Donald Trump, groggy, encaisse les scoops

Depuis New York La sortie de route est violente, spectaculaire. Le scénario est « nixonien », malgré les appels au calme bipartisans pour éviter toute comparaison un brin scabreuse entre deux présidents en fâcheuse posture, à 45 ans d’intervalle. En l’espace de trois jours et autant de révélations accablantes publiées par le New York Times et le Washington Post, Donald Trump encaisse les scoops, visiblement groggy. [scald=2765057:sdl_editor_representation] La liste de ses déboires et de ses torts supposés est impressionnante : le 27 janvier, en aparté, il aurait demandé au directeur du FBI James Comey de lui jurer sa « loyauté ». Ce dernier ne lui promettra que son « honnêteté », rien de plus. Le 14 février, Trump demande à Comey de « laisser filer » l’enquête relative à l’ex-conseiller à la sécurité nationale Michael Flynn, démis la veille de ses fonctions pour la teneur de ses conversations avec l’ambassadeur russe Sergueï Kislyak. « J’espère que vous arriverez à y voir suffisamment clair pour laisser Flynn tranquille, commente le président à l’adresse de Comey. C’est un bon gars. J’espère que vous le laisserez tranquille ». Choqué, Comey se contente de répondre : « c’est un bon gars, c’est vrai ». Il entendra encore le président s’interroger sur l’éventualité de « faire emprisonner les journalistes qui publieraient des informations classifiées ». [scald=2765058:sdl_editor_representation] La coupe est pleine La coupe est pleine pour le sage Comey, qui entreprend de consigner sur papier les propos présidentiels. Pour se prémunir de tout harcèlement en cas de mise à l’écart ? Si cette information est avérée, et le mémorandum authentifié, la prescience de Comey est remarquable, au vu de son sort ultérieur. Car, pour Donald Trump, ouvertement paranoïaque désormais, l’impudence de l’héritier de John Edgar Hoover est intolérable. Le 5 mars, Comey rejette les accusations de la veille de Trump à l’encontre de son prédécesseur Barack Obama, qui l’aurait selon lui placé sur écoute. Le 3 mai, le même Comey confesse se sentir « légèrement nauséeux » à l’idée d’avoir pu influer sur le déroulement de l’élection présidentielle de 2016, en rouvrant l’enquête sur Hillary Clinton onze jours avant la tenue du scrutin. Trump a tranché : le 9 mai, il limoge sans préavis son directeur du FBI. Un garde du corps présidentiel apporte la missive d’éviction encachetée au siège du Bureau, à Washington, alors que Comey se trouve sur la côte Ouest. Le président, en débarquant Comey, vient de commettre une lourde faute politique : non seulement il fédère contre lui l’essentiel des 36.000 agents du FBI et ne peut faire cesser l’enquête russe qui le hérisse tant, mais il rend sa liberté de parole à l’ancien procureur et ouvre sous ses pieds un gouffre potentiel. [scald=2765059:sdl_editor_representation] Audition de Comey Malgré un embarras grandissant, la majorité républicaine s’ébroue timidement face aux accusations d’obstruction potentielle de la justice par Donald Trump. Jason Chaffetz, président de la commission de surveillance de l’action gouvernementale de la Chambre des représentants, a demandé mardi soir au FBI de communiquer tous les « mémoranda, notes, résumés et enregistrements » des conversations entre Trump et Comey. Il a également invité ce dernier à venir témoigner publiquement ce mercredi 24 mai, à 9h30 (Washington) devant la commision. Ce dernier est incité par plusieurs édiles à témoigner publiquement, pour assumer les confidences recueillies par la presse. « Je ne veux pas lire un mémo, renchérit le sénateur Lindsey Graham. Je veux entendre Comey ». « Lui-même veut le faire dès que possible », confirme une source proche au site Politico. La Chambre des Représentants et le Sénat se disputent désormais l’honneur de recevoir celui par qui la tempête est arrivée. Pour les républicains, observant le bateau Trump prendre l'eau de toutes parts alors qu'ils comptaient sur lui pour promouvoir un agenda copieux de réformes, seules comptent les élections parlementaires de mi-mandat, le 6 novembre 2018, et la possibilité de préserver leur contrôle de la sphère législative. L'opposition démocrate, elle, fourbit ses armes pour le jeu de massacre à venir. « Même quand cela semblait impossible, les choses continuent d'empirer, soupire le sénateur Chuck Schumer. Notre pays vit une épreuve sans précédent. Je le dis à tous mes collègues: l'histoire nous regarde. »

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