Des fouilles menées à Clairefontaine Des aveux en forme de confessions Le laborieux suivi des délinquants sexuels Fourniret pourrait changer de prison Des perquisitions à Sart-Custinne Appel au casier judiciaire européen La France veut centraliser. . l'instruction

Des fouilles menées à Clairefontaine * Mandat d'arrêt confirmé pour Michel Fourniret. Isabelle Laville au fond d'un puits. Premiers résultats de l'autopsie d'Elisabeth ce mercredi.FRÉDÉRIC DELEPIERRESans surprise, la chambre du conseil de Dinant a prolongé hier pour un mois le mandat d'arrêt décerné à Michel Fourniret dans le cadre de la tentative d'enlèvement manqué de la jeune Cinacienne Marie-Ascencion, le 26 juin 2003. Le mandat vaut aussi pour l'assassinat, en 1993, de la jeune fille au pair non identifiée et dont le corps aurait été enterré près de la maison de Fourniret, à Sart-Custine, selon l'épouse du forestier.1 Jeune fille au pair. Hier, à la sortie de la chambre du conseil, Me Luc Balleux, l'avocat du tueur en série, a indiqué que son client campe sur ses positions par rapport à cette jeune fille au pair, âgée de 16 ans au moment des faits présumés. Ses déclarations restent les mêmes quant à la jeune fille au pair, à savoir qu'il nie toujours toute implication dans ce dossier, a déclaré l'avocat. Une audition de Michel Fourniret était prévue hier après-midi à propos de la jeune fille, elle n'a pas eu lieu, l'un des principaux enquêteurs étant pris par une perquisition.Pour sa part, à la sortie de l'audience, le procureur du Roi de Dinant, Arnoud d'Aspremont Lynden, a évoqué la période allant de 1990 à 2000. Dix années au cours desquelles Fourniret prétend ne pas avoir commis d'acte criminel. On peut imaginer que Michel Fourniret n'ait pas fait de pause pendant dix ans dans son parcours criminel, estime le magistrat. Mais il n'y a pas d'éléments concrets à l'heure actuelle. On vérifie pour trouver des éléments concrets.Ces éléments ne viendront pas de Monique Olivier. Selon son avocat, Me Pierre Barthélémy, elle a dit tout ce qu'elle savait, mais elle ne peut exclure qu'il ait fait d'autres victimes. Quand il rentrait de ses « chasses », il ne racontait rien. Ma cliente affirme qu'elle se faisait une idée sur ce qui s'était passé en fonction de l'humeur de son mari, relate l'avocat. Selon elle, c'est quelqu'un de renfermé qui ne parle que lorsqu'il est confondu.2 Fouilles à Clairefontaine. Des fouilles ont eu lieu hier dans l'une des anciennes maisons de Fourniret, à Clairefontaine, à l'ouest de Paris. Les policiers ont chargé plusieurs grands sacs en papier dans leur voiture. Selon le procureur général de Reims, Yves Charpenel, l'opération serait liée à l'assassinat par Fourniret de Farida Hamiche, la compagne de Jean-Pierre Hellegouarch, un proche du mouvement terroriste Action Directe.Lundi, une ancienne locataire de la maison de Clairefontaine, entendant parler de l'affaire Fourniret, avait expliqué à la police qu'elle se souvenait d'avoir découvert dans le jardin, il y a trois ou quatre ans, une trappe. Quand elle l'avait ouverte, elle y avait vu des morceaux de tissu. À l'époque elle n'y avait pas prêté attention et avait replanté du gazon par-dessus.Michel Fourniret a habité Clairefontaine de 1966 à 1982 avant de déménager à Rambouillet jusqu'à son arrestation, en 1984.Une seconde habitation de Fourniret à Clairefontaine, située dans le quartier de Paincourt, a été isolée mardi par les gendarmes, mais aucune fouille n'y a encore été effectuée.3 Marion Wagon. Le jeudi 14 novembre 1996, il faisait gris à Agen. Marion, née le 3 août 1986, sortait de l'école pour rentrer déjeuner à la maison, à quelques centaines de mètres. Comme tous les jours. Elle s'est arrêtée dans la cour de son ancienne maternelle. À des copines, elle a dit : À cet après-midi. À 12 h 11 précises, une femme l'aperçoit dans la rue, à un carrefour. Depuis lors, plus rien. En tout cas, aucun résultat. Car, comme pour Elisabeth Brichet, les pistes se sont multipliées.Lors d'une reconstitution, le chien policier perdra sa trace à 50 mètres de chez elle. Fait très rare, le portrait de l'enfant a même été imprimé sur des boîtes de lait. On a même vidé une partie du canal du Midi. De fausses pistes en rivalités entre police et gendarmerie, l'enquête a piétiné.4 Aurore Pinçon. Elle avait 14 ans lorsque le 21 décembre 1995, elle disparaît de la cité médiévale de Guérande entourée des marais. De corpulence mince, 35 kilos pour 1,60 m, Aurore se rendait à l'école à vélo et n'a plus jamais donné signe de vie. De l'avis des enquêteurs, on ne peut exclure que Fourniret soit impliqué dans cet enlèvement, bien qu'aucun élément ne permette non plus de l'affirmer. Mais l'âge de la jeune fille correspond à celui d'autres victimes. Guérande est, par ailleurs, proche de Nantes, là où Fourniret a déjà assassiné Natacha Danais.5 Elisabeth Brichet. Marie-Noëlle Bouzet, la maman d'Elisabeth Brichet qui vit depuis quelques années au Canada, est rentrée mardi en Belgique.Elle a été accueillie par le service d'accueil des victimes du parquet de Namur et a manifesté le souhait de ne pas être importunée durant son séjour en Belgique. Raison pour laquelle elle ne souhaite pas annoncer la date à laquelle elle ira se recueillir au château du Sautou où sa fille a été enterrée durant 15 ans.Il se confirme par ailleurs que les premiers résultats de l'autopsie menée à Bordeaux sur les corps d'Elisabeth et de Jeanne-Marie Desramault retrouvés samedi devraient être connus ce mercredi. Ils portent notamment sur les examens dentaires et anatomiques. Des prélèvements ADN ont également été effectués.·Des aveux en forme de confessions FRÉDÉRIC DELEPIERRELes aveux de Monique Olivier ont été décrits comme circonstanciés. L'ancienne visiteuse de prison dit avoir eu peur pour son avenir en apprenant la lourde peine de prison - 30 ans - infligée à Michelle Martin, l'ex-femme de Dutroux. Histoire de se dédouaner un peu plus, elle affirme avoir avoué par crainte de voir son mari libéré par la chambre du conseil après un an de détention préventive pour la tentative d'enlèvement sur Marie-Ascencion. Comme elle savait pour le reste, elle ne voulait pas qu'il fasse d'autres victimes, dit son avocat Pierre Barthélémy. D'où ses confessions. Extraits.Isabelle Laville. En 1987, le couple Fourniret vit dans l'Yonne, à Saint-Cyr-les-Colons. Le 11 décembre, près d'Auxerre, Isabelle, 17 ans, est enlevée. Il m'a demandé d'accoster une jeune fille qu'il avait repérée. Je l'ai fait monter à bord en lui demandant une adresse, raconte Monique Olivier. Comme c'était la première victime, je n'ai jamais deviné qu'il allait la tuer ensuite. Pendant ce temps, luiest resté sur le bas-côté de la route avec un jerrycan d'essence, pour simuler l'attitude d'un automobiliste en panne. Fourniret aurait ensuite abusé de la jeune fille. Il l'aurait étranglée et chargée dans sa voiture. Il l'aurait finalement abandonnée dans un puits, près d'un transformateur.Michel m'avait dit que si je parlais, il me dénoncerait comme complice. J'ai eu peur qu'il fasse la même chose avec moi. Depuis le début de notre vie commune en 1987, il a tué au moins six filles.Fabienne Leroy. Le 4 août 1988, Monique Olivier accompagne son mari à bord de la fourgonnette C 15 blanche : Sur la route, Michel a abordé une jeune fille pour lui demander la route. Il est arrivé à la convaincre. Arrivée sur un chemin de terre, la camionnette s'arrête. Il m'a demandé de m'éloigner. Je savais très bien ce qui allait se passer. C'est-à-dire qu'il allait abuser d'elle puis la tuer mais je lui ai obéi quand même. À un moment donné, j'ai entendu un coup de feu, relate l'épouse.Le couple repart à Floing. La victime est abandonnée près de Mourmelon. Comme c'était un endroit situé près d'une caserne militaire, Michel a voulu faire croire que c'était un militaire qui avait tué la fille.Elisabeth Brichet. Quelques jours avant le 20 décembre 1989, Fourniret a dit à sa femme qu'il partait en chasse. Ce qui signifiait qu'il essayait d'enlever ou de séduire une jeune fille. Durant la séquestration d'Elisabeth, Monique Olivier est priée de quitter le château. À mon retour, il m'a dit que c'était terminé et qu'il l'avait mise sous terre grâce à la tractopelle.Jeanne-Marie Desramault. Fourniret a repéré sa proie. Le 18 mars 1999, le piège se referme, à Charleville-Mézières. Elle était même d'accord pour passer un week-end chez nous à Floing. J'ai téléphoné à une soeur de l'école sous un faux nom pour savoir si elle était là, déclare Monique Olivier. Ce samedi matin, le couple vient chercher Jeanne-Marie devant la gare. Elle est ramenée à Floing où elle est violée par Fourniret. J'étais terrorisée par ce qui se passait sous mes yeux, paralysée par la crainte des réactions de Michel. Trois jours plus tard, Fourniret enterre Jeanne-Marie au Sautou.Natacha Danais. Le 21 novembre 1990, Michel avait été convoqué au tribunal de Nantes au sujet des toiles appartenant au père de mes deux fils qu'il avait brûlées, se souvient Monique Olivier. Lors du retour, il décide de prendre une gamine. Nous nous sommes arrêtés près d'une jeune fille inconnue pour lui demander son chemin, avoue-t-elle. Natacha, 13 ans, grimpe dans la fourgonnette blanche. Monique est contrainte de s'éloigner. À un moment donné, Michel m'a fait revenir dans la voiture. Le corps de la gamine était allongé à l'arrière du C 15, inerte, poursuit Monique Olivier. Le corps est abandonné sur une plage durant la nuit.Céline Saison. Le 16 mai 2000, Fourniret déclare : « Je suis allé à la chasse aujourd'hui, j'ai obtenu satisfaction ». J'ai tout de suite compris de quoi il parlait, commente Monique. Il venait en effet d'enlever Céline Saison (18 ans), à Charleville-Mézières. À aucun moment, Michel n'a montré des remords. Au contraire il était fier de lui comme à son habitude. Il était convaincu que ses victimes étaient demandeuses et satisfaites des rapports qu'il leur imposait, assure l'épouse.Dès son retour à Sart-Custinne, Fourniret aurait brûlé les vêtements de la jeune fille dont le corps a été retrouvé, en juillet, dans les bois, à Sugny.·Le laborieux suivi des délinquants sexuels ÉCLAIRAGE JEAN-PIERRE BORLOOA chaque nouvelle affaire d'abus sexuel sur des enfants se repose la même question : que faire de ces personnes afin qu'elles ne récidivent pas ? Impossible d'y répondre. Car chaque cas est différent. Mais une politique globale et suivie en la matière mériterait un soutien total du monde politique.Le 19 avril 1999, un arrêté royal créait un établissement scientifique de l'Etat, dénommé Centre pénitentiaire de recherche et d'observation clinique. Chargé de traiter les délinquants sexuels, il devait « être mis en place sans délai », disait le texte.Lundi, le député CD&V Tony Van Parijs a interpellé la ministre de la Justice sur l'existence de ce centre. Laurette Onkelinx (PS) lui a répondu : Je ne veux pas mettre ce centre sur pied si je n'ai pas la certitude que le gouvernement pourra y consacrer les moyens financiers et en personnel adéquats ainsi qu'un lieu adapté et sécurisé. Nous verrons, dans le cadre du budget de 2005 si, oui ou non, des moyens supplémentaires pourront être consacrés à la mise sur pied de ce Centre.Ceci dit, d'autres services psychosociaux travaillent sur le sujet, dans les prisons et en dehors. Mais, dans d'autres pays, les efforts consentis sont incomparables. En Suède, par exemple, le suivi des agresseurs sexuels est extrêmement bien organisé. Il existe une prison spécialisée où ces délinquants sont rassemblés, nous explique Marianne Thomas, substitute au parquet de Bruxelles. L'enfermement est long, mais il est mis à profit pour débuter un travail thérapeutique individuel. On prépare mieux la sortie de ces délinquants sexuels, poursuit la magistrate, notamment avec le psychologue qui va suivre le délinquant à l'extérieur de l'établissement. Chez nous, on les regroupe dans la même aile d'une prison, ils partagent ensemble leurs fantasmes et le suivi est rudimentaire.Nadine Vander Elst est psychologue. Elle a une grande expérience dans le suivi de ces personnes. Son credo : Chaque cas est différent. On ne peut dire a priori que tous les abuseurs sexuels doivent être soignés. Une expertise devrait plutôt dire, au cas par cas, qui devrait suivre une thérapie. La psychologue insiste aussi pour que ce travail thérapeutique, quand il s'impose, soit initié en prison.Nadine Vander Elst a également participé à une expérience en région bruxelloise. Un centre bruxellois d'appui aux équipes spécialisées dans la guidance et le traitement des auteurs d'infractions à caractère sexuel (le Cabs) a fonctionné pendant deux ans, avant d'être suspendu par l'ancien ministre de la Justice Marc Verwilghen (VLD).Il s'agissait d'un trait d'union entre les thérapeutes et la justice, explique la députée Karine Lalieux (PS). Le Cabs intervenait dans le cadre de la libération conditionnelle et permettait d'éviter la confusion entre l'approche thérapeutique et l'approche sécuritaire.·Fourniret pourrait changer de prison Certaines sources affirment que Michel Fourniret pourrait prochainement quitter la prison de Dinant - où il confectionne, paraît-il, des anneaux pour des tringles à tentures - pour un autre établissement. Ce transfert pourrait intervenir ce mercredi. La sécurité du détenu ne pourrait plus être garantie dans la prison où il est incarcéré depuis un an, selon le procureur général de Reims. On évoque la prison d'Ittre, moderne et construite pour ce type de détenus. Néanmoins, le Français pourrait être conduit momentanément à la maison d'arrêt d'Andenne, étant donné la fréquence des interrogatoires à Dinant. (F.De.)Des perquisitions à Sart-Custinne Des perquisitions ont été menées mardi au domicile de Fourniret à Sart-Custinne. Au total, sept ou huit sacs cartonnés ont été emportés par les enquêteurs l'Institut national de criminalistique et de criminologie, en vue d'examens génétiques. Un journaliste serait entré dans la maison. Cette « violation de domicile » pourrait avoir eu des conséquences néfastes sur l'enquête. (F.De.)Appel au casier judiciaire européen L'affaire Fourniret a montré les lacunes de la coopération policière transfrontalière, estime EuroCop, la coupole rassemblant 25 syndicats policiers en Europe. Pour Heinz Kiefer, président d'Eurocop, c'est au niveau de l'échange d'information que le bât blesse : Il est possible pour un criminel d'échapper aux contrôles en déménageant d'un pays à l'autre. De telles failles ne pourront trouver une solution que par la création d'un casier judiciaire européen.La France veut centraliser...Une « juridiction unique » française pourrait être désignée pour instruire l'ensemble des meurtres imputés à Fourniret, dont ceux commis en Belgique, a déclaré le procureur général de Reims. On peut centraliser les différentes instructions à Charleville-Mézières, ce qui simplifierait les procédures. On est compétent sur tout, y compris pour les meurtres de jeunes filles belges en Belgique, car ils ont été commis par un Français. Un mandat d'arrêt européen devrait être lancé prochainement pour demander le retour de Fourniret en France. ...l'instruction Le procureur du Roi de Namur, Cédric Visart de Bocarmé, a rappelé que les magistrats des deux pays ont décidé le week-end dernier de conserver chacun les dossiers dont il avait la charge, quitte à les regrouper plus tard en vue d'un procès unique. Un mandat d'arrêt européen ? Ce n'est pas pour tout de suite. C'est clair que chacun va continuer à traiter ses dossiers. Après, éventuellement, on le fera... (AFP.)

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