En Chine, le zéro covid s’assouplit, pas la répression

Mi-novembre encore, le People’s Daily, quotidien officiel du parti communiste chinois, prévenait fermement que « le relâchement de la prévention et du contrôle (de la transmission du covid) augmenterait inévitablement le risque d’infection de groupes à risque », mettant en danger la santé et la vie de nombreux Chinois. D’autres publications officielles mettaient en avant l’immense risque que la multiplication des cas de covid longs faisait peser sur les pays occidentaux. D’où l’obligation de respecter une stricte politique zéro covid à base de tests incessants, de transferts forcés des personnes positives dans des centres de quarantaine, et de confinement de quartiers entiers. Mais, il y a quelques jours, Sun Chunlan, vice-première ministre en charge du covid, amorçait un sacré virage : « Vu le déclin de la pathogénicité du variant Omicron, la hausse du taux de vaccination en hausse et l’expérience accumulée en matière de contrôle et de prévention, la politique chinoise d’endiguement de la pandémie aborde une nouvelle étape, avec une nouvelle mission », via une « approche plus humaine ». Et vendredi, dans le Global Times , le professeur Chong Yutian expliquait qu’il n’y a pas de preuves scientifiques de l’existence de séquelles chez les malades guéris du covid. Bref, le terrible covid n’est plus aussi dangereux. [scald=29678759:sdl_editor_representation] Plusieurs grandes villes ont donc adapté leurs mesures : après Chengdu et Tianjin, Shenzen a aboli ce samedi la nécessité de montrer un test négatif pour pouvoir emprunter les transports en commun. Selon l’agence Reuters, Pékin devait suivre ce lundi : la capitale a déjà supprimé cette obligation pour entrer dans les supermarchés. Elle reste cependant de rigueur pour aller travailler dans les bureaux. Et ce samedi, le People’s Daily expliquait que Pékin a annoncé « de nouvelles mesures, plus pratiques » : les résidents ne devront plus s’enregistrer avant d’acheter des médicaments contre la fièvre ou le mal de gorge. Cette mesure, en application depuis près de trois ans, avait pour but d’éviter que des malades du covid se soignent en cachette. Toujours à Pékin, les autorités ont demandé aux hôpitaux de soigner les patients même s’ils ne pouvaient présenter de test PCR négatif de moins de 48 heures. Certaines catégories de personnes testées positives - 3e âge, femmes enceintes - pourraient aussi être mises en quarantaine chez elles et plus dans de grands centres. Traqués par caméras ou smartphone Tous ces légers assouplissements, qui semblent surtout des mesures de simple bon sens, ont été décidés juste après les nombreuses manifestations dénonçant, dans de nombreuses villes de Chine, les excès de la politique zéro covid et réclamant plus de libertés. Les autorités chinoises n’ont cependant jamais mentionné publiquement ces protestations citoyennes. Mais si, visiblement, les protestataires ont été entendus, les forces de l’ordre n’en continuent pas moins d’être déployées dans les endroits sensibles de façon à empêcher tout nouveau rassemblement. Dans ces zones, notamment à Shanghai, la politique zéro covid est toujours très strictement appliquée. Et de nombreux manifestants qui avaient laissé exploser leur ras-le-bol fin novembre ont déjà été contactés par la police ou ont reçu sa visite. [scald=29678760:sdl_editor_representation] Les plus audacieux, sortis sans masques, ont été identifiés grâce aux innombrables caméras et systèmes de reconnaissance faciale. Mais d’autres, plus prudents, qui portaient cagoules, casquettes et lunettes, ont également été pistés parce que leur téléphone a été enregistré par une des multiples bornes de surveillance installées dans l’espace public. La police les a donc interrogés sur leur participation aux rassemblements. Et, comme l’a expliqué un manifestant à un journaliste du New York Times, après ce premier avertissement, « il n’y aura pas de seconde chance ». Qui osera, dans ces conditions, encore manifester ? De nombreux internautes ont aussi partagé sur Twitter des vidéos montrant la police vérifiant, dans les smartphones, la présence de VPN (systèmes permettent de contourner la censure numérique, interdits en Chine) ou celle de messageries cryptées comme Signal ou Telegram, qui permettaient aux citoyens d’organiser ces protestations. « A travers la Chine, de nombreuses personnes ont pris des risques extraordinaires pour réclamer le respect de leurs droits », conclut Yaqiu Wang, chercheuse sur la Chine chez Human Rights Watch. « Les autorités ne devraient pas écraser ces protestations mais au contraire permettre à chacun d’exprimer pacifiquement ses opinions ». Pas sûr qu’elle sera entendue.

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