2017, année décisive pour l’indépendance de la Catalogne

Le président de la Generalitat, le gouvernement régional catalan, s’est chargé de le rappeler il y a quelques jours, lors des traditionnels vœux de fin d’année : 2017 sera « décisif pour le futur de la Catalogne. » Debout à côté du drapeau catalan, Carles Puigdemont a promis dans un message télévisé que cette année, « les citoyens catalans décideront librement de leur futur » au cours d’un « référendum légal et contraignant », car le gouvernement et le parlement régionaux « mettront en œuvre le résultat sans délai ni excuse. » La déclaration n’est pas une surprise. Depuis son investiture à la tête de l’exécutif il y a tout juste un an, Puigdemont a répété à de nombreuses reprises cette promesse d’une consultation en 2017. C’était d’ailleurs l’objectif principal de la liste indépendantiste « Ensemble pour le Oui » – une coalition hétérogène entre nationalistes conservateurs, républicains et petites formations de gauche, avec comme seul dénominateur commun le processus séparatiste – lors de sa victoire aux élections régionales en septembre 2015. Les indépendantistes s’étaient alors donnés 18 mois pour y parvenir, et pour leur leader, « le mandat confié au gouvernement issu de ce scrutin est en train d’être rempli. » Pour démontrer qu’il existe dans la région un vrai consensus autour de l’organisation d’un référendum, le gouvernement de Barcelone a convoqué, à la veille de Noël, un grand rassemblement de formations politiques, d’associations et de syndicats ouvertement séparatistes ou simplement partisans du droit à l’autodétermination. Cette rencontre a débouché sur la création d’un Pacte national pour le référendum, dont l’objectif principal sera la mise en place d’une campagne « nationale et internationale », pour défendre la consultation qui représente, pour le président de la Generalitat, « le meilleur outil possible pour répondre à une demande des Catalans. » Ces derniers sont largement favorables à un référendum, d’après un sondage publié en début de semaine le quotidien catalan La Vanguardia : près de 77 % des personnes interrogées souhaitent une consultation. Cependant, selon cette même enquête d’opinion, elles sont à peine un tiers (37,3 %) à envisager que le référendum ait lieu sans le consentement du gouvernement central. Pour le gouvernement catalan, c’est le nerf de la guerre. Echaudés par l’expérience de novembre 2014 et l’organisation d’une consultation sans valeur juridique car interdite par la justice, les indépendantistes voudraient un référendum en bonne et due forme, fruit d’un accord entre Barcelone et Madrid. Front judiciaire Une hypothèse balayée fin décembre par Mariano Rajoy au cours de son bilan de l’année 2016 devant la presse. « Il ne faut pas se leurrer » a assuré le Premier ministre conservateur « le gouvernement n’autorisera aucun référendum. Ce serait aller à l’encontre de la souveraineté nationale et de l’égalité des citoyens du pays. » Jusqu’à présent, les conservateurs du Parti Populaire (PP), au pouvoir à Madrid, ont multiplié les recours devant le Tribunal Constitutionnel espagnol et la justice ordinaire pour freiner les initiatives de l’exécutif de Barcelone en faveur de l’indépendance. [scald=2550081:sdl_editor_representation] Cette judiciarisation permanente, critiquée par les autres formations politiques en Espagne, a entraîné la mise en examen des principaux dirigeants indépendantistes, notamment celle d’Artur Mas, l’ancien président de la Generalitat entre 2010 et 2016. Accusé de désobéissance grave pour avoir organisé la consultation de novembre 2014 malgré l’interdiction de la justice, il devra s’asseoir sur le banc des accusés le mois prochain. Ce front judiciaire, qui a attisé les tensions ces dernières années, n’est pas refermé : courant décembre, le Tribunal Constitutionnel a suspendu les travaux du Parlement catalan sur l’adoption de la loi sur la transition vers l’indépendance, ce qui n’a pas empêché les partis indépendantistes d’annoncer jeudi dernier un accord… sur cette même loi. Allers-retours Mariano Rajoy a critiqué ce qu’il considère comme « de nouvelles mesures qui vont dans la mauvaise direction » mais ne ferme cependant pas la porte à des négociations. « Nous devons nous parler », a reconnu le chef du gouvernement, qui doit maintenant composer avec un exécutif sans majorité au Parlement de Madrid, après avoir bénéficié d’une large majorité absolue entre 2011 et 2015, des années où le dialogue entre la capitale espagnole et la Catalogne a brillé par son absence. Témoin de cette volonté nouvelle, la vice-Présidente Soraya Saenz de Santamaria a multiplié depuis la mise en place du gouvernement en octobre les allers-retours entre la capitale espagnole et la Catalogne. Elle devait d’ailleurs rencontrer ce mardi le numéro deux de l’exécutif catalan Oriol Junqueras. Saenz de Santamaria, reconnue pour sa capacité à trouver des compromis, ne dispose pas d’une grande marge de manœuvre pour éviter une nouvelle confrontation. Celle-ci aurait lieu à coup sûr en cas d’organisation – forcément de manière unilatérale étant donné la position de Madrid – du référendum d’autodétermination. Les conséquences d’une telle consultation sont difficilement envisageables en cas de victoire du oui, loin d’être garantie à l’heure actuelle. D’après le baromètre mensuel du Centre d’Etudes d’Opinion de la Generalitat, diffusé fin décembre, 45,3 % des personnes interrogées voteraient positivement pour l’indépendance, contre 46,8 % qui s’y opposeraient. Il en faudra sans doute plus pour que les indépendantistes renoncent à leur promesse, qui signifierait probablement l’explosion de la coalition « Ensemble pour le Oui » et la fin du gouvernement dirigé par Carles Puigdemont. On n’en est pas encore là, mais ce dernier avait sans doute raison en présentant l’année 2017 comme décisive pour le futur de la Catalogne. [scald=2550082:sdl_editor_representation]

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