Ivan De Witte: «100 millions pour le prochain contrat TV !»

Ivan De Witte nous a reçus longuement, dans une loge de la Ghelamco Arena, pour évoquer le match de ce samedi soir à Charleroi mais aussi l’actualité du football belge. Président, votre équipe va rendre visite à un Sporting devenu pour vous une sorte de succursale. Après Milicevic, Coulibaly, Ndongala et Perbet, quel sera le prochain Zèbre à devenir Buffalo ? Ecoutez, il se fait simplement que la nouvelle gestion du Sporting est excellente. Mehdi Bayat et son staff ont l’art de trouver de bons joueurs et les excellents contacts entre les deux clubs facilitent les choses. Grâce, en partie, à Mogi Bayat, qui est aussi l’agent, entre autres, de Hein Vanhaezebrouck ? Mogi joue, et bien, son rôle de manager important, mais c’est avant tout une relation de club à club. Satisfait de vos recrues carolos ? Oui. Milicevic est une réussite, Coulibaly va peut-être jouer davantage cette saison, Perbet nous a déjà rapporté 2 points contre Genk et Ndongala m’a séduit, la saison dernière. C’est vous, personnellement, qui avez voulu le recruter ? C’est une décision collégiale mais disons que j’ai beaucoup insisté tant j’apprécie son jeu, tout en vitesse et en technique. En arrivant à la Ghelamco, on est frappé de voir une immense photo de Pollet sur la façade, alors qu’il ne s’y est pas imposé… Il n’a pas réussi chez nous. Il ne s’est pas adapté au système mais possède des qualités. Et c’est un très gentil garçon. Voilà deux ans et demi que vous n’avez pas battu Charleroi. Si vous perdez 1-0 sur un but de Pollet, ce sera spécial ? Non. S’il connaît à Charleroi la réussite qui l’a fui ici, je dirai que c’est la vie. Je n’ai vraiment aucun sentiment négatif envers lui. En fait, l’atmosphère est toujours très positive quand nous jouons là-bas. Je pense d’ailleurs que les fans carolos réserveront un bon accueil à Perbet. En revanche, je peux vous dire que nous avons décidé de mettre fin à cette série noire. Mais ce ne sera pas facile car elle ne doit rien au hasard. Felice Mazzû a su trouver les solutions pour contrer le système particulier de Hein Vanhaezebrouck. Le voilà donc, votre prochain Carolo ! Felice Mazzù ! Je reconnais qu’il m’impressionne, tactiquement. Mais mon but est de garder Hein jusqu’au terme de son contrat, en juin 2018. Il y a eu des rumeurs cet été, notamment au niveau des Diables. Franchement, il y a eu des contacts ? Presque pas… Ah bon ? Donc, il y a eu quelque chose ! Initié par Hein ou par la fédération ? Je m’en tiens à ma réponse : presque pas… Hein est un homme stable, avec des engagements forts. Il avait promis de rester et il avait en tête de rester. Même s’il y a eu des rumeurs, il est toujours là. Jusqu’en 2018, j’en suis persuadé. Dimanche, vous avez suivi le match contre Genk aux côtés de Roberto Martinez. Mais, tout d’abord, que pensez-vous du licenciement de Marc Wilmots ? Il a fait de bonnes choses mais j’ai le sentiment qu’il était arrivé à un point mort. Il l’a bien senti lui-même. Il était peut-être trop focalisé sur l’atmosphère du groupe et trop peu sur la tactique et la méthodologie, par rapport par exemple à Antonio Conte, le sélectionneur italien. Michel Preud’homme n’aurait pas pu cumuler ? Non. Il en avait déjà été question quand il entraînait La Gantoise mais nous avions refusé. Pour une question d’emploi du temps et de conflit d’intérêts, au moment de sélectionner tel ou tel joueur. Michel était le candidat le plus adapté mais c’était impossible. Revenons-en donc à votre soirée de dimanche, avec Roberto Martinez… On a pas mal discuté pendant le match et il m’a impressionné par sa personnalité. Il a manifestement une bonne vision du football. A première vue, c’est un très bon choix. Il vous a parlé de joueurs, comme Kums ou Depoitre ? Non. Mais il a pris beaucoup de notes. Il a trouvé le match excellent et m’a confié être impressionné par le rythme, lui qui vient pourtant de Premier League ! Il était surpris ? Surpris, je ne dis pas. Mais impressionné ! Par le match mais aussi par le stade, et par l’accueil… Vous parliez de conflits d’intérêts concernant Michel Preud’homme. Mais quid de Bart Verhaeghe, président du Club et puissant premier vice-président de l’Union belge ? Je ne peux pas nier qu’il y a, là aussi, un conflit d’intérêts. Mais je fais confiance à l’homme pour bien gérer la situation. Il est vraiment l’homme le plus adapté pour ce job, avec ses compétences et son expérience. Quand on fait la balance, le positif l’emporte. Même si, dans une société professionnelle privée, cette situation ne serait pas possible. Il n’y a pas si longtemps, vous étiez en profond désaccord car le Club avait attaqué le financement de votre Ghelamco Arena. Je n’avais pas aimé ce que j’avais lu. Vous savez, la Ville de Gand nous a facilité les choses mais nous payons ce que nous devons, de manière normale. Roger Vanden Stock et Pierre François ont joué les intermédiaires entre nous et il y a eu une explication profonde et sincère. On s’est parlé et la sagesse l’a emporté. Il le fallait, pour éviter que les supporters des deux clubs s’enflamment. Mehdi Bayat prend également de plus en plus de poids dans les instances fédérales. Je m’en réjouis. C’est une bonne chose qu’un dirigeant de Wallonie prenne une position de plus en plus forte. Cela va aussi dans le sens, positif, d’une plus grande influence des professionnels. Il est temps de réfléchir au rôle de toutes les parties. Je pense que, tout comme les sanctions, le calendrier devrait dépendre exclusivement de l’Union belge, et plus de la Pro League. Tout en installant pour cela, au sein de la fédération, un département spécifique pour le football professionnel. La Pro League, elle, doit se concentrer essentiellement sur les intérêts des clubs, la situation vis à vis des ministères et des licences, et les droits TV. Les droits TV, justement, parlons-en ! Ceux de la Premier League ont explosé, pour atteindre 2,3 milliards d’euros par an. Ceux de la Bundesliga viennent de quasiment doubler, passant de 817 millions à 1,4 milliard. Le contrat de la Pro League ne court plus que sur un an. Comment voyez-vous les choses ? Il faut suivre le mouvement, à notre échelle ! Quand je présidais la Pro League, les droits TV étaient de 35 millions et tout le monde a ri quand j’ai parlé de 50. On a franchi cette barre et je dois dire qu’à l’époque, Roger Vanden Stock et Lucien D’Onofrio, dans son rôle de contre-feu, m’ont bien aidé. Mais là, le prochain contrat doit être de 100 millions par saison, afin de mieux aider les clubs, notamment sur le plan des infrastructures. Vous y croyez ? Bien sûr ! Le produit a vu sa valeur augmenter. Le football belge de clubs vient de dépasser les Pays-Bas pour bondir à la 9e place de l’indice UEFA. Et le classement Fifa de notre pays est également un argument. Si on ne se fixe pas cet objectif de 100 millions, on n’y arrivera jamais. Cela dit, je ne suis pas sûr que le contrat passé avec MP&Silva, qui doit elle-même même vendre le produit aux chaînes, soit une bonne chose. Mais il faut en tout cas lancer les négociations dès maintenant ! Et se pencher aussi sur une réforme de la réforme ? C’est bien d’être passé de 34 clubs pros à 24. Mais 16, c’est encore beaucoup pour la D1A. Et 8, c’est peu pour la D1B. Mon idée, vous le savez, c’est 14 en D1A et 10 en D1B. Mais 12-12, avec des playoffs, ça me va aussi. L’idée fait son chemin et rassemble de plus en plus de partisans. Et si vous me dites que je rêve, on me le disait aussi lorsque je voulais voir la D1 passer de 18 à 16 clubs. Ce serait pour quand ? J’espère qu’il y aura un accord cette année, afin de lancer la nouvelle formule dès la saison 2018-2019. Si atteint les 100 millions de droits TV, ce sera plus facile à obtenir, en aidant davantage la D1B dont la situation, à 8, ne sera pas tenable longtemps. En juin 2017, on élira un nouveau président fédéral. En 2015, Joseph Allijns, représentant les professionnels, avait été battu de justesse par François De Keersmaecker. Vous espérez que le prochain président sera issu de la Pro League ? Et qu’il s’appellera peut-être Bart Verhaeghe ? Etre vice-président ou président fédéral, c’est très différent. En 2015, Joseph Allijns aurait quitté Courtrai s’il avait été élu. Bart Verhaeghe ne serait pas prêt à quitter Bruges. J’espère que le futur président viendra du monde professionnel mais il ne faudra pas qu’il soit attaché à un club. D’ici là, on saura si le stade national, ou stade d’Anderlecht, est autre chose qu’un mirage… J’espère qu’il deviendra une réalité mais le temps avance… J’y crois, même si ça devient difficile. Il faut deux ans pour construire un stade. Heureusement, Ghelamco connaît le métier ! Mais je ne suis pas certain qu’Anderlecht soit encore très chaud pour le moment. Et sans club, le projet ne tient pas. Mais il n’est pas exclu que les discussions reprennent très vite, sur d’autres bases financières. Pour La Gantoise, le titre est digéré ? Oui. C’était inattendu, tout comme notre parcours en Ligue des champions, qui nous vaut un respect national et international. Le but, maintenant, c’est de se stabiliser dans le top 3, avec un budget qui descend de 60 à 35 millions, sans la Ligue des champions. Pour le titre, Bruges reste le favori et Anderlecht va se remettre dans la course. L’agrandissement du stade reste prévu ? Faire passer la Ghelamco Arena de 20 à 25.000 laces, ça coûte 7 millions. Nous l’envisageons dans les trois ans, si nous continuons à refuser du monde… avant cela, notre nouveau centre d’entraînement devrait voir le jour en juillet 2017. Avec toujours Ivan De Witte à la présidence, alors que vous avez fêté vos 69 ans le 9 juin dernier ? J’avais décidé d’arrêter en 2019, après 20 ans de présidence. Seuls Roger Vanden Stock (Anderlecht, 1996) et Roger Lambrecht (Lokeren, 1994) sont plus anciens que moi. Mais on n’a pas encore trouvé mon successeur et tout le monde, ici, me demande de rester. En fonction des circonstances, ce n’est pas exclu…

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