Mondial hommes à Doha: l’arc-en-ciel tant convoité au pays où il ne pleut jamais

La chaleur ? Un Norvégien chez les espoirs, un Danois, chez les juniors ont été sacrés champions du monde au bout d’un sprint massif mercredi et d’un bel effort en solitaire vendredi sur le circuit de Doha. Le paramètre de la canicule maintes fois exploré cette semaine, à bon ou mauvais escient semble donc davantage reposer sur un effet de manche, soit pour tromper l’adversaire, soit pour anticiper un échec et lui trouver une excuse directement liée à la météo. Quant au circuit, très technique, il peut être interprété autrement que sur la partition présentée par tous les ténors, celle du sprint massif. Selon beaucoup de concurrents qui étaient dans la fournaise espagnole au mois d’août, il faisait bien plus chaud sur les parcours autrement exigeants de la Vuelta. Mais s’il fallait trouver un avantage à cette température élevée, c’est sans doute son impact sur les hommes qui n’auront pas mis toutes les chances de leur côté en débarquant à Doha. Celui qui vise le titre mondial sait depuis trois ans qu’il se disputera sous la canicule, sur un terrain plat, sur un circuit propice à un sprint massif. C’est limpide comme le cristal servi au vainqueur par Eddy Merckx depuis le début des hostilités, dimanche dernier. [scald=2424336:sdl_editor_representation] Privée d’un pur sprinter, la Belgique ne part pas favorite Et si les athlètes ont peut-être, allez savoir, minimisé l’impact des conditions climatiques sous prétexte que le parcours ne nécessitera pas beaucoup d’efforts, ils vont le payer au grand comptant et rapidement. Tom Boonen n’hésite pas à dire qu’il s’agira peut-être du championnat le plus exigeant de sa carrière en sachant qu’il abordera son onzième rendez-vous arc-en-ciel. Les 150 premiers kilomètres en ligne (une première historique dans le cheminement des Mondiaux) pourraient décider de la course, bien avant la conclusion au Pearl de Doha. Car si, comme en rêvent les Belges et les Néerlandais, entre autres, l’affaire devait déboucher sur des bordures en fonction des changements de direction, du vent et de la course, les retardataires à l’approche du circuit ne pourraient en aucun cas être doublés, ce qui est parfaitement possible compte tenu du profil. Cela, c’est pour le scénario rêvé par les organisateurs et les équipes qui ne possèdent pas forcément un finisseur de la trempe de Cavendish ou de Gaviria. Et on pourra compter sur les Belges afin de limiter le tour de… chauffe à sa plus simple expression dès le kilomètre zéro. D’autant que dans cette équipe nationale figurent quelques éléments de l’équipe Etixx, d’autres de Lotto qui sont rompus aux éléments le plus souvent cités au Qatar. Cette évidence en génère toutefois une autre, plus stratégique encore : Etixx, Lotto sont aussi les employeurs de Kittel (Allemagne), Gaviria (Colombie) ou Greipel (Allemagne), soit trois favoris en puissance pour le maillot arc-en-ciel. Ces coureurs-là connaissent par cœur la tactique belge, ils pourront deviner à n’importe quel moment la formation d’une bordure. Privé d’un pur sprinter depuis que Boonen a cessé d’en être un, fin 2006, soit au bout de sa campagne la plus riche (21 bouquets avec le beau maillot arc-en-ciel), la Belgique pourra certes jouer un rôle mais ce n’est pas elle la favorite. Parce que la France, par exemple, privée du titre depuis 1997 (un bail avec Brochard à Saint-Sébastien) possède deux snipers, Démare et Bouhanni, qui ne se quitteront pas d’une chaussure par crainte que l’autre gagne. Depuis deux ans, c’est la guerre froide entre les anciens de la FDJ, Bouhanni ayant dû migrer chez Cofidis. Pour se prémunir de tout reproche, le sélectionneur Bernard Bourreau a choisi des Cofidis et des FDJ. Personne d’autre. Chacun son train. « Il est inenvisageable que j’emmène le sprint pour Bouhanni et vice-versa si nous devions encore être ensemble à la flamme rouge », s’est ainsi exprimé Arnaud Démare, qui avait commencé sa carrière chez les pros en remportant son premier bouquet sur la Corniche de Doha. Cette rivalité à l’intérieur même de l’équipe de France renforcera inévitablement les Bleus qui ne céderont rien. Chez les Allemands, on ne parle pas avec la même véhémence mais personne n’imagine Greipel emmenant Kittel et vice-versa pour paraphraser Démare. D’autant qu’un troisième larron, certes victime d’une saison pourrie, Degenkolb, sera aussi de la partie. Les Allemands, par rapport au classement UCI, ne sont ainsi que six mais possèdent trois chances, réelles, de titre ! Faut-il toutefois préférer la richesse individuelle au sein de la même sélection ou l’équipe qui protégera un seul leader ? On prétend souvent, en cyclisme, qu’il est préférable de posséder une deuxième cartouche au cas où il arriverait malheur au leader (ce qui est parfaitement envisageable au Qatar par rapport aux chutes et aux crevaisons). Mais les éléments prétendument isolés, comme Gaviria, Sagan, Kristoff (un Scandinave !) et Cavendish sont peut-être, au regard de leur saison, de leur talent, de leur fraîcheur, davantage favoris que leurs homologues. Quelle que soit leur issue, ces Mondiaux ont au moins le mérite, malgré l’absence d’un pont de chemin de fer voire d’un talus, de générer du suspense, voire une grosse attente. Ils pourraient être, pour le même prix, soporifiques, comme ceux de Copenhague, les derniers à avoir sacré un sprinter, Cavendish en l’occurrence.

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