Venanzi: «Je rêve du titre pour le Standard tous les matins»

Le partage du Standard à Westerlo et le départ de Santini suscitent pas mal de questions en bord de Meuse. Sur la gestion du club, sur le mercato ou sur les ambitions du club. Un club qui depuis un an est sous la direction de Bruno Venanzi. En fait, le capitaine est réellement sur le bateau depuis la vente de Lampiris comme avoue un « insider ». Le propriétaire du club ne dit rien d’autres en acceptant de répondre aux critiques actuelles. Bruno Venanzi, nous rencontrons un président serein ou un président inquiet ? Serein, même si c’est très difficile de l’être dans ce club comme ce fut le cas après notre succès en Coupe. Depuis que je connais le Standard, cela remonte aux années 70, cela n’a jamais été calme à Sclessin. Cela ne le sera jamais. Et cela fait aussi son charme. Cela dit, ce n’est pas pour avoir de la sérénité que j’ai repris ce club. Je l’ai fait en sachant qu’il y aura des bons et des mauvais moments. Ainsi, j’aurais préféré gagner la Supercoupe et vaincre aussi à Westerlo. Ces derniers mois, j’ai été fort occupé par la vente de Lampiris et mes collègues ont été un peu livrés à eux-mêmes comme du temps de Roland Duchâtelet. Mais, dorénavant, je suis à 200 % pour le Standard et c’est à partir de maintenant que je vais imposer ma griffe. Avant j’étais président non actif. Maintenant je deviens plutôt président exécutif. Commençons alors par l’actualité récente avec le départ de Santini. Doit-on comprendre que le Standard avait encore besoin d’argent ? Ce n’est pas la raison. Evacuons le sujet financier. Dans l’exercice comptable 2015-2016, sans compter le transfert de Batshuayi à Chelsea, nous sommes plus ou moins à l’équilibre. Nous avons notamment bénéficié de la plus-value de la vente de Mpoku au Chievo (3,8 millions en janvier) ou encore de l’amende de 750.000 d’Al-Arabi dans le cadre du transfert avorté de Mpoku. Dans une version pessimiste, notre budget pour cette saison est établi autour de 26-27 millions avec une balance qui devrait être positive. Le budget est en baisse car nous avons encore baissé la masse salariale. Alors quelles sont les raisons du transfert de Santini ? Ivan est un chouette gars, toujours positif, qui a continué à se battre pour revenir quand on ne croyait plus en lui. Mais ce n’était pas une solution d’avenir pour le club. Nous avons reçu une proposition intéressante et lui était intéressé par le contrat que lui proposait Caen. Nous avons donc conclu le transfert d’autant que nous sommes persuadés d’avoir des jeunes qui peuvent relever le défi. On veut donner leur chance à Raman, Mbenza, Mmaee, voire Tetteh pour lequel on a des demandes de prêt. Mais, si on le loue, ce sera sans option d’achat car on croit en lui, même s’il n’est peut-être pas la priorité actuelle du coach. On estime que, chez ces jeunes, il y a plus de potentiel d’avenir que chez Ivan. Mais je comprends que ce départ marque les esprits grâce à son but symbolique en finale de la Coupe. Cela ne traduit-il pas un manque d’ambition du club à court terme ? C’est peut-être comme cela que cela a été ressenti. Mais, en tant que président, je dois voir à court, moyen et long terme. Je ne suis pas au Standard pour être un président populaire qui écoute toujours l’avis des fans. Je dois prendre parfois des décisions qui sont difficiles à accepter par les supporters. Et cela me fait mal aussi. Mais je veux que le club progresse. Cela semble contradictoire avec la volonté de jouer le titre ? N’est-ce pas mettre une pression exagérée en voulant être champion cette saison ? Si tu ne sais pas vivre avec cette pression, il ne faut pas venir entraîner, joueur ou diriger au Standard. Je ne suis pas naïf. Je sais que le titre sera difficile à obtenir, mais cela doit être un objectif comme il doit l’être chaque saison en sachant qu’on ne l’aura pas chaque année. Et je suis d’accord de dire que c’est plus raisonnable d’affirmer qu’il faut viser le Top 3 et être absolument dans les Playoffs 1 en sachant que tout peut s’y passer. J’en suis conscient. Il est évident qu’on vient de loin et qu’il faut du temps, mais je ne veux qu’une chose pour le Standard : c’est le titre. J’en rêve tous les matins même quand je ne me rase pas. Donc, pour en revenir à Ivan, ma ligne directrice n’est pas à court terme. C’est une décision prise en pensant que c’est la meilleure à moyen et long terme et en donnant une chance aux jeunes. C’est alors un changement de philosophie car on n’a pas vraiment senti une volonté de faire confiance aux jeunes à Bruges et à Westerlo. Soyons réalistes, on ne peut pas faire confiance à tous les jeunes. Et nous n’avons pas tapé du poing sur la table pour que ce soit le cas à partir de maintenant. Oui, Ryan Mmaee n’était pas repris. Or, un de ses grands défenseurs est Yannick Ferrera. Mais il attend qu’il se donne à 200 % à l’entraînement. C’est une philosophie que nous partageons aussi avec Daniel Van Buyten. Je pense que, maintenant, Ryan a compris qu’il a une belle opportunité de montrer son talent. Mais vous pourriez freiner son épanouissement en engageant un autre attaquant puisqu’Yattara et Emond ne sont plus dans le noyau ? On cherche des solutions pour Yattara. Emond est lui aussi déçu, mais cela peut aller très vite. En janvier, Santini était “banni”… Si on reçoit des propositions, on analysera cela avec lui. On regarde le marché évidemment et tout peut aller vite. Par exemple, le transfert de Raman s’est réalisé en 24 heures. Je ne sais pas si on va en engager un autre attaquant, mais je peux assurer aux supporters qu’on va encore renforcer l’équipe d’ici la fin du mercato. Ainsi, on cherche encore à mettre de la concurrence à Trebel avec un élément qui joue en 10 ou en 8 en étant un rien plus offensif qu’Adrien. Que ce dernier reste ou pas à Sclessin. Cela dit, le concernant, j’ai refusé une offre de Guangzhou de 5 millions et une autre d’Allemagne de 2,5 millions. On sonde aussi le marché pour un défenseur central. Pourtant on s’attendait à un mercato calme en pensant que l’essentiel avait été réalisé en hiver. Comme si c’était difficile d’avoir de la stabilité au Standard ? Ce n’est quand même pas un mercato “d’excités”. A part Santini, cela a été plutôt calme. Dans un mercato habituel, on perd 4 ou 5 joueurs. Oui, mais en entrées un Touré n’est pas dans le noyau par exemple ? Quand Ezekiel est arrivé, il n’était pas dans le noyau durant les trois premiers mois… On a pourtant l’impression que la volonté est plus de dégraisser… Si d’autres joueurs partent, ils seront remplacés par du meilleur. Je lis qu’on évoque des départs d’Arslanagic et d’Hubert mais ils sont toujours sous contrat. On sait qu’ils ont très envie de jouer et c’est positif. Mais ils ont de la concurrence et c’est normal dans un club comme le Standard. J’entends la déception de Guillaume d’être sur le banc mais il doit aussi comprendre qu’il n’a jamais que 10 matchs en D1 et qu’il doit se battre pour mériter sa place. On n’a pas pris quelqu’un de 27 ans pour ne pas lui mettre des bâtons dans les roues, mais un de 37 ans qui a de l’expérience, qui peut lui apprendre des choses et le faire progresser quitte à prendre sa place dans les prochains mois. Mais, depuis le départ de Santini, les supporters craignent surtout des transferts de Dossevi et Trebel ? Je crois pouvoir affirmer après discussions avec Dossevi qu’il n’entre pas dans ses intentions de partir. Et il n’entre pas dans les miennes de le laisser partir. Je ne peux pas être plus clair. Trebel, lui, a toujours dit qu’après deux ans il souhaitait découvrir de nouveaux horizons. On en a discuté, mais il est toujours sous contrat. Et je le répète, j’ai déjà refusé des offres pour lui… Mais Dossevi n’a pas été rassurant en disant après Bruges qu’il fallait renforcer l’équipe et ne pas faire des paris ? Oui, il me l’avait déjà dit. Ce n’est pas inquiétant. C’est même positif car cela montre son état d’esprit, son envie de gagner et de progresser. Ce que je lui ai dit sur notre volonté de faire des recrutements l’a réconforté dans son choix de rester. Venons-en au terrain proprement dit : le Standard évite la défaite à Westerlo et on parle déjà de l’avenir de Ferrera ? Ce sera toujours le cas au Standard. Dès que tu ne fais pas deux bons résultats, l’entraîneur est remis en cause. Même en gagnant neuf matchs d’affilée, Luzon a été critiqué. Yannick a tout mon soutien, c’est clair… C’est toujours inquiétant quand un président dit cela. Oui, c’est vrai, mais alors comment le dire différemment ? Je sais que ce n’est pas facile d’être coach du Standard surtout après les résultats obtenus à Bruges et à Westerlo. Du coup, la pression est déjà là, mais Yannick y est habitué et il doit vivre avec. Il n’était pas encore arrivé qu’on parlait déjà d’un autre entraîneur. Comme moi, il n’est pas là pour être populaire. Mais la direction est divisée à son sujet ? Ce n’est pas un secret, mais c’est valable aussi pour certains joueurs sur lesquels Olivier Renard est enthousiaste et Daniel Van Buyten moins. Et vice versa. Et il y a des joueurs que j’adore qu’Yannick ne fait pas jouer. Oui il y a des avis tranchés. Si Ferrera est toujours là, c’est parce que son dernier défenseur est Bruno Venanzi ? Je ne suis pas son dernier défenseur, mais un de ses derniers défenseurs. Maintenant, on a joué contre Bruges qui est la seule équipe prête à l’heure actuelle à disputer le titre. On ne peut pas tirer de conclusions de ce match même à 10 contre 11. Puis, après avoir bien joué pendant 25 minutes, tu t’effondres de manière incompréhensible pendant une heure à Westerlo. Je le regrette évidemment. Mais on ne va pas tout remettre en cause après un match. Ce n’est pas facile, mais il faut parvenir à prendre du recul en fonction de certains résultats. Maintenant, c’est clair qu’on ne peut pas se permettre de prendre un point sur quinze. Cela veut-il dire que le coach joue sa tête sur les quatre prochains matchs ? Cela veut dire que tout entraîneur du Standard qui perd cinq fois de suite est sujet à question. Mais c’est la même chose dans tous les clubs. Si Vanhaezebrouck perd cinq fois d’affilée, on se demandera aussi ce qui se passe à Gand. Pareil pour Preud’homme. Oui, mais vous avez viré Muslin après un sept sur quinze ? Nous ne l’avons pas remercié pour le 7 sur 15, mais parce qu’il n’y avait aucune discipline dans le vestiaire. Cela partait dans tous les sens, il n’y avait aucune rigueur à l’entraînement, aucune ligne de conduite. Mais je ne veux pas le blâmer car il était arrivé dans un club que je venais de reprendre alors qu’il avait été choisi par le président précédent. En plus, il y avait des joueurs compliqués et il avait eu une altercation avec Mujangi Bia. On a donc agi car on a pensé, surtout après le match à Molde, que la situation allait empirer. Van Buyten est le numéro deux du club mais il a un rôle de plus en plus critiqué ? Sans prétention aucune, énormément de gens ont envie de travailler au Standard en pensant qu’ils feraient du meilleur travail que les gens en place. Daniel est critiqué. C’est normal. C’est un nouveau métier pour lui et il apprend très vite. Il conseille fantastiquement bien les jeunes grâce à son vécu. Mais il veut avancer trop vite et oublie parfois qu’il y a des procédures à respecter. Quand on veut amener un test, il ne suffit pas de faire venir le joueur. Les ressources humaines doivent être au courant, il faut s’arranger pour le logement, les assurances… Au début, c’était un test, arrive demain et voilà… Il a donc fallu mettre tout cela en place car cela génère du travail pour tous les collègues. Mais, quand c’est bien fait, cela peut déboucher sur des Ezekiel ou Miya. Maintenant, je suis peut-être le premier responsable de ne pas lui avoir expliqué la manière de faire car je n’étais pas souvent là. Ce n’est plus le cas. On lui reproche, notamment, de diriger les jeunes de l’Académie vers Christophe Henrotay qui était son agent ? C’est un faux procès. Déom, par exemple, était chez lui avant que je ne sois président et que Daniel arrive. Ce n’est un secret pour personne que Christophe est un ami de Daniel et de moi. Il m’a aidé pour le transfert de Dossevi, Yatabare, Maniatis, Laifis et Boschilia, mais il ne possède actuellement aucun joueur de l’équipe première. Qui plus est, à part Laifis, son implication dans le mercato estival est nul : Gillet, Cisse, Raman, Touré ou Mbenza ce n’est pas lui mais d’autres agents. Pareil durant l’hiver où le nom Henrotay n’était lié qu’à Dompé. Mais c’était son père. Evidemment, à cause de nos liens, les autres agents qui ne réalisent pas de transactions avec nous prétendent qu’ils ne peuvent pas travailler au Standard et ont peur qu’il prenne tous les talents de l’Académie. Arrêtons de fantasmer. Pour en revenir à Van Buyten, avez-vous l’intention de continuer avec lui alors que son « gros » contrat se termine à la fin de la saison ? On fera le point après deux ans. Je ne regarde pas ce qu’il me coûte, mais ce qu’il me rapporte. Il est là pour m’aider à bien comprendre le monde du foot, à créer un réseau, à remettre l’Académie à la place qu’elle doit être. Et n’en déplaise à certains, il le fait avec un certain succès. Et ce serait stupide de se passer de sa connaissance dans les transferts car il a indéniablement le talent pour repérer un bon joueur. En plus, il travaille ensemble avec Olivier Renard. Daniel a du recul alors qu’Olivier est dans le quotidien. C’est lui qui négocie les transferts, les salaires, prend les contacts avec les directions, sort les joueurs. S’il y a redondance pour étudier la qualité d’un joueur, elle est à mes yeux positive. Néanmoins, cette manière d’agir est à la base de l’existence de deux clans dans les hautes sphères du club. N’est-il pas temps de sonner la fin de la récréation ? Il faut relativiser tout cela. On ne peut jamais être d’accord sur tout. Et je ne veux pas d’une voix monotone où tous me disent “Oui, c’est bien président, il faut faire comme cela”. C’est plus intéressant si chacun donne clairement son avis. Et c’est le cas. Et parfois ils ne sont pas d’accord, c’est vrai. Alors, c’est à moi de trancher. Peut-être que ces derniers mois, avant la vente de Lampiris, je ne le faisais pas suffisamment. Dorénavant, je suis là pour taper du poing sur la table et donner des lignes directrices plus claires. Le Standard de Venanzi commence maintenant.

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