L’Europe s’est pris la vague populiste en pleine face

Plus de 27 % pour le Ukip, 26,57 % pour Syriza, 25 % pour le FN et 19,5 % pour le FPÖ autrichien. Décryptage.

Journaliste au service Société Temps de lecture: 4 min

« Si l’on rassemble les députés d’extrême droite, ceux de la gauche radicale, les conservateurs eurosceptiques de gouvernement comme David Cameron et les néonazis, on arrive entre 24 et 30 %, analyse Yves Bertoncini, directeur du centre d’étude Notre Europe – Institut Jacques Delors. C’est l’équivalent du score des socialistes européens, qui sont à 25 %. Mais contrairement aux socialistes, les eurosceptiques ne seront pas rassemblés en un groupe homogène… »

Les règles du jeu

Pour former un groupe parlementaire, il faut rassembler un minimum de 25 députés, issus d’au moins sept Etats-membres. Le but de la manœuvre ? Garantir aux députés du groupe un temps de parole plus important en séance plénière, des travaux en commission, des locaux, des fonds… Bref, davantage de poids politique.

Du côté de l’extrême gauche, le groupe GUE/NGL est sur les rails pour former un groupe en vue de la législature 2014-2019. Il sera même renforcé par rapport à la législature précédente (42 députés contre 35 en 2009) grâce aux six députés du parti grec Syriza et – à confirmer – l’arrivée des indignés espagnols de Podemos (cinq députés).

Du côté de la droite et de l’extrême droite, les affaires s’annoncent beaucoup plus compliquées. « Autant l’extrême gauche est très unifiée, autant l’extrême droite ne l’est pas du tout », explique Anaïs Voy-Gillis, de l’Observatoire européen des extrêmes.

Depuis le mois de novembre, le FN notamment cherche des partenaires pour constituer un groupe au Parlement européen, comme il en a déjà existé par le passé. Au lendemain du scrutin, les spéculations sont multiples.

« Ce que l’on sait, c’est avec qui Marine Le Pen ne veut pas s’associer, et qui ne veut pas s’associer avec elle », pointe Jean-Yves Camus, spécialiste des extrémismes en Europe auprès de l’Iris. Ainsi le parti eurocritique allemand AfD, le Parti populaire danois et le parti Les Finlandais jugent le FN infréquentable, tandis que Marine Le Pen pense de même des partis néonazis Jobbik (Hongrie), Aube dorée (Grèce) et NPD (Allemagne).

Dès lors, comment les populistes de droite s’organiseront-ils au Parlement ? Les experts sont unanimes pour les députés néofascistes : ils siégeront comme non-inscrits.

Quant aux autres – le FN, le PVV, le Vlaams Belang, le FPÖ, la Ligue du Nord (Italie), le UKIP, etc. –, ils vont tenter de rassembler les forces nécessaires pour former… deux groupes. Effectivement, Marine Le Pen (FN) et Nigel Farage (UKIP) ne comptent pas se partager la tribune : ils la jouent chacun pour soi.

Le FN, fort de ses 24 députés, tire le groupe des partis d’extrême droite. Le Ukip (24 eurodéputés également) est à la tête du clan des conservateurs eurosceptiques, qui formaient déjà d’un groupe en 2009-2014 (EFD, pour « Europe liberté démocraties »).

« La guerre civile des eurosceptiques a commencé », nous soufflait une source européenne, avant d’ajouter qu’« il n’y aura pas deux groupes différents. Si l’extrême droite arrive à constituer un groupe, l’EFD n’existera plus. Et inversement : si l’EFD se maintient, il n’y aura pas de groupe d’extrême droite. »

Deux scénarios de groupes parlementaires

Or, pour le moment, les comptes n’y sont toujours pas. Du côté des europhobes, il y a : le Ukip, le Parti populaire danois, Ordre et Justice (Lituanie), CU-SGP (Pays-Bas) et Les Finlandais. Soit cinq Etats-membres, contre sept requis.

Du côté de l’extrême droite, on compte : le FN, le FPÖ, le PVV, le Vlaams Belang et la Ligue du Nord. Cinq Etats-membres également.

Le FN comptait sur les Démocrates suédois (parti eurosceptique, anti-immigration), mais ces derniers ont signalé lundi qu’il y avait de grandes chances qu’ils siègent comme non-inscrits.

Le Vlaams Belang et la Ligue du Nord étaient, entre 2009 et 2014, inscrits dans le groupe EFD. « L’extrême droite est obligée d’aller puiser dans le camp de Nigel Farage (Ukip) si elle veut former son groupe », poursuit notre source. Mais si l’EFD perd des plumes à la faveur de l’extrême droite, les eurosceptiques auraient un avantage non négligeable : « L’EFD a une meilleure connaissance des mécanismes internes du Parlement, tandis que les partis d’extrême droite siégeaient comme non-inscrits. Ils n’ont pas l’habitude de fonctionner en groupe parlementaire. » Autrement dit : moins de chances de voir leur projet aboutir.

 

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