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L’Europe : un village gaulois qui résiste face à l’intelligence artificielle ?

L’excès de réglementations européennes et le fameux RGPD sont-ils en train d’empêcher l’Europe et ses consommateurs d’utiliser l’intelligence artificielle (IA) ? Plusieurs informations récentes pourraient le laisser penser. En effet, Google et Meta (Facebook) bloquent l’usage de leurs nouveaux outils d’intelligence artificielle en Europe.
Carte blanche -
Par Jacques Folon, Professeur à l’ICHEC
Temps de lecture: 4 min

L’intelligence artificielle de Google, Bard, est disponible dans le monde entier. Heu… pas tout à fait, un village gaulois n’y a pas accès : l’Europe. En effet, Google a décidé que son intelligence artificielle ne serait pas disponible en Europe. Même si Google ne semble pas avoir publiquement expliqué les raisons de cette exclusion, il est clair pour les initiés que c’est un message envers les autorités européennes dont les innombrables réglementations limitent de plus en plus les possibilités d’utiliser l’intelligence artificielle.

Meta, la maison mère de Facebook avait également lancé son chatbot (intelligence artificielle conversationnelle) basé sur une intelligence artificielle. Et ici aussi les Européens ne pourront y avoir pas y avoir accès. On sait que Facebook fait l’objet de plusieurs actions liées à son non-respect du RGPD et fait face à des possibilités d’amendes très importantes. Et donc comment s’étonner du blocus mis en place par Meta et de cette réponse du berger à la bergère ?

ChatGPT avait déjà été banni d’Italie

Rappelons-nous qu’il y a quelques semaines, l’autorité de protection des données italienne avait suspendu l’utilisation de ChatGPT pour notamment soupçon de non-respect du RGPD. Après qu’Open.Ai avait apporté quelques modifications à sa politique de vie privée, l’autorité italienne avait fini par lever son interdiction. Néanmoins, d’autres interdictions sont possibles et les autorités européennes de protection de la vie privée ont récemment annoncé qu’elles étudiaient les relations entre intelligence artificielle et RGPD. L’autorité française, la CNIL, a d’ailleurs publié un plan d’actions à ce sujet promettant des contrôles.

À lire aussi Meta condamnée pour transfert illégal de données : une giga-tuile pour la « tech » américaine

Le fonctionnement même d’une intelligence artificielle générative, c’est-à-dire qui donne des réponses à des questions posées, se base sur la recherche de milliards de contenus sur internet ou dans ses bases de données propres. Or comme nous le disions récemment ici, le fonctionnement de l’IA pose des problèmes de non-respect de la propriété intellectuelle en recopiant des textes préexistants et, d’autre part, en ne respectant pas le RGPD, car des données personnelles circulent sans que les personnes concernées n’en soient informées.

Comme les intelligences artificielles conservent les contenus des questions et des réponses, et ce notamment afin de s’améliorer en continu, il est évident que des données personnelles peuvent circuler et ce sans que les personnes concernées en soient conscientes et donc en contradiction avec le RGPD.

Et de nouvelles règles européennes arrivent…

En effet, l’inflation législative ne s’arrête pas ! Un AI ACT (règlement ou directive souhaitant réguler l’intelligence artificielle) est en discussion aujourd’hui au sein des institutions européennes, et d’autres règles européennes concernent les grands acteurs et tentent de freiner leurs activités. On peut donc raisonnablement penser que l’exclusion de Bard en Europe est un message destiné aux autorités européennes au moment où celles-ci discutent de la façon dont elles veulent réglementer l’intelligence artificielle.

Le refus de rendre leurs outils accessibles aux Européens est un signe fort de la part de ces grands acteurs américains adressé aux autorités européennes. Les actions en justice et les plaintes contre les grandes plateformes américaines sont nombreuses, et en particulier depuis l’arrivée du RGPD.

La question est complexe car est-il possible, techniquement, de rendre une intelligence artificielle conversationnelle conforme au RGPD alors qu’elle collecte toutes les données disponibles et ce sans autorisation ? Comment, par exemple, respecter le droit des citoyens européens de savoir quelle donnée ces outils possèdent à leur sujet ?

Bref, une fois de plus, le monde change, les nouvelles intelligences artificielles arrivent, elles vont permettre de changer le monde, même si elles comportent quelques risques. Mais les autorités européennes, avec leur volonté de tout réglementer et de tout contrôler, risquent de transformer l’Europe en un village Gaulois bloqué définitivement au XXe siècle.

 

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1 Commentaire

  • Posté par DUHARD Jerome, mercredi 24 mai 2023, 9:53

    "...ne pourront y avoir pas y avoir accès..." ????

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