«Les ‘préfugiés’ ne s’intégreront jamais»: la nouvelle campagne anti-préjugés
« C’est un nouveau mot qui vient de rentrer dans le paysage, explique Caroline Intrand, co-directrice du Ciré, une asbl qui travaille depuis 60 ans, en Belgique francophone, sur la question des demandeurs d’asile, des réfugiés et des étrangers. On lance cette campagne parce que l’on a tous des préjugés, qui sont influencés par ce qu’on entend, ce qu’on voit, ce qu’on lit... Vu le contexte actuel (crise économique, attentats, crise migratoire), les préjugés sur les migrants sont de plus en plus nombreux. Mais les peurs, aussi légitimes soient-elles, sont souvent basées - d’après nous - sur des informations erronées, ou une mauvaise connaissance de la situation au niveau international. L’objectif de notre campagne « préfugiés » est donc que le public se pose les bonnes questions sur les réfugiés. On veut créer un déclic, en ayant recours à un peu de provocation et d’humour... On veut montrer que les préjugés sur les réfugiés sont un peu absurdes et que parfois, il y a des mots très durs qui se cachent derrière. » « L’idée est donc de jouer sur les mots, ajoute Valentine De Muylder, également du Ciré. On veut parler des préjugés comme on parle parfois des réfugiés. »
« Ne pas être naïf »
Au-delà des slogans, le Ciré espère apporter de l’information aux personnes qui souhaitent déconstruire ces préjugés. Ainsi, sur chaque affiche de la campagne, le Ciré propose des clefs pour comprendre, des chiffres et des réponses aux questions sur l’accueil des réfugiés, les défis de l’intégration, l’amalgame terroriste-réfugié, etc. Un petit guide « anti-préjugés » a également été rédigé, pour répondre aux phrases type du style : « Les réfugiés viennent prendre l’emploi des Belges. » « Il ne faut pas être naïf, précise Caroline Intrand, on sait que ces préjugés existent et que s’ils existent, c’est qu’ils viennent bien de quelque part. Mais selon nous, la question à se poser est : mais en fait, d’où viennent-ils ? »
Le Ciré a également prévu dans sa campagne un petit film (une fiction) : deux dames âgées, assises sur un banc, face à la mer. Un décor typiquement belge. Des mouettes arrivent, de plus en plus nombreuses. « Il ne faut pas les nourrir, ou sinon elles seront de plus en plus nombreuses », commence l’une des deux dames. Le parallèle avec l’accueil des réfugiés en Belgique est limpide.
« Elle est choquante cette phrase : “Ne nourrissez pas les réfugiés”. Si nous l’avions inventée, nous nous sentirions mal, explique Valentine De Muylder. Mais elle n’est pas de nous. Elle a été prononcée par le gouverneur de Flandre-Occidentale il y a quelques mois. Notre source d’inspiration est bien réelle. »