Gabriela Albergaria chez LMNO: un art qui s’enracine

Gabriela Albergaria, Making Soil, jusqu’au 28 janvier chez LMNO, 31 rue de la Concorde, 1000 Bruxelles, www.lmno.be Alors que bon nombre de galeries sont encore au repos, le petit espace de LMNO accueille depuis le 2 décembre le travail singulier de la Portugaise Gabriela Albergaria. De la rue, on aperçoit à la fois une série d’œuvres accrochées aux murs et un grand rectangle posé sur le sol. Une fois à l’intérieur, chaque élément révèle ses diverses facettes. Comme bon nombre d’artistes actuels, Gabriela Albergaria est fascinée par la nature et y trouve l’inspiration pour ses différents travaux. Mais chez elle, l’observation du dehors n’est pas un vain mot. Elle ne se contente pas de déambuler entre prés et forêts pour y saisir quelques images bucoliques. Elle observe, étudie, s’interroge sur la part naturelle du paysage et celle qui a été manipulée, transformée, adaptée par l’intervention de l’homme. Et plutôt que de témoigner simplement de ces altérations, elle propose un travail qui intègre directement ces changements, le faisant même parfois advenir sous les yeux des visiteurs. [scald=29779554:sdl_editor_representation] Pour cette première exposition personnelle en Belgique, elle s’est inspirée d’un texte de Wendell Berry, The Work of Local Culture. Dans celui-ci, l’écrivain évoque un vieux seau suspendu à une clôture sur un terrain qui fut jadis la ferme de son grand-père. Régulièrement, des feuilles mortes viennent s’y poser de même que des plumes d’oiseaux, des graines, des coquilles de fruits abandonnées par de petits animaux, des insectes… La pluie et la neige s’invitent aussi dans ce seau, transformant ces différents éléments en humus noir. Berry y voit à la fois le travail de la nature qui reconstruit inlassablement le sol où elle s’enracine et une invitation à l’imiter en construisant notre propre terreau humain à partir des histoires et de la mémoire de toutes les générations. [scald=29779556:sdl_editor_representation] Avec Making Soil (littéralement « faire de la terre ») Gabriela Albergaria fait de même dans ses dessins prolongeant des photographies prises dans la forêt. Si la partie photographique correspond à une réalité précise à un moment précis, la partie dessinée part de cette réalité pour créer un paysage imaginaire. Il en va de même avec l’étonnante pièce posée au sol de la première salle. Pour celle-ci, l’artiste a récolté de la terre dans les bois aux environs de Bruxelles. Elle en a fait de petits blocs posés les uns à côté des autres. Dès les premiers jours, on pouvait y voir différentes couleurs de terre, différentes qualités également. Mais il faut revenir régulièrement pour voir évoluer cette pièce : certains des cubes de terre contiennent en effet des graines de haricot appelées à se développer au fil des semaines. Les dimensions de l’ensemble sont directement inspirées par diverses mesures liées à l’utilisation intensive de nos sols. Un travail subtil et évolutif à découvrir dans une galerie pour laquelle le fond compte autant que la forme.

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