«On ne tient pas compte de notre avis»

Le fonctionnaire délégué aurait délivré le permis pour la prison de Haren sans tenir compte de la commission de concertation. L’avis censé avoir été rendu en juillet est en réalité introuvable.

Journaliste au service Bruxelles Temps de lecture: 3 min

Décidemment, le dossier de la prison de Haren ne cesse de surprendre. Pour le promoteur Cafasso, la bonne surprise est arrivée avec le Père Noël. Le 24 décembre dernier, le fonctionnaire délégué de la Région bruxelloise délivrait le permis d’urbanisme pour la construction du centre pénitentiaire de 1.190 détenus sur le terrain de 18 hectares situé entre la rue du Chicon, le boulevard de la Woluwe et la chaussée d’Haecht. Interloqué par cette date, le député bruxellois Arnaud Pinxteren (Ecolo), a interpellé le ministre-président Rudi Vervoort (PS) afin de savoir si le permis reprenait les multiples conditions formulées lors de la commission de concertation. Et là, la réponse du ministre-président est surprenante. Le fonctionnaire délégué n’a pas tenu compte de ces remarques puisque aucun avis de la commission de concertation n’a été rentré dans les délais impartis.

Le dossier de la prison de Haren est extrêmement sensible depuis le départ. Dès son annonce, les opposants à l’univers carcéral se sont manifestés, jugeant le bâtiment inhumain de par sa taille. Pour rappel, cette méga-prison comme on l’a surnommée, représente une superficie réelle de 51.000 m² de bâtiments auxquels il faut ajouter 15.000 m² de surfaces extérieures. Trois entités pour les hommes, deux zones pour les femmes, une pour les jeunes dessaisis, un centre de psychiatrie légale et une entité de gestion générale sont prévus.

Rapidement, ils ont été rejoints par les riverains et autres défenseurs de la nature qui souhaitaient protéger cette terre arable et leur cadre de vie. Enfin, c’est la magistrature qui s’est ralliée à la cause, pointant du doigt les distances à parcourir entre le palais de justice de la place Poelaert et la prison. Lorsque la proposition de rendre la justice en prison a vu le jour, elle l’a fermement condamnée.

La Ville de Bruxelles a d’abord tout fait pour retarder la délivrance du permis en refusant de déplacer le tracé du sentier du Keelbeek, avant de céder.

Entre-temps, en mars 2016, Cafasso, le consortium qui doit construire la prison pour le compte de l’Etat fédéral, a rentré un deuxième projet légèrement modifié qui a nécessité une seconde enquête publique et une commission de concertation. Commission qui s’est réunie le 1er juin 2016 devant environ 200 personnes. Une semaine plus tard, la Ville de Bruxelles rend un avis favorable sous conditions mais on attend toujours un avis de la commission de concertation. Même si celui-ci est uniquement consultatif, il doit être rendu dans les 30 jours. Or, dans le permis délivré en décembre, on peut lire que la commission n’a pas donné son avis dans les délais légaux.

« On ne tient pas compte de l’avis de la population ou de ses remarques, s’étonne Arnaud Pinxteren. C’est inacceptable. A quoi cela sert d’organiser des commissions de concertation ? »

A la Ville de Bruxelles, on s’étonne. « Nous avons rendu notre avis favorable mais la Région devait rédiger l’avis de la commission », nous explique le cabinet de l’échevin de l’Urbanisme, Geoffroy Coomans (MR). Et ni à la Ville ni à la Région, on ne trouve le document.

Si rien d’illégal n’a été commis, on peut se demander pourquoi le Bureau de l’Urbanisme n’a pas rédigé d’avis à temps. L’organisme manque de personnel et certaines sources murmurent qu’il serait plus simple de laisser filer le temps dans des dossiers si complexes plutôt que de rendre des avis trop politiques ou qui n’arrangent pas le gouvernement.

En tout cas, un recours en annulation devrait être introduit dans les jours à venir.

 

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