Les aventures de Tintin traduites dans plus de 100 langues

En décembre dernier, sortait le dernier album de Tintin, « L’Ilate negue », une version de « L’Ile noire » en saintongeais, le patois de la région de Cognac (ouest de la France). « Nous avons été surpris par le succès. Les 6.500 albums imprimés se sont arrachés comme des petits pains », se félicite Maryse Guedeau, à l’initiative du projet.
Dupont et Dupont deviennent Thomson and Thompson
« Notre ambition est que Tintin soit lu dans un maximum de langues, qu’elles soient internationales ou locales », affirme Simon Casterman, le directeur commercial de Casterman, l’éditeur historique basé à Bruxelles. Cet objectif est désormais atteint pour les grandes langues internationales, à l’exception notable de l’arabe en raison des difficultés liées au sens de la lecture de droite à gauche. Les traducteurs doivent donc faire preuve d’imagination pour adapter les célèbres insultes « intraduisibles » du capitaine Haddock et les noms des héros. C’est ainsi que « Dupont et Dupond » sont devenus « Schutze und Schulze » en allemand et « Thomson and Thompson » en anglais.
Pour les langues régionales et locales, la stratégie de Casterman est surtout pragmatique. « Nous répondons aux demandes d’associations culturelles qui souhaitent traduire dans leur dialecte les aventures d’un héros connu de tous », explique Simon Casterman. Ces associations sont alors chargées de traduire, promouvoir et financer l’album. C’est ainsi que se sont multipliées depuis trente ans les éditions locales en Belgique (anversois, ostendais ou gaumais) et en France (breton, corse, ch’ti ou gruérien, dialecte du nord des Alpes).
Le petit reporter a aussi appris à parler québécois, féroïen, tahitien et papiamentu, la langue créole des Antilles néerlandaises où a été publié « E asuntu di Florisol » (« L’affaire Tournesol »). Il a pris pied en 2013 en Afrique avec le wolof, une langue orale parlée par plus de 10 millions de personnes au Sénégal. « Par son aspect divertissant, cette BD constitue un outil d’une importance capitale pour la promotion du wolof, aussi bien au niveau national que de la diaspora », a salué Abdou Diouf, secrétaire général de la Francophonie, dans la préface de « Kumpag wangalang wi » (« Le secret de la Licorne »), traduit par des volontaires du monde entier contactés par internet.
Bientôt en Tamoul
L’une des priorités de Casterman est désormais de trouver des relais en Inde, « où Tintin est très populaire en anglais », pour lancer des éditions en bengali, assamais ou tamoul. D’autres projets existent en araméen, en yiddish et en bambara, la langue nationale du Mali. La plupart de ces éditions sont enrichies d’un lexique afin de ne pas faire fuir les tintinophiles néophytes.
Dans de nombreux pays, comme la Russie, la popularité de Tintin a été dopée par le film de Steven Spielberg (« Le secret de la Licorne ») sorti en 2011. Il a permis de relancer l’intérêt pour un héros dont le dernier album remonte à 1976, Hergé n’ayant pas voulu qu’un autre que lui ne le dessine.