Monfort, un père tranquille

Palma de Majorque Sous sa toise toujours bien fournie, Maxime Monfort contemple l’horizon paisible et azuré de Palma ainsi que les gamins moins poilus qui enfourchent leur bicyclette avec une légère appréhension. C’est que le temps passe pour celui qui fut aussi un débutant timide dans les rangs du Crédit Agricole. Dans quelques semaines, il fêtera ses 34 ans et dans plusieurs mois, son contrat s’achèvera chez Lotto. Sa vie de coureur aussi ? « J’espère que non, je me sens encore frais, motivé. Le vélo est ma passion, mon envie, même s’il y a un an, j’ai observé un sérieux coup de mou. Un court passage de déprime, je me demandais pourquoi je faisais encore ce métier, si j’étais encore utile à l’équipe voire à moi-même. Mes paramètres désormais ultra-précis avec tous ces appareils qui n’existaient pas à mes débuts indiquent que je ne suis pas moins fort qu’il y a quatre ans, par exemple. Dès lors, dans un monde idéal, je serais ravi de pouvoir rouler deux années supplémentaires, de préférence chez Lotto où je connais la maison depuis quatre ans déjà. » Car, derrière, se profilerait une reconversion déjà évoquée dans une fonction à déterminer. Lotto a besoin de franciser ses cadres et le trilinguisme de Monfort apporte du poids au CV de l’intéressé. « Dans un rôle de coach, cela me plairait, mais pas partir 200 jours de la maison. Il est peu tôt pour parler de cela, mais c’est sûr que je dois y penser. » En 2016, l’Aqualien avait deux missions : atteindre un top 10 sur le Giro et la Vuelta. 15 et 16e des deux « autres » Tours, Monfort analyse avec lucidité ses prestations. « J’avais choisi, l’hiver dernier, d’entamer un processus d’amaigrissement pour essayer ce que font d’autres, pour améliorer mon rapport poids-puissance, mais cela m’a davantage handicapé qu’autre chose. Je n’aurais pas dû m’imposer cette contrainte supplémentaire, déjà que je m’entraîne beaucoup et trop d’ailleurs aux yeux de certains. Par rapport à cela, je constate que mes meilleures saisons ont été consécutives à un gros hiver de travail. Et comme je suis un peu superstitieux, je refais la même chose ! A la Vuelta, les chiffres étaient bons, mais là où j’ai fait 6e, je recule de dix places. Cela signifie que le niveau global du cyclisme a augmenté. Dans un sport désormais quasi propre, les plus faibles ont rattrapé les autres. Il y a ainsi beaucoup plus de coureurs capables de terminer dans le top 15 d’un Tour. C’est donc également plus difficile pour un jeune d’intégrer le peloton professionnel. » Le Tour de France plaît toujours autant à l’Ardennais, mais il semble figé dans un schéma que nul ne peut contester. « Il est logique que l’équipe soit articulée autour de Greipel et d’autres cadres comme Gallopin et De Gendt. Je reste convaincu de pouvoir doubler Giro et Tour et d’officier dans celui-ci comme équipier, mais Marc Sergeant ne me destine pas à ce rôle. » L’Ardennais adore, en revanche, encadrer les jeunes, ce qu’il fait pour Vervaeke, Benoot, Wellens depuis quelques années. Et maintenant pour Remy Mertz. « Cela me file un coup de vieux, je me revois 14 ans plus tôt mais sans la personne que j’aurais aimé avoir à l’époque pour m’intégrer, m’apprendre. On parle peu de Vervaeke, mais je continue de prétendre que c’est un grand coureur. Benoot a eu beaucoup de malchance et va revenir plus fort. Quant à Wellens, il écrit tranquillement les lignes de son palmarès et ce n’est pas fini. » Chez Lotto, 2016 fut traumatisante avec l’accident de Stieg Broeckx dont la lente rééducation est en cours. « C’était encore plus compliqué pour moi avec le décès d’Antoine Demoitié dont j’étais proche. Depuis, avec mon épouse, nous tentons de soutenir sa femme, sa famille. Stieg a encore l’espoir de revenir à un niveau de vie plus ou moins normal, mais, dans les deux cas, il s’agissait d’une pure fatalité. Ces accidents ont marqué notre saison, c’est peu de le dire. On peut se tuer aussi en tombant d’un escalier. Notre métier comporte des dangers, on freine un peu plus tôt quand on a des enfants, mais la mort en course, si choquante soit-elle, résulte malheureusement, dans la plupart des cas, d’une malchance improbable. »

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