Taxi! Une tranche de fiction, s'il vous plaît! Un rêve sans étoiles est un rêve oublié Telle radio, telle fiction?

Taxi! Une tranche de fiction, s'il vous plaît! La fiction radiophonique existe. Un festival lui fait la part belle. Plus belle que sur nos ondes. Homme taciturne, couple enlacé, femme pressée... Pour quelques minutes, la ville, la rencontre, sous l'angle d'une course en taxi. Brêves rencontres, traversées en tous sens. Le taxi, lieu en mouvement, de l'ordre du privé, mais en communication avec autrui, début de voyage ou sa conclusion. Samedi 23 janvier, le deuxième Festival de création sonore et radiophonique va vivre une soirée-événement «Taxis libres», une tranche de ville mettant en présence des auteurs, des comédiens, des chauffeurs de taxi, entre réalité et fiction, entre direct et différé, dans les rues de Bruxelles, en studio au Botanique et sur Radio Panik 105.4 FM. La Première assurera plus tard la diffusion ce ce que son animateur Jean-Louis Sbille n'hésite pas à appeler «un grand jeu»: Le taxi, c'est un jardin secret de Richard Kalisz (NDLR: metteur en scène et réalisateur, cofondateur avec Thierry Génicot de l'Atelier de création sonore et radiophonique) qui a écrit le scénario de «Taxis libres». Moments de trajets individuels dans le «collectif» d'une grande ville, le taxi induit un passage transitoire. Certains diront que la banquette arrière fonctionne comme le divan du psychanalyste, le chauffeur qui tourne le dos au passager pouvant être la «grande oreille». C'est un lieu de croisement des classes sociales, rattaché au monde urbain, lié au travail le jour, au rêve et à la dérive la nuit. Excusez du peu, l'ensemble de cette émission interactive «Taxis - libres» relève d'un volume technique semblable à celui requis par une nuit électorale! En direct du Botanique, Jean-Louis Sbille intimement persuadé qu'un tel projet, ça passe, ou ça casse ,sera reliée aux taxis et aux voyageurs. L'événement alternera fictions courtes, tranches documentaires enregistrées, des moments de direct... Un étrange mélange où des chauffeurs de taxi en stationnement, mais aussi des passagers privilégiés comme Luc Carton, Noël Godin, François Sikivie et Jacques Lizène nous emmèneront dans leurs réflexions et désirs nocturnes. Cette fiction-réalité a sa part d'aléatoire. Elle se construit au moment-même, constituant un événement inédit sous une forme qui tient compte de la spécificité radiophonique. De chambres d'écoute en récits de la ville, d'espace acousmatique, - cet art né de la radio pour toucher l'imaginaire de façon abstraite -, aux radios du troisième type(communautaires et associatives), la fiction se met dans tous ses états, pendant trois jours, du 22 au 24 janvier, au Botanique. Initié par l'Atelier de création sonore et radiophonique, le festival se veut espace d'écoute, de rencontre, de constat, mais aussi injonction, à l'heure où la fiction radiophonique peut prendre bien des formes, de la dramatique au billet d'humeur, du conte à la poésie, en passant par le feuilleton ou la mise en ondes de textes,... jusqu'à la désertification progressive ertébéenne. DOMINIQUE LEGRAND Deuxième Festival de création sonore et radiophonique. Du 22 au 24 janvier 1999, au Botanique à Bruxelles. Programme complet au 02-551.03.37. http://www.cugnac.com/festival.html. Un rêve sans étoiles est un rêve oublié Quel commun dénominateur entre ces proverbes d'Eluard: «Jouer du violon le mardi», «Ne grattez pas le squelette de vos aïeux» ou encore «Mieux vaut mourir d'amour que d'aimer sans regrets»? Une aventure de plus dans le festival!, répond Ronald Theunen. Et une fiction inédite écrite par quatre auteurs - belge, suisse, français et canadien. La réalisation est assurée par Ronald Theunen qui relève le défi pour la RTBF, chargée après le Canada de piloter la «fiction à quatre» de la CRPLF, une dramatique diffusée ce dimanche 24 janvier, simultanément sur les antennes de France Culture, Radio Canada, Espace 2 et Musique 3. Sous le titre générique «Un rêve sans étoiles est un rêve oublié», Romain Bouteille pour la France, Wajdi Mouawad pour le Canada, Daniel Vouillamoz pour la Suisse sont mis à contribution: chacun imagine une fiction de 10 à 12 minutes mettant en scène deux à six personnages, à partir de quelques-uns des 152 proverbes imaginés par Paul Eluard en collaboration avec Benjamin Péret («152 proverbes mis au goût du jour». Un défi dans l'histoire de la radio! Pour la Belgique, après Jean-Luc Outers qui avait inauguré la formule en 98 selon le principe du «cadavre exquis», Jean-Pierre Verheggen a choisi de puiser plusieurs proverbes dans le lot. L'auteur tonique de «La grande mitraque» et «Ridiculum vitae» brode autour de «Qui couche avec le pape doit avoir de longs pieds», «Le trottoir mélange les sexes», «L'agent fraîchement assommé se masturbe de même», «La métrite adoucit les flirts» ou «Saisir la malle au bond»... Notre chevalier du verbe ne va pas lésiner sur les moyens pour procurer aux auditeurs «l'ouïssance», à la fois jouissance de l'oreille et jouissance par l'oreille. Au Botanique, les comédiens Pierrette Laffineuse, Alexandre von Sivers, Bénédicte Chabot, Emmanuelle Libert et Olivier Cuvellier seront accompagnés par des musiciens placés sous la direction de Marc Herouet. Au sein de la RTBF où la fiction radiophonique est réduite à une peau de chagrin, cette réalisation est une onde de choc bénéfique, avec sa montagne de petits et grands écueils: Le tout premier problème, explique Ronald Theunen visiblement excité par le défi, est que nous n'avons plus réalisé de fiction depuis plusieurs années, et jamais en direct. Pour moi comme pour les techniciens, il s'agit de retrouver des réflexes. A chaque instant de cette heure de diffusion, des risques «indépendants de notre volonté»: Nous réalisons la captation au Botanique. De là, on envoie à Reyers. Et Reyers oriente vers Paris qui dirige le signal vers la Suisse et le Canada. Le manque de matériel à Reyers , explique Ronald Theunen, nous impose ces relais en «Y» depuis Paris. Pour parer à toute rupture du signal satellite, nous envoyons une ligne mono parallèlement à la ligne stéréophonique. Comment s'annonce la cuvée 99? Nous avons reçu des textes présentant des univers très différents. Romain Bouteille rencontre Shakespeare, Wajdi Mouawad donne un texte grave sur les relations entre enfants et mère, Verheggen part de la constatation que les dictons de la météo ne titillent guère l'imaginaire et Vouillamoz, plus traditionnel, met en scène un couple à trois époques de la vie. Expérience unitaire, cette fiction, à l'instar des coproductions avec l'Atelier de création sonore et radiophonique, met malgré tout la RTBF dans une situation visible,poursuit Theunen, où les techniciens font autre chose que du pousse-disques. La perspective de la radio intégrée où une seule personne assurera l'animation et la technique pourrait permettre aux techniciens de se consacrer à des travaux plus intéressants. Du moins, on nous l'assure... D.L. Fiction à quatre «Un rêve sans étoiles est un rêve oublié»: dimanche 24 juin à 20 heures sur Musique 3, en direct du Botanique. Telle radio, telle fiction? France Culture témoigne largement de la fiction, tant en feuilletons et dramatiques qu'en s'ouvrant à la création contemporaine avec des enregistrements publics et en direct. On ne peut plus en dire autant de la RTBF où la fiction s'est éclipsée sans grand bruit médiatique, au profit du couple animateur-journaliste. Thierry Génicot (Atelier de création sonore et radiophonique, auteur, réalisateur et producteur), émet l'hypothèse: La radio a fermé ses portes aux auteurs alors que depuis les années 30 la fiction était un genre reconnu. Comment expliquer ce repli au sein de la RTBF? Après 68, le conseil d'administration n'est plus composé de personnes morales et intellectuelles mais de politiques qui ont évacué la culture. Le déclin se fait sentir à partir de 1975. Inéluctable, le temps d'un Roger Simons n'est plus: le réalisateur de fictions et de dramatiques avait fait sortir la radio de l'Institut, réalisant des émissions en extérieur, avec des comédiens mais aussi des moyens énormes, créant une écriture concurrentielle de la télévision. La fiction ne s'annonce pas battue. Le Festival en témoigne, du patrimoine aux «Contes, histoires et récits de la ville» réalisés dans la perspective de Bruxelles 2000, avec des fictions coproduites par l'Atelier et la RTBF qui pratique plus une politique de «suivisme» que de producteur de service public.Que reste-t-il de l'imaginaire sonore en bataille avec des impératifs de rentabilité commerciale? Faut-il rendre un second souffle à la fiction? Définir de nouveaux concepts de radio, inventer pour de nouvelles technologies? En réunissant pendant le festival des auteurs et des responsables de programmes à la RTBF et France Culture, un débat animé par Michel Jakar s'attaquera au thème «Telle radio, telle fiction» le samedi 23 novembre. Il tournera autour du désir de radio, explique le cinéaste. Est-il utile de mener un combat pour la production d'oeuvres? On ne peut dissocier de la forme, le fait d'écrire et de créer. En fiction ciné et télé, les révolutions technologiques amènent de nouveaux types d'écriture. En radio, il est impossible de dissocier production et technique. Je souhaite que ce débat soit une cour de récré au milieu du festival, que les auteurs s'expriment. Que face à leurs désirs, des relais politiques soient pris. D. L.

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