en huitièmes de finale ? Il ne restera quasiment plus rien pour les cafés, sauf peut-être la finale ! Mis à part cela, le faible enthousiasme que nous sentons va complètement disparaître », selon Eric Beunckens, réagissant juste avant l’élimination de l’équipe nationale. L’administrateur délégué de la Fédération des cafés de Belgique (Fedcaf) prédit donc une perspective peu réjouissante de ballon rond qui se dégonfle, pour un secteur qui souffre des conséquences du covid, aggravées par l’inflation et la pression sur le pouvoir d’achat. [scald=29673655:sdl_editor_representation] « Que les Diables rouges se mettent un coup de pied aux fesses ! S’ils sont éliminés, il y aura automatiquement encore moins de monde », prédisait lui aussi Hugues Herbinaux, patron du bar sportif Ad Hoc sur le campus de l’UCLouvain à Woluwe. Cet entrepreneur, qui dirige aussi un restaurant à proximité, l’assurait déjà mercredi : « Dans mon resto, D’Ici & d’ailleurs, j’enlèverai certainement mon écran si la Belgique perd. » Ce scénario d’un retour des Diables à domicile, finalement acté jeudi soir à l’issue du match nul entre la Belgique et la Croatie (0-0), Ludovic Comhair, parton du café Sainte-Walburge à Liège, le redoutait aussi à la veille de la rencontre décisive. « Sans les Diables, les gens ne viendront plus. Ce sera fini pour nous d’espérer encore attirer un peu de monde avec les matchs du Mondial. » Consommation en recul de 30 % Une Coupe du monde décevante pour l’horeca ? « Oui, sur le plan économique, pour nous, c’est un pétard mouillé », assène Luc Marchal, président de la Fédération Horeca Wallonie. « On est très loin de l’engouement qu’ont suscité les Coupes du monde et d’Europe précédentes. Et les clients ne consomment pas autant que d’ordinaire. Les habitués partent lors des matchs et de l’arrivée des fans de football. » Erik Beunckens estime le recul de la consommation dans les bars à « 30 % en moyenne » et par endroits « à 50 % », avec « moins de clients, dans des cafés loin d’être pleins ». Et « les gens qui viennent dépensent moins ». [scald=29673654:sdl_editor_representation] Mais pourquoi donc ? Les polémiques sur les droits de l’homme et sur le respect de l’environnement au Qatar constituent une partie de la réponse. Mais surtout, souligne Luc Marchal, « la crise économique est là, ce qui se traduit par une consommation en baisse globalement de 30 % dans la restauration rapide et les restos moyens de gamme. Avant, les gens buvaient trois verres. Maintenant, c’est plutôt un seul. » Et puis, le sens de la fête propre au foot semble purement et simplement… absent ! « L’enthousiasme pour cette Coupe du monde est faible », confirme Erik Beunckens. « Depuis le début, les clients n’ont pas cru en notre équipe. On est à mille lieues de l’euphorie d’il y a trois ou quatre ans. » Ambiance glaciale A cela s’ajoute la période de l’année avec son temps humide et froid. « Ce n’est pas maintenant que l’on sort en t-shirt avec une bière à la main. » Pour Ludovic Comhair, c’est clairement la météo qui provoque ce manque d’intérêt pour la Coupe du monde dans les cafés. « Les gens n’ont pas la tête à ça. Ils se rendent dans les villages de Noël. Ou alors, ils préfèrent se rendre dans des lieux dédiés au foot sur grand écran plutôt que dans nos bars. » Dans des villages du foot ou… à la maison. « Les gens sont moins enclins à se rendre dans nos établissements. Ils regardent manifestement le foot entre amis chez eux, à en croire les audiences télé qui sont excellentes », souligne Luc Marchal, pour qui le froid n’empêche pourtant pas de sortir, « vu le succès que connaissent généralement les marchés de Noël ». Même dans les cafés d’ordinaire remplis grâce au foot, ce n’est pas la folie. « C’est certain que cette Coupe du monde a moins d’impact maintenant que si elle avait eu lieu en été », assure Hugues Herbinaux. « Ici, les étudiants préfèrent rester dans leur kot. » Ce week-end, annoncé comme glacial, risque de l’être aussi dans les bars...

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