Une journée cruciale pour Alain Mathot


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Ce principe d’immunité, modernisé à la fin des années 90 pour donner suite à l’Affaire Agusta, est inscrit dans l’article 59 de la Constitution, prévoyant que « sauf le cas de flagrant délit, aucun membre de l’une ou de l’autre Chambre ne peut, pendant la durée de la session, en matière répressive, être renvoyé ou cité directement devant une cour ou un tribunal, ni être arrêté, qu’avec l’autorisation de la Chambre dont il fait partie ». Il s’agit par ce dispositif d’éviter l’arbitraire, d’empêcher que des parlementaires comparaissent en justice pour de mauvaises raisons, non parce qu’ils auraient commis des infractions mais parce qu’ils seraient victimes de machinations politiques. Cette immunité n’est en principe pas un privilège mais une réglementation destinée à assurer le bon fonctionnement du Parlement.
En quoi Alain Mathot est-il concerné ? Député fédéral, il est soupçonné par la justice liégeoise d’avoir perçu 722.000 de commissions non autorisées dans le cadre de la construction d’un nouvel incinérateur de déchets à Herstal, en bord de Meuse liégeoise.
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Il a été inculpé en novembre 2011 par le juge d’instruction Philippe Richard et il y a un an, le parquet de Liège a demandé son renvoi devant le tribunal correctionnel, listant les préventions de corruption passive, faux et usage de faux, blanchiment, abus de biens sociaux, escroquerie, infractions relatives aux enchères publiques, fraude fiscale et participation à une organisation criminelle. Une dizaine d’inculpés (corrupteur et corrompus présumés) devraient, dans les mois qui viennent, comparaître devant la chambre du conseil et pour une grande part d’entre eux vraisemblablement, devant le tribunal correctionnel : Alain Mathot est le seul à être protégé par une immunité parlementaire.
Que doit décider la Commission des Poursuites ce jeudi ? Depuis la fin de l’instruction il y a un an, elle s’est réunie à de nombreuses reprises jusqu’à obtenir l’intégralité du dossier. Le 10 mars, après une longue discussion, les sept parlementaires membres de cette Commission (2 N-VA, 1 PS, 1MR, 1 Open VLD, 1 SP.A, 1 CD&V) ont fait savoir l’orientation qu’ils comptaient donner au dossier : pour cinq d’entre eux, les motivations de la justice liégeoise sont avant tout politiques, il n’y a pas lieu de lever l’immunité d’Alain Mathot et de le laisser s’expliquer devant des magistrats. Seuls deux membres de la Commission, le libéral Denis Ducarme et le CD&V Raf Terwingen, ont estimé que le dossier était assez solide et étayé pour être débattu devant une juridiction.
Ce jeudi, les membres de la Commission devront officialiser leurs avis et passer au vote. Quelle que soit l’opinion majoritaire, elle devrait être validée par l’ensemble des parlementaires, lors d’une séance plénière de la Chambre. Probablement avant les congés de Pâques. La Chambre n’est pas tenue de suivre les recommandations de la Commission des Poursuites, c’est elle et elle seule qui in fine, décidera du sort réservé au député-bourgmestre de Seraing.