La photographe témoigne: «L’ours polaire est le symbole du changement climatique»

Interview de Kerstin Langenberger, photographe allemande. Son cliché d’un ours polaire mal en point a fait le tour du monde.

Journaliste au service Forum Temps de lecture: 3 min

Kerstin Langenberger est photographe. Elle se rend régulièrement en Arctique pour y photographier la faune et la flore. Elle en publie régulièrement sur son site internet. La photo d’un ours famélique qu’elle a ramené de l’archipel norvégien du Svalbard a provoqué l’émoi dans le monde entier. Nous l’avons jointe par e-mail. Elle nous a répondu en anglais. La traduction est de nous.

Comment expliquez-vous que votre photo ait touché autant de personnes ? Vous vous y attendiez ?

Je suis très surprise. Je m’attendais à ce que ma photo provoque une discussion, mais jamais à ce qu’elle devienne virale. Mais je le comprends. Un : l’ours polaire est le symbole du changement climatique. Deux : cet animal a la sympathie de beaucoup de monde. Et trois : la plupart des gens entendent parler du changement climatique, mais des images d’ours en bonne santé accompagnent les articles. Celle-ci est choquante. Et je suppose que c’est la première du genre que la plupart des gens ont vue.

Certains scientifiques ont souligné qu’il n’y avait pas de preuve que le réchauffement climatique soit à l’origine de l’état de cet ours. Votre réponse ?

J’ai un peu suivi les réactions et je comprends tout à fait que des gens disent cela. J’ai d’ailleurs moi-même écrit que cet ours était aussi mince parce qu’il était blessé à la patte. Il est affamé parce qu’il n’est plus en état physique de chasser. Je ne l’ai jamais nié. Et peut-être qu’en plus il est vieux. Mais je me pose la question : pourquoi est-il blessé ? Je ne vois que deux raisons possibles : une bagarre avec un autre ours polaire ou un combat avec un morse. La blessure me paraît étrange (on la voit mieux sur une autre photo) : très longue, comme une profonde entaille. Je n’en ai jamais vu de pareille, donc j’ai tendance à penser qu’elle a été causée par une défense de morse. C’est une théorie, mais c’est la meilleure explication, selon moi. Si c’est effectivement le cas, cela signifie que l’ours était désespéré : seuls les grands mâles osent attaquer des morses, ou alors ceux qui sont affamés. L’ours que j’ai pris en photo n’était pas si gros, donc il devait être affamé. Cela nous mène au changement climatique. La glace fond et avec elle la nourriture des ours blancs : les phoques. La population d’ours polaires diminue, cela ne fait aucun doute. J’ai vu beaucoup d’ours très maigres, quelques-uns morts, d’autres mourant de faim. J’ai vu le changement climatique à l’œuvre en Arctique. Il ne fait aucun doute. Ma photo en témoigne. Et peut-être qu’elle va donner envie à certains de changer leurs habitudes et d’essayer de faire quelque chose contre le changement climatique. Nous vivons les dernières années où l’humanité a une chance de le limiter à 2º. J’espère que les gens vont agir, dès maintenant, chez eux et partout.

 

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