FIN DES FRANCOFOLIES DE LA ROCHELLE BIRKIN ET AZNAVOUR EN HAUT DE L'AFFICHE

Fin des Francofolies de La Rochelle Birkin et Aznavour en haut de l'affiche LA ROCHELLE De notre envoyé spécial Après six jours de musique et de chansons, La Rochelle a retrouvé son calme tout relatif de ville touristique. Au bilan des Francofolies 92, les avis sont un peu contrastés. D'une part, il y a la relative déception de bon nombre de journalistes et professionnels, dans l'impossibilité d'assister aux concerts en salle en raison des normes de sécurité. Les spectateurs payants d'abord, quoi de plus normal. Dommage seulement que le problème n'ait pas été prévu à l'avance car certains artistes qui espéraient toucher, par leur passage à La Rochelle, une bonne partie de la profession en auront été pour leurs frais. Néanmoins, Angélique Kidjo a fait un tabac en première partie de Sapho, dans une prestation pourtant nettement plus courte qu'à Bruxelles récemment. Chez les Belges, outre les Zap Mama dont plus aucun festival ne peut se passer et qui participaient à la «Fête à Higelin», les joyeux drilles de Sttellla ont enthousiasmé le public français au même programme que les bondissants Satellites. Du côté des Québécois, très fortement représentés cette année, c'est Dan Bigras qui semble avoir été la révélation de l'année au point de déclencher les applaudissements sur son passage alors qu'il venait simplement assister à un concert au Grand Théâtre. BIRKIN L'ÉMOTION Impression plus mitigée pour Luc de Larochelière qui se produisait sur la grande scène. Comme nos amis québécois nous le répètent depuis pas mal de temps, ce dernier est beaucoup plus qu'un second Roch Voisine. Ses textes ne dédaignent pas des petits coups de griffe bien placés et sa musique se nourrit de blues, de gospel et de rock américain bien carré. Sur scène, contrairement à ce qu'on nous avait affirmé, le bonhomme semble avoir perdu sa timidité naturelle qui le fait errer dans les allées du festival comme une âme en peine. Pourtant quelque chose ne passe pas tout à fait et malgré des tentatives de dialogue humoristique avec le public, celui-ci ne semble s'enflammer que pour les tubes «Cash City» et «Sauvez mon âme». Dommage, car plusieurs autres titres méritent que l'on s'y intéresse. Mais il n'est pas impossible que les spectateurs soient surtout venus ce soir-là pour Jane Birkin. En ce qui la concerne, ce fut le triomphe, évidemment. Pour ce qui est peut-être, aux dires d'une partie de son entourage, sa dernière apparition scénique en Europe, Jane livra un concert impeccable musicalement et souvent émouvant. Interprétant Gainsbourg au travers de chansons écrites pour elle ou pour le beau Serge en personne, elle eut bien du mal à plusieurs reprises à contenir son émotion. Et le bouquet offert à la fin de sa prestation par Jacques Higelin et Jean-Louis Foulquier fut comme une délivrance pour cette grande interprète qui se produisait ce soir-là pour la première fois dans un festival en plein air. Terminant sur un titre de Gains-bourg, elle dérogea à la règle très officieuse des deux jours précédents qui s'étaient chaque fois clôturés avec «When the Saints». Après la version de Manu Dibango and Co, c'est la bande à Willy Deville qui l'assaisonna à la sauce New Orleans après deux heures de blues, de gospel et de zydeco. Au hit-parade de cette New Orleans Revue qui sera à l'Ancienne Belgique cette semaine, on classera ex aequo la fabuleuse voix de Johnny Adams avec une terrible version de «Stand By Me» et l'abattage du vétéran Eddie Bo, véritablement increvable. Un ton au-dessous, le beau Willy qui s'est enflé de quelques kilos a surtout le mérite d'avoir eu l'idée de cette tournée et de nous offrir un spectacle bourré d'énergie, de fun et de bonne humeur avec Dr John, Zachary Richard et les Wild Magnolias dans leurs drôles de trucs en plume. AZNAVOUR LA CLASSE Mais finalement, l'émotion la plus intense sera peut-être venue, hormis la prestation de Jacques Higelin qui clôturait les festivités, de l'apparition exceptionnelle de Charles Aznavour. Devant une esplanade trop peu garnie, il livra les plus belles perles de son répertoire agrémenté de vieilles chansons quasiment inconnues pour lesquelles il avouait devoir s'aider des textes posés sur un lutrin. Après une première partie consacrée à ces titres ressortis des tiroirs de l'oubli, il enchaînait les tubes avec une belle santé: «J'aime Paris au mois de mai», «Mes amis, mes amours, mes emmerdes», «Pour faire une jam», «Il faut savoir», «Je bois», «Non je n'ai rien oublié», «Ave Maria», «La Bohème», «La Mamma», «Je m'voyais déjà», etc. Sans oublier «Comme ils disent», une chanson dont le texte apparaît toujours aussi gonflé près de vingt ans plus tard. On se demande qui, dans les jeunes loups de la chanson française actuelle, aurait le culot d'interpréter un texte comme celui-là. Un tout grand bonhomme décidément, qui rappela aux «petits jeunes» toute la richesse de son répertoire et fit le bonheur du public présent avec talent et simplicité. La classe. JEAN-MARIE WYNANTS

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