Ces labels qui boostent les produits
du terroir et le tourisme gastronomique

La tarte al djote à Nivelles, les boulets sauce lapin à Liège, la tarte au riz à Verviers, celle aux macarons à Ciney, le pâté gaumais, les croquettes aux crevettes à la Côte ou à Bruxelles… La Belgique gastronomique est riche en spécialités locales, plus ou moins cantonnées à certaines régions du pays. Mais comment être sûr de trouver le bon boulet frites à la fois moelleux et croustillant ? Ou la djote « bin tchaude, bin blète, qu’èl bûre dèsglète » (bien chaude, bien onctueuse et que le beurre dégouline) comme la savourent les Aclots ?L’authenticité affichée n’est en effet pas toujours synonyme de qualité. Pour s’assurer que les plats typiques soient à la hauteur de la tradition, les quelque 130 confréries gastronomiques wallonnes et bruxelloises veillent au grain : « On est plutôt conservateur, dans le sens où on cherche à préserver la recette originale et le goût, revendique Guy Baivier, président du Grand conseil de la tradition gastronomique et culturelle de Wallonie et de Bruxelles (TGWB). Certaines confréries le font en attribuant des labels de qualité, d’autres en faisant des animations ou en surveillant la production. Toutes s’assurent que la tradition soit respectée. En 2016, la Seigneurie de la Vervi-riz s’est ainsi opposée à l’Afsca, qui voulait interdire l’utilisation de lait non pasteurisé dans la tarte au riz et la conservation à température ambiante, et a finalement obtenu gain de cause. »En plus de préserver la tradition, ces labels de qualité sont aussi un levier de développement économique non négligeable pour les commerces comme pour la région. « La tarte al djote a vraiment relancé notre commerce quand on a été récompensé la première fois en 1997, reconnaît Véronique Bouchonville dont la boulangerie-pâtisserie « Tout au beurre » vient d’être à nouveau auréolée de cinq étoiles par la Confrérie de la tarte al djote. Le client est attentif à ce genre de distinction qui lui assure un produit de qualité. Et ça fait aussi venir des gens extérieurs à la ville. C’est un beau coup de pub. »Les touristes attirés« Pour pas mal de fabricants nivellois (boulangeries ou établissements horeca), la remise des étoiles qui a eu lieu ce mardi est un moment à la fois attendu et redouté parce que ça va se ressentir sur les ventes », résume Christian Dalne, le Grand Bailly de la Confrérie de la tarte al djote qui se divise tout au long de l’année en cinq commanderies d’une dizaine de personnes pour goûter à l’aveugle les fameuses tartes aux bettes qui ne se font qu’à Nivelles et alentour. « La tarte al djote, c’est bien plus que du folklore à défendre », poursuit-il en avançant qu’environ 300.000 djotes s’envolent chaque année, vendues aux alentours de 8 euros la pièce. Soit un chiffre d’affaires de 2,5 millions d’euros pour la petite ville brabançonne de quelque 28.000 âmes.Ce retour en grâce lucratif de la qualité et du terroir place la gastronomie locale au cœur des stratégies touristiques, confirme Olivier Marette, en charge de la promotion de la gastronomie pour visit.brussels, l’office du tourisme bruxellois : « L’horeca va avoir un double impact, à la fois en termes économiques mais aussi d’image. Aujourd’hui, les touristes sont à la recherche d’authenticité et, plus globalement, les gens sont attentifs à ce qu’ils mangent. Nous mettons en avant la gastronomie pour faire venir les touristes à Bruxelles. »C’est ainsi que visit.brussels a lancé le label Brusselicious il y a deux ans, lequel recense les restaurants de la capitale proposant une cuisine belgo-bruxelloise de qualité, mais aussi les fritkots et bientôt les cafés. Sans oublier le concours de la meilleure croquette aux crevettes dont la première édition, remportée par le restaurant Fernand Obb Delicatessen, a fait couler beaucoup d’encre l’an dernier.La « Croquette Fever »« L’effet de buzz a été incroyable et immédiat, se rappelle Cédric Mosbeux, le chef et patron du restaurant saint-gillois promu roi de la croquette aux crevettes. Il faut savoir qu’on fonctionne sans réservations. Au plus fort de ce qu’on a appelé entre nous la “Croquette Fever”, les gens qui faisaient la file se disputaient pour avoir les dernières. Comme on n’en fait pas des centaines par jour, parce qu’on les fait entièrement à la main, il est arrivé que vers 19h ou 20h, on doive leur annoncer qu’il n’en restait plus qu’une vingtaine… S’ensuivaient alors des discussions sans fin entre eux pour savoir qui les méritait le plus pour avoir fait le plus de kilomètres. » Pour pouvoir répondre à la demande et fabriquer davantage de croquettes, le chef de Fernand Obb Delicatessen a finalement dû embaucher du personnel supplémentaire et louer un atelier adjacent au restaurant.Le buzz, Pascal Palm l’a aussi vécu en décembre dernier : son restaurant Les Terrasses, à Liège, a vu son carnet de réservations exploser dès le lendemain de la remise du Boulet de cristal, un trophée en cristal de Val Saint-Lambert remis depuis 22 ans par la Confrérie du Gay Boulet. « Au début, je n’y croyais pas beaucoup, avoue le restaurateur liégeois qui s’apprête à rouvrir début mars l’ancienne Taverne berlinoise, près de la place Cathédrale, où il servira ses boulets (mais sans pouvoir y revendiquer son titre, réservé aux Terrasses). Je pensais que ce n’était jamais qu’une confrérie d’une trentaine de personnes et que ça n’aurait pas beaucoup d’impact. » De toute évidence, il se trompait : « On m’a commandé trois à quatre fois plus de boulets, que je cuis entièrement au bouillon, ce qui préserve leur moelleux. J’ai eu des clients qui venaient de Tournai ou du Luxembourg. Et même un Canadien qui m’a demandé de les lui emballer sous vide pour pouvoir en ramener chez lui ! »

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