Vivaqua: «Il faut redéfinir notre stratégie»

La semaine dernière, la fusion des intercommunales Vivaqua et Hydrobru a été signée par l’ensemble de leurs communes actionnaires. Le président de Vivaqua, Yvan Mayeur (PS), bourgmestre de la Ville de Bruxelles, explique pourquoi cette fusion était selon lui indispensable. Pourquoi fallait-il fusionner Hydrobru et Vivaqua ? La fusion était indispensable dans un souci de rationalisation et de cohérence entre la production et la distribution de l’eau et aussi de l’assainissement de l’égouttage. Une problématique considérable à Bruxelles. Dans l’immédiat, Hydrobru a obtenu un emprunt auprès de la BEI (la Banque européenne d’investissement) de 500 millions d’euros pour investir dans la rénovation de tous ses égouts de la Région. Cet emprunt devait donc être garanti par la Région, ce qui est fait, mais surtout il devait y avoir un ratio de fonds propres à l’intérieur d’Hydrobru qui permette de donner un effet de levier à cet emprunt. Et sans ces fonds propres, Hydrobru ne pouvait pas activer cet emprunt. [scald=2464647:sdl_editor_representation] Et donc Vivaqua apporte ses revenus et son chiffre d’affaires. C’est ça. Et permet du coup d’activer progressivement les 500 millions à mesure de la nécessité d’utiliser l’emprunt pour financer ces travaux. Les observateurs du secteur s’attendent quand même à ce que le prix de l’eau doive à terme augmenter. Et la Région a désigné en juin Brugel comme organe indépendant chargé de fixer le prix de l’eau sur la base du coût-vérité. Oui, à notre demande. Je sais que ça fait polémique avec Madame Fremault (la ministre bruxelloise CDH chargée de la politique de l’eau, NDLR), mais c’est le secteur qui a proposé qu’il y ait un régulateur indépendant qui fixe le prix de l’eau. D’accord, mais on est dans un contexte de gros investissements et de perte de revenus. Vivaqua elle-même sur son site web montre que le prix de l’eau est moins élevé à Bruxelles que dans les autres grandes villes belges. On peut donc s’attendre à une augmentation des prix… Avant de se lancer dans cette opération-là, il faut d’abord redéfinir notre stratégie. Nous avons une difficulté supplémentaire qui est qu’à partir de 2019, un gros contrat qui nous liait à la Flandre va nous faire perdre une capacité de vente de l’eau et un potentiel de recettes. On sait que le chiffre d’affaires à partir de 2019 va être affecté par ce contrat qui a été signé sous la législature précédente. C’est pour ça que j’en appelle à une redéfinition de la stratégie de Vivaqua, en concertation avec le secteur public de l’eau en Flandre et en Wallonie. Je pense qu’il va falloir s’accorder, et il faut prendre langue avec nos collègues, wallons en priorité puisque nos captages sont en Wallonie. Je souhaite donc qu’on puisse dès l’année prochaine entamer des discussions avec la société wallonne de l’eau et voir si une stratégie conjointe ou complémentaire peut nous aider à sortir des difficultés que l’on va connaître à partir de 2019. [scald=2464646:sdl_editor_representation] « La fusion de Vivaqua et Hydrobru n’est pas un projet politicien » On vous a reproché il y a quelques mois d’avoir créé une société anonyme à vocation commerciale au sein de Vivaqua. Cela fait-il partie de cette stratégie commerciale à redéployer ? En partie, bien sûr. Mais je ne vais pas dévoiler le programme industriel parce qu’on sera en concurrence avec d’autres opérateurs, privés notamment. Mais cela doit devenir un bras commercial distinct du secteur public de l’eau. L’ambition est là. Certains vous reprochent une gestion opaque de Vivaqua. Et dans le contexte de la fusion, il y a cette volonté de davantage de transparence, notamment exprimée par la commune de Schaerbeek, une autre actionnaire. En effet, et je m’y suis attelé dès mon arrivée. De 1984 à 2013, Schaerbeek a eu un, voire deux représentants au conseil de gérance de Vivaqua, qui n’a pas fait tout ce que Schaerbeek demande maintenant. Moi je suis là depuis deux ans, et j’ai dit au bourgmestre de Schaerbeek que ce qu’il demandait, j’étais en train de le mettre en place. Nous avons mis en place un audit interne et un contrôle de gestion, nous avons pour la première fois l’an dernier fait un budget… je veux bien entendre des leçons de gestion transparente du secteur, mais il faut voir d’où l’on vient et ce que nous sommes en train de faire. Pour l’instant, le conseil de gérance, constitué de 4 personnes, est uniquement PS-MR, et demain on passera dans ce conseil de 4 à 7 personnes, pour qu’il puisse y avoir un représentant du CDH, un d’Écolo et un de Défi. Le gouvernement bruxellois est PS-CDH-Défi du côté francophone, le conseil de gérance de Vivaqua est constitué de mandataires PS et MR, le bourgmestre de Schaerbeek Bernard Clerfayt est Défi, le CDH et Défi sont dans l’opposition à la Ville… est-ce que tout cela ne complique pas la gestion de l’eau à Bruxelles ? Non pas la gestion de l’intercommunale, mais l’opération de fusion, en effet, n’a pas été facile de ce fait-là. Et il y avait une incongruité, parce que la fusion figure dans l’accord de gouvernement régional, alors qu’il ne s’agit pas d’une compétence régionale, puisqu’il s’agit de la fusion d’intercommunales. Il a donc fallu convaincre le MR, qui n’est pas au pouvoir à la Région, du caractère indispensable de cette fusion. Le travail que nous avons fait a permis de convaincre tout le monde, y compris Hydrobru, de la nécessité de faire cette fusion. La décision s’est faite, non pas par un accord politique, mais par l’analyse de l’intérêt économique et industriel de rassembler l’ensemble des métiers du secteur de l’eau à l’intérieur d’une seule entreprise, tout en gardant son caractère intercommunal. Ensuite, il fallait convaincre certains à la Région d’accepter ce qu’on faisait, alors que ça se trouvait dans l’accord de gouvernement. Le cabinet de Céline Fremault a été associé au processus de fusion ? Son chef de cabinet Stéphane Nicolas a été associé dès le début à toutes les réunions techniques et politiques relatives à la fusion. C’était aussi une garantie de transparence vis-à-vis du gouvernement sur la manière dont on était en train d’instruire le dossier. On a ensuite proposé aux communes de les rencontrer pour leur expliquer le projet en détail. Cela a fini, je crois, par convaincre qu’on n’était pas dans un projet politicien, mais économique et de bonne gestion à long terme. «Tout le monde fonctionne comme il veut» Pourquoi le bourgmestre de la Ville de Bruxelles est-il aussi le président de Vivaqua ? Parce que nous sommes l’actionnaire historique de référence de Vivaqua, fondateur il y a 125 ans. C’est la Ville. Hier nous avions tout le secteur des égouts au niveau de la Ville, nous l’avons transféré à Vivaqua. Je ne vois pas la difficulté sur mon « cumul » entre mon mandat de bourgmestre et celui de président de Vivaqua, qui est une intercommunale. Une intercommunale ! Auparavant, j’ai été député et président de CPAS. Je vois des gens qui sont bourgmestres, parlementaires et avocats. Tout le monde fonctionne comme il veut, mais moi je suis exclusivement dans le service public. Je suis bourgmestre et président de Vivaqua, point. Je fais mon travail dans l’intérêt de la Ville et des communes en étant à la tête de Vivaqua. Et je sers les citoyens bruxellois de la même façon.

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