La justice de paix sous pression en Wallonie
Les sièges « excédentaires » de justice de paix vont être supprimés. Ce sera surtout le cas en Wallonie, plus rurale que la Flandre.

Il y a en Belgique 187 justices de paix et autant de juges : c’est trop, beaucoup trop, estime le gouvernement fédéral. Qui a donc décidé de mettre de l’ordre dans ce morcellement. Cette rationalisation, prévoit l’accord d’octobre 2014, aura lieu en trois phases et la première, qui consiste à fermer les sièges surnuméraires, est en cours. Au risque de froisser des élus locaux.
De quoi s’agit-il ? Certains cantons, en zone rurale notamment, comprennent plusieurs sièges (il y a 229 sièges pour 187 cantons), ce qui a pour avantage d’instaurer une vraie justice de proximité mais pour inconvénients de multiplier les infrastructures et d’imposer aux juges de nombreux et coûteux déplacements. Dans les mois, sinon les semaines qui viennent, il est donc prévu de supprimer ces sièges excédentaires afin de n’en conserver qu’un par canton. Mais que supprimer et que conserver ? Etant entendu que de nombreux bourgmestres se sont attachés à cette justice de proximité et préfèrent par conséquent qu’elle soit rendue dans leur commune plutôt que dans l’entité voisine. Etant entendu aussi que la Wallonie, plus rurale, sera davantage affectée : sur les 42 sièges à supprimer, 26 se trouvent en Wallonie et 16 en Flandre.
Des trajets de plus de 50 km pour rencontrer son magistrat de proximité
Dans le Brabant wallon, par exemple, il semble acquis qu’André Antoine (CDH), bourgmestre de Perwez, doive renoncer à son siège de justice de paix au profit de la commune voisine de Jodoigne et de son bourgmestre MR, Jean-Paul Walh. En province de Liège, la logique voudrait que soit supprimé le siège de la petite commune d’Aubel (MR) pour ne conserver que celui de Limbourg (PS) : cela passera-t-il comme une lettre à la poste ? Et pas loin de là, le siège de Herve, commune du réformateur Pierre-Yves Jeholet, se justifie-t-il encore alors que Verviers n’est qu’à une dizaine de kilomètres ? A l’est de la province, la cohérence voudrait que soient condamnés les sièges de Stavelot (MR) et Malmedy (CDH) pour ne conserver que celui de Spa (MR) mais cette réforme obligerait les Malmediens à parcourir plus de 20 kilomètres pour rencontrer leur magistrat de proximité. Même souci en province de Namur où la fermeture du siège de Gedinne (MR) imposerait à certains habitants des trajets de plus de 50 km pour se présenter à la justice de paix de Dinant. Dans le canton de Florennes-Walcourt par contre, c’est la vétusté des deux bâtiments qui pose problème et une solution proposée est un déménagement vers Dinant.
Et dans la province de Luxembourg, qui va trancher entre Bastogne et Neufchâteau, deux communes CDH ? Un choix d’autant plus difficile que si le contentieux est forcément plus grand à Bastogne, qui compte le double d’habitants que sa voisine, c’est à Neufchâteau que siègent le tribunal de Première instance et le tribunal de Police.
Bref, en l’absence de critères objectifs, il est à craindre que tous les bourgmestres ne voient pas cette réforme avec le même enthousiasme et que dans les zones les plus rurales, certains habitants en ressortent frustrés. Reste que, sur le principe et dans une certaine mesure, même les juges de paix sont demandeurs d’une rationalisation et d’une meilleure répartition de la charge de travail. « Il n’est pas nécessaire d’avoir une justice de paix dans chaque village, concède ainsi Thierry Marchandise, ancien procureur du Roi de Charleroi, ancien juge de paix et administrateur de l’Association syndicale des Magistrats. Faut-il, par exemple, maintenir un siège à Merbes-le-Château, qui ne compte que 4000 habitants ? »
Le projet de loi dans lequel figurent ces dispositions a été validé par le conseil des ministres et soumis au Conseil d’Etat, lequel devrait vraisemblablement rendre son avis cette semaine.
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