Évitez l’émetteur sur soi
Nous avons demandé l’avis de deux médecins ORL spécialisés en audiophonologie, mais aussi d’un ingénieur français, Carl de Miranda, diplômé de Polytechnique et de l’École supérieure d’électricité. Selon ce dernier, il apparaît qu’au niveau de la puissance d’émission, seul le Bluetooth de classe 1, avec une portée de 100 mètres, est aussi puissant qu’une borne wi-fi. Un appareil Bluetooth de classe 2 a une puissance 40 fois inférieure au précédent, avec 10 à 20 mètres de portée. Quant à celui de classe 3, sa puissance est maximum 100 fois inférieure à celui de classe 1, avec une portée inférieure à 10 mètres. « Repérez donc toujours la classe de Bluetooth de l’appareil : n’utilisez pas de classe 1, conseille l’ingénieur. Et respectez aussi une distance minimum avec l’appareil connecté Bluetooth : plusieurs mètres s’ils sont de classe 1, au moins 1 mètre pour ceux de classe 2 et 50 cm pour celui de classe 3, ce qui exclut donc le contact permanent. » Un conseil qui prend aujourd’hui tout son sens avec l’arrivée sur le marché du « Bluetooth 5 », offrant une plus grande vitesse de transmission, plus de portée et moins d’interférences que son prédécesseur. Mais la puissance du système n’est pas le seul point à tenir à l’œil. En effet, l’un des avantages principaux de Bluetooth, à savoir sa capacité à gérer simultanément de la transmission de données et des appels vocaux, constitue justement, selon Carl de Miranda, un inconvénient majeur sur le plan de la santé. Prenons un appareil auditif. « S’il est essentiellement récepteur, il va recevoir des ondes et amplifier le signal sonore. Mais s’il dispose en plus de la capacité à entrer en relation avec la source d’info pour réajuster la qualité de la réception, il émettra lui-même des ondes. Et là, l’émission d’ondes deviendrait permanente. Il faut donc privilégier les appareils qui émettent uniquement lors des conversations », nous explique l’ingénieur. Pour Carl de Miranda, il importe, avant d’acheter un appareil auditif muni du Bluetooth, de poser trois questions au fabricant : 1º. À quelle classe appartient cet appareil (1, 2 ou 3) ? 2º. Fonctionne-t-il uniquement en mode récepteur ? 3º. Quelle est sa puissance maximale d’émission ?
Les avis divergent
La question des seuils fait toujours débat : a priori, le Conseil de l’Europe recommande 0,6 volt/mètre et préconise d’arriver à 0,2 volt/mètre. L’OMS, après plusieurs années d’études, est arrivée à la conclusion que « malgré de nombreuses recherches, rien n’indique pour l’instant que l’exposition à des champs électromagnétiques de faible intensité soit dangereuse pour la santé humaine ». « L’OMS a un discours évolutif, remarque l’ingénieur. En 2011, elle classait les ondes électromagnétiques dans sa catégorie « cancérigène possible ». En mettant en évidence le risque de tumeur au cerveau (par augmentation de la température de celui-ci) en cas d’exposition directe prolongée. Elle a tendance à minimiser les risques quand elle n’en a pas la preuve. » Quoi qu’il en soit, le risque d’être affecté par les ondes Bluetooth est largement moindre que celui que l’on court avec les ondes émises par les téléphones mobiles (entre 900 et 1.800 mégahertz) qui se retrouvent tout en haut de la pyramide des micro-ondes, suivis de près par les baby-phones, les stations pour téléphone portable et les antennes-relais. Le Pr Philippe Lefèbvre, chef du service ORL (CHU Liège Sart Tilman), et le Dr Laurent Demanez, secrétaire général du Bureau International d’Audiophonologie (CHU Sart Tilman), partagent cet avis : « La technologie sans fil Bluetooth ne constitue pas vraiment un danger pour la santé, estime le Pr Philippe Lefèbvre. S’il y avait vraiment un problème, nous aurions assisté à une recrudescence des tumeurs cérébrales, or ce n’est pas le cas. Il y a aussi un milliard de GSM en circulation : s’il y avait eu une augmentation du nombre de cancers du cerveau, ça se saurait ! Cinq à dix ans seraient nécessaires pour le remarquer… » Le Dr Laurent Demanez, quant à lui, explique que les fréquences des ondes radio sont assimilables aux ondes FM, c’est-à-dire non toxiques. « Chaque firme a son standard. Les systèmes avec fil ont de toute façon tendance à disparaître. Mieux : le système Bluetooth permet aux personnes qui ont un appareil auditif de pouvoir tenir leur smartphone éloigné de leur tête : en cela, on peut donc même dire qu’ils réduisent le risque d’exposition directe prolongée à des ondes plus puissantes. »
Pour diminuer encore les risques
"Réduire les ondes électromagnétiques", Carl de Miranda, éd. Jouvence, 127 p., 6,60 euros.