Hubert Antoine: «Le désir est le fil du livre»

C’est au pied du volcan de Tequila, près de Guadalajara, au Mexique, qu’Hubert Antoine a écrit son premier roman Danse de la vie brève. Son pays d’accueil est aussi devenu le sujet principal de son livre, « comme un hommage » vingt ans après son arrivée. Pourquoi avez-vous quitté la Belgique ? Ma copine venait de décéder. J’étais fort triste et je voulais partir de la Belgique parce que je l’associais un petit peu trop à son décès. Je voulais partir le plus loin possible pour le moins cher possible. J’ai pris un vol à 300 dollars pour Chicago et de là, je suis descendu en stop à Chihuahua, en référence à la bande dessinée Blueberry. Les paysages m’attiraient et j’étais aussi marqué par les œuvres du photographe belge Baudoin Lotin qui avait fait un livre sur le Mexique. Vous êtes tombé amoureux du pays. Je quittais une Belgique assez sombre dans mon esprit. J’ai trouvé facilement un emploi, la femme de ma vie, etc. Le roman que j’ai écrit onze ans plus tard est un remerciement à ce pays merveilleux qui m’a ouvert ses bras, son cœur et changé ma vie. [scald=2484948:sdl_editor_representation] Vous évoquez en toile de fond la révolte de la ville d’Oaxaca. J’ai commencé l’écriture en janvier 2006 et la révolte a débuté le 1er mai 2006. En lisant les journaux, j’ai été fasciné par une ville qui prenait les rênes de son destin, qui avait chassé l’administration et le pouvoir en place, pourri au possible. J’étais donc fasciné de voir comment une ville sans pouvoir pouvait fonctionner. Tout le monde voulait aller à des réunions. Il y avait une ambiance de fête et c’est sans doute le seul point commun avec la commune de Paris. Cette ambiance a duré six mois avant que les choses ne se dégradent. Brad Wheyler est un journaliste américain venu couvrir l’événement fin octobre qui est mort dix jours après son arrivée le 27 octobre. Il ne m’a pas inspiré mais j’ai voulu lui dédier le livre parce qu’une partie de moi voulait être lui. Le jury a été séduit par l’originalité des thèmes abordés dans « Danse de la vie brève », en particulier la chasteté. Ce n’est pas spécialement la chasteté, c’est le désir qui est le fil du livre. L’héroïne, de même que son père, a une philosophie épicurienne : « Vis ta vie le plus intensément possible, aie toutes les relations sexuelles que tu veux, le sexe n’est pas autre chose que du plaisir et de l’échange ». Elle tombe vraiment amoureuse. Elle avait déjà connu un Français auparavant. Elle se rend compte que cette fois-ci c’est exceptionnel. La personne dont elle est amoureuse n’est pas très accessible. Elle est juste merveilleuse. Elle va être de plus en plus amoureuse de lui. Lui est amoureux d’une manière particulière. J’aimais bien ce contraste entre son comportement sexuel débridé durant 23 ans et le fait que ce qu’elle désire le plus lui est inaccessible. Je pense que ce n’est plus très important le sexe, lorsqu’on est amoureux. Qu’est-ce que ce prix Rossel va changer pour vous ? J’espère peut-être bouger et changer de pays, pourquoi pas revenir en Belgique. J’espère trouver du boulot. J’ai donné dans la restauration (NDLR, il tient un magasin de crêpes et de gaufres « Le coq à poil »), j’ai envie de faire autre chose. Si c’est possible, j’aimerais vivre de mon écriture. Un prix comme celui-ci donne une confiance et l’envie de croire à ce qu’on fait. On n’a qu’une seule vie, il faut la remplir le plus possible, c’est un peu la philosophie du livre.

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