Nucléaire: la ministre Van der Straeten veut un système énergétique «climatiquement neutre»

La ministre de l'énergie Tinne Van der Straeten (Groen) a terminé son projet de loi sur le système énergétique du futur. Pour la ministre, il y a de la place pour la dernière génération d'énergie nucléaire, bien qu'elle pose une série de conditions à la construction éventuelle des réacteurs flexibles du futur. Pour rappel, fin 2021, le gouvernement fédéral a déjà décidé d'investir 100 millions d'euros dans la recherche sur les « Small Modular Reactors », des réacteurs nucléaires plus petits, plus propres et plus flexibles qui n'existent encore que sur le papier. Mais en principe, la loi de 2003 sur la sortie du nucléaire prévoit toujours la sortie définitive de la Belgique de l'énergie nucléaire, ce qui bloque  de facto le développement de cette nouvelle technologie dans notre pays.

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Au sein de l'opposition et de la majorité, des voix se sont donc élevées pour demander une modification de la loi de 2003, ne serait-ce que pour donner des certitudes aux investisseurs. Cinq propositions de loi – émanant de la N-VA, du MR, du CD&V, de l'Open VLD et des Engagés – sont en cours d'examen par la commission de l'énergie de la Chambre pour autoriser explicitement la construction de SMR, que ce soit ou non par le biais d'une modification de la loi sur la sortie du nucléaire. Les écologistes sont convaincus qu'il ne s'agit pas de la question pour l'instant. Ils se sentent soutenus en cela par le centre de recherche nucléaire SCK CEN, qui travaille déjà sur un prototype, et ce dans le cadre légal actuel.

Une autre voie

La ministre Van der Straeten a choisi une autre voie, en travaillant ces derniers mois sur un projet de loi relatif au système énergétique de l'avenir, plus large et neutre sur le plan climatique. Ce texte est maintenant terminé et a déjà été discuté pour la première fois au sein du conseil des ministres retreint (« kern »). Le ministre propose notamment de quadrupler l'énergie éolienne en mer d'ici à 2040, et souhaite également consacrer davantage d'efforts au stockage dans des batteries et à l'énergie solaire.

Mais l'énergie nucléaire a également sa place, a souligné Tinne Van der Straeten, qui souhaite envisager l'avenir énergétique avec « un esprit ouvert ». Cela inclut la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires de Doel 4 et Tihange 3 jusqu'en 2035, décidée précédemment, mais aussi la construction éventuelle de réacteurs SMR. Pour Tinne Van der Straeten, ces derniers devraient alors remplir six conditions. Par exemple, les centrales ne doivent pas produire de déchets radioactifs de haute activité et à longue durée de vie, ne doivent pas présenter de risque de prolifération nucléaire et doivent être flexibles et économiquement viables.

La ministre Van der Straeten souligne qu'il est difficile de prédire quelle source d'énergie s'imposera dans 10 ou 15 ans. « Ce qui est certain, c'est que quelle que soit la source d'énergie, elle doit être sans CO2 ni déchets à long terme, et abordable », dit-elle. Son avant-projet de loi « ouvre la voie à l'innovation et à l'investissement dans les énergies renouvelables et climatiquement neutres ». La ministre souhaite reconnaître et soutenir des « projets phares », en leur donnant une visibilité accrue. Elle souhaite également créer un Conseil supérieur de la transition énergétique composé d'experts indépendants afin de garantir le développement des connaissances et la sécurité des investissements à long terme.

Soutien de la majorité ?

La question est maintenant de savoir si la majorité peut soutenir le projet de la ministre. Le MR plaide depuis longtemps pour que cinq des sept réacteurs nucléaires restent ouverts plus longtemps. Début février, le gouvernement a décidé de faire étudier ce scénario pour Tihange 1, Doel 1 et Doel 2, dans l’optique d’assurer la sécurité d’approvisionnement électrique du pays, notamment pour les hivers 2025-2026 et 2026-2027 qui s’annoncent compliqués. « Continuer à insister sur la loi de sortie du nucléaire, c'est refuser la lumière du soleil », avait alors déclaré le président du CD&V, Sammy Mahdi.

Le N-VA réagit déjà de manière critique. Le député Bert Wollants qualifie le texte d'« imposture », car les SMR qui remplissent les conditions posées par la ministre dans son avant-projet de loi « sont loin d'être développés » et ne seront pas disponibles avant 2045, selon le spécialiste de l'énergie de la N-VA. M. Wollants appelle à des « décisions », notamment dans le cadre des négociations avec Engie sur la facture maximale pour l'élimination des déchets nucléaires. Ces discussions sont dans la dernière ligne droite, selon des sources au sein du gouvernement, bien que certains qualifient d'« ambitieux ».