Nathalie Rykiel la brune, fille de la rousse



Sonia Rykiel, immense figure de mode française. Tout est mythique chez elle : la date à laquelle elle fonde sa griffe (mai 68), ses pulls, portés par Audrey Hepburn et sur lesquels elle est la première à inscrire des messages, sa diabolique frange rousse, son style, qu’on appelle « la démode », principe selon lequel il faut porter le vêtement pour son propre corps, et non en fonction des diktats imposés par la mode. « Le pantalon, c’est la possibilité de l’égalité entre les femmes qui ont de belles jambes et celles qui n'en ont pas », disait Sonia Rykiel.
Aujourd’hui, à 85 ans, elle ne dit plus grand chose. Elle a filé les clés de la maison à Nathalie il y a vingt ans. La petite y avait commencé comme mannequin, en 1976. Elle s’était ensuite plongée dans la mise en scène des défilés. La mode étant dans ses gènes, la jeune femme crée Rykiel Enfant en 1983, lors de sa première grossesse (elle est elle-même la mère de trois filles). Suivront d’autres lignes de prêt-à-porter, comme Sonia By Sonia Rykiel ou Sonia Rykiel Modern Vintage, une collection de lingerie, des parfums et surtout, en 2002, tellement en phase avec les années Sex & the City, Rykiel Woman, le concept dédié à la sensualité et au plaisir incarné par le désormais célèbre petit canard de bain.
Elle raconte tout ça, sans fard ni tabou, de son manque de père, de son nom, de ses racines – Parisienne de la Rive gauche, d’origine polonaise, russe et roumaine –, de maisons, de la rue de Grenelle, de coups de poignards, de roses, de chocolat, de psy, de yoga... Une courte biographie qui parle finalement bien plus des femmes que de la mode. Et qui touche souvent en plein cœur. « Demain, écrit-elle, ce sera la première fois que ma mère ne me souhaitera pas mon anniversaire /.../ Je lui dirai : “Souris-moi maman, c’est mon anniversaire aujourd’hui”. Et elle me sourira. Elle fait ce que je lui dis en général. Depuis qu’elle m’appelle maman, il y a à peu près un an de cela, elle est devenue presque obéissante. Je lui ai dit, la 4e ou 5e fois où elle m’a appelée maman, quand j’ai compris qu’elle le faisait exprès, que cette “con-fusion” était sa décision : “Je suis d’accord pour que tu m’appelles maman, à condition que tu restes ma mère ». Elle a répondu : “Bien sûr, ma chérie !” Fin du dialogue. J’étais contente, elle aussi, ainsi les choses étaient parfaitement claires pour nous deux ».
« 4 décembre », Nathalie Rykiel, Plon. 202p., 15,90 euros.