Les investissements dans les BRIC pris dans la tourmente mondiale

Quels sinistres mois que ceux que viennent de subir les investisseurs qui privilégient les actions ! Partout les cours sont en net recul, et quasiment tous les secteurs sont touchés. Le recul des indices phares des principales places financières depuis le printemps fait souvent la une de l’actualité. Et les noms qui y sont associés sont toujours des mêmes : les bourses chinoises, le prix du pétrole, la croissance en recul, les parités monétaires, jusques et y compris Volkswagen. En revanche, on n’y associe peu les bourses des « BRIC » (Brésil, Russie, Inde et Chine). Et pourtant, elles ont connu, au cours de ce troisième trimestre 2015, des coupes particulièrement sévères. Exemple : la sicav KBC Equity Fund – BRIC acc. Au cours des mois de juillet, août et septembre, sa valeur d’inventaire a chuté de 22 %. Ce compartiment, généraliste, comporte exclusivement des actions cotées sur plusieurs marchés émergents, et pas uniquement sur les bourses des quatre pays concernés. Mais si l’on s’en tient exclusivement à ceux-ci, les culbutes observées pour ce troisième trimestre sont également spectaculaires : – 13,5 % pour Sao Paulo (indice Bovespa), – 18 % pour Moscou (RTS index), – 6,2 % « seulement » pour Bombay (BSE Sensex) et – 22 % pour Shanghai (SSE Composite). Le Brésil de la corruption Prenons ces quatre pays un par un. En commençant par le Brésil. Le groupe Petrobras est la vedette de Sao Paulo et, au cours du troisième trimestre 2015, elle a essuyé un recul de 43 %. La société est directement confrontée à un double séisme. D’une part, une macro-corruption, dans laquelle sont impliqués non seulement les dirigeants du groupe, mais aussi la présidente Dilma Rousseff, d’autres responsables politiques et des hommes d’affaires. D’autre part, l’effondrement des prix internationaux du pétrole, alors que les gisements off-shore du producteur brésilien ne peuvent être exploités qu’à des coûts très élevés. La très mauvaise passe de Petrobras n’explique pas à elle seule la chute de l’indice Bovespa, car, à Sao Paulo, d’autres valeurs ont encaissé des reculs sévères. Par exemple, on y dénombre beaucoup de sociétés productrices de matières minérales (fer, charbon, etc.) ou de produits industriels de base (aciers, ciments, etc.). Toutes ont subi les conséquences de la décroissance économique qui s’est abattue cette année sur le continent latino-américain. La Russie des embargos La Russie souffre ces temps-ci des mêmes maux que le Brésil. Les géants actifs dans le secteur énergétique (pétrole, gaz, charbon) aussi bien que ceux opérant dans le secteur minier souffrent fortement de la diminution de la production et de la chute des prix. Les diverses mesures d’embargo prises à la fois par et contre Moscou ont aussi provoqué une forte contraction des échanges et des investissements. Autant de difficultés qui ont, à leur tour, frappé le secteur bancaire. Si bien qu’au cours du troisième trimestre 2015, l’indice moscovite RTS a essuyé un recul de 17 %. L’Inde privilégiée Dans le paysage des BRIC, l’Inde fait moins pâle figure. Certes l’indice phare de la bourse de Bombay, le BSE Sensex a également perdu des plumes au cours de ce troisième trimestre, mais il a limité ses pertes à 6,7 %. Il est vrai que le sous-continent est gros importateur de produits pétroliers et de minerais et qu’il a donc profité des baisses des prix. Les prévisions en matière de croissance pour 2015 sont d’ailleurs positives, autour de + 7 %. La Chine accusée Reste le quatrième membre du club, la Chine. Pour certains, ce sont les bourses continentales de ce pays, et en particulier celle de Shanghai, qui sont à l’origine du retournement boursier mondial. Effectivement, au cours du 3e trimestre, son indice phare, le SSE Composite, a reculé de 17,2 %. Une multitude de facteurs a été invoquée pour l’expliquer : le comportement incohérent des actionnaires particuliers, opérateurs majoritaires, des règlements financiers inadaptés, le ralentissement des échanges internationaux, et la diminution constante du taux de croissance chinois, qui serait tombé pour 2015 à moins de 7 %. Cela dit, si on recule le curseur de l’indice sur douze mois, jusqu’à octobre 2014, on reste dans le vert, avec une progression de 28 %. Perspectives à long terme Voilà pour ce sinistre troisième trimestre 2015. Mais, pour les particuliers qui ont choisi d’affecter une partie de leurs avoirs dans les bourses des BRIC, comme l’on recommandé les conseillers en placements il y a une dizaine d’années, le vecteur utilisé a été les fonds d’investissement. Et, avec les fonds, la perspective est forcément à moyen et même à long terme. Que donnent les BRIC dans cette optique ? Les constats diffèrent d’un cas à l’autre. Les grands perdants : ceux qui ont misé sur la bourse de Moscou. Le RTS index était à 2.292 il y a dix ans et à 1.490 il y a cinq ans, il tourne autour de 810 à l’heure actuelle. L’ère Poutine ne s’est pas avérée féconde sur le plan financier. Sur le long terme, le Brésil est plus rémunérateur, puisqu’en 2005, l’I-Bovespa frôlait les 30.000 points et qu’il tourne aujourd’hui autour de 47.600. Mais depuis un sommet atteint à 70.000 points lors de l’élection de Dilma Roussef (aujourd’hui cible d’une procédure de destitution), la chute est continue. La situation chinoise est plus complexe. Sur dix ans, l’investissement est très rémunérateur. Il l’est un peu depuis, mais reste positif. La responsabilité du président Xi Jinping est rarement évoquée dans ce récent jeu de montagne russe. Reste le cas indien, le plus apaisé du club des quatre et aussi le plus rémunérateur : la mise effectuée il y a dix ans a été multipliée par trois ! Ici non plus, le rôle du nouveau président, le nationaliste Pranab Mukherjee, n’est jamais mis en avant. La question immédiate que se posent les investisseurs particuliers dans la foulée des revers boursiers des derniers mois, est l’éventuel changement de stratégie à adopter. Il y a douze ou quinze ans, les conseillers en placements recommandaient aux « dynamiques » d’affecter aux BRIC entre 10 et 15 % de leur portefeuille d’actions. Aujourd’hui, dans la foulée plutôt pessimiste des perspectives de croissance mondiale tracées par le FMI, ils proposent dans leur majorité de diminuer cette position de moitié. Et aussi de s’écarter du Brésil et de la Russie. Même pour l’Asie, le redémarrage ne sera pas pour demain, mais pour après-demain.

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